Nous vous parlions en début de semaine du village de Villossanges dans le Puy-de-Dôme, qui a décidé d’attaquer Orange en justice après trois semaines de coupure de réseau téléphonique et ADSL. Le PDG d’Orange Stéphane Richard est revenu sur ces difficultés lors de son audition cette semaine devant la commission des finances de l’Assemblée nationale.
Foudre et vols de câbles
« Il y a eu une dégradation incontestable ces derniers mois », a reconnu le dirigeant. La faute à une succession absolument inédite d’épisodes de foudre cet été, selon le PDG. « On a malheureusement aussi beaucoup de vols de câbles. On estime en ce moment qu’il y a 600 000 clients affectés par cela. C’est un vrai fléau », a révélé encore Stéphane Richard. Il est d’ailleurs possible de signaler toute anomalie sur la page officielle de l’opérateur Dommages-réseaux et de s’en plaindre sur la plate-forme J’alerte l’Arcep pour que le régulateur des télécoms en soit informé.
Villossanges n’est pas un cas unique en France. Les réseaux sociaux regorgent de photos de poteaux ou de câbles en piteux état, comme on peut le voir ci-dessous :
#bouclelocale Et un mois après poteau toujours pas remplacé. Bientôt J+100. Cela me rappelle une formule célèbre: « Orange tient ses engagements » À moins qu’en fait ce ne soit pas sous 30jours mais plutôt 300? https://t.co/UbllVF7NUl pic.twitter.com/Ktbo6MnX3B
— Arnaud R (@_arnaudr) January 13, 2018
Des administrés pénalisés
Le député de la Lozère Pierre Morel-A-L’Huissier avait même proposé en fin d’année dernière de créer une commission d’enquête sur les dysfonctionnements d’Orange dans la téléphonie fixe. Sa démarche n’a pas abouti mais son témoignage reste actuel : « De nombreuses personnes dans leur commune voient régulièrement leur service de téléphonie fixe interrompu pendant 2 semaines à 3 mois, alors même qu’elles continuent à payer leur abonnement. [..] et quand un technicien se déplace enfin, il ne change pas le fil cuivre, même lorsque celui-ci est usé à l’extrême, mais fait du bricolage. La ligne se remet alors à fonctionner quelques temps – tout en créant des problèmes sur d’autres lignes du fait de la réparation hasardeuse et du trop grand nombre de lignes qui dépendent d’un seul fil cuivre – avant de, de nouveau, rendre l’âme », rapporte alors le député.
Le problème, c’est qu’Orange est délégataire du service universel. Cela signifie que chaque Français doit bénéficier d’un accès de qualité et à un tarif abordable au téléphone et à l’ADSL. Doit-on considérer que l’opérateur ne remplit pas sa mission de façon satisfaisante ? C’est un pas que ni le gouvernement ni l’Arcep ne sont prêts à franchir. Toutefois, Orange s’est déjà illustré par le passé par le non respect de ses obligations. Au point que l’Arcep avait été contrainte de déclencher une enquête administrative en 2014. Aussi, lorsque l’opérateur a vu sa mission de service universel renouvelée au mois de décembre dernier, le gendarme des télécoms a demandé au gouvernement de durcir les indicateurs de qualité engageant Orange. Dans le même temps, la loi pour une République numérique a renforcé les sanctions encourues si ces derniers n’étaient pas atteints. Tout un arsenal que le gouvernement ne juge visiblement pas nécessaire de mobiliser. Et le pire est peut-être à venir.
La qualité va encore se dégrader
Outre la foudre et les vols de câble, Orange argue que le réseau cuivre est vaste et vétuste. Ce qui le rend difficile à entretenir. « L’essentiel de ce réseau a été construit entre 1976 et 1978. Aujourd’hui, cela représente 30 millions de paires de cuivre, 21 000 nœuds de raccordement, 1 million de kilomètres d’artères, qui sont pour moitié en souterrain et pour moitié en aérien, et 15 millions de poteaux », a énuméré Stéphane Richard devant les députés.
L’opérateur historique prévient déjà que la situation va encore se dégrader dans les années à venir. « Les problèmes de qualité seront de plus en plus importants. Et ce sera un vrai défi pour nous de gérer en parallèle la montée en puissance de la fibre et ses investissements, et en même temps le maintien de la qualité du cuivre », a encore déclaré le patron d’Orange. La situation ne sera réglée que le jour où l’on pourra basculer entièrement sur la fibre optique, ce qui représente une perspective encore très lointaine.
Une démonstration que les autres opérateurs français ont du mal à comprendre. Orange toucherait environ 1,5 milliard d’euros avec les abonnés qui ont conservé une ligne téléphonique RTC cuivre. A quoi s’ajouterait encore 1,5 milliard versé par les autres opérateurs au titre du dégroupage. En théorie, Orange disposerait donc d’une enveloppe de 3 milliards d’euros pour entretenir le réseau cuivre. Or, Stéphane Richard parle d’un budget d’un demi milliard d’euros consacré à la modernisation et à la maintenance. Ses concurrents attendent maintenant davantage de contrôle de la part de l’Arcep pour vérifier que les travaux de maintenance sont bien effectués dans les règles de l’art.
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