Ces dernières semaines, j’ai été régulièrement contacté par de jeunes dirigeants européens. Ils étaient très inquiets sur l’avenir de leur projet. Comment pouvaient-ils s’adapter aux réalités du marché ? La réponse est moins simple qu’il y a six mois. Certes, l’avenir regorge toujours d’opportunités, mais l’époque est bien finie où toute idée de service ou de site Internet ?” même copiée sur des concepts existants ?” semblait conduire tout droit à la gloire et à la fortune. Le retour au principe de réalité a sonné la fin de la première vague des entreprises Internet européennes.Le retour de bâton a également eu lieu aux Etats-Unis. Mais l’Internet commercial y fonctionnait depuis cinq ans, et le marché avait acquis une certaine maturité. Il était moins sensible à un effet de mode global. Même avec le Nasdaq en baisse de plus de 30 % depuis la mi-mars, les fonds de capital-risque n’ont pas ralenti significativement leur rythme d’investissement. En revanche, ils ont très vite adapté leurs cibles, leurs modèles et leurs conseils. La différence essentielle ? Ils ne mettent plus d’argent dans les projets des jeunes équipes qui ne connaissent rien au marché qu’ils veulent révolutionner.
L’Europe va plus vite grâce à des outils nouveaux
En revanche, ils en consacrent davantage aux produits et aux services conçus par des ‘ pros ‘ dans leur domaine d’activité. En France, il serait dommage que la frilosité des marchés financiers ?” et des commentateurs prompts à brûler ce qu’ils ont adoré ?” ne freine l’élan des nouveaux entrepreneurs et des investisseurs en capital-risque. Car l’Europe n’a qu’un ou deux ans de retard sur les Etats-Unis en matière de commerce électronique, et elle est en train de le rattraper à grande vitesse.Ce rattrapage s’explique notamment par les performances des outils et des plates-formes logicielles qui permettent de développer des sites de e-commerce. Les Européens ont également tiré les leçons des problèmes logistiques des pionniers américains.Par ailleurs, ce retard se comble suivant un scénario très différent du modèle américain. Outre-Atlantique, l’Internet a pris tout le monde par surprise, ce qui a permis à des start-up géantes d’acquérir des positions fortes ?” notamment dans le domaine de l’accès en ligne (AOL), les portails (Yahoo!), ou le commerce électronique (Amazon.com). D’autres bastions de l’ancienne économie ont été ébranlés, depuis la grande distribution alimentaire avec Webvan jusqu’aux maisons de disques avec Mp3.com puis Napster.En Europe, en revanche, les leaders traditionnels ont eu le temps d’observer les bouleversements du marché américain et d’anticiper. Loin de sous-estimer le phénomène, ils se sont préparés et ont utilisé leurs positions dominantes pour canaliser, à leur profit, les opportunités offertes par la nouvelle économie.Ainsi, en France, les principaux services d’accès en ligne ne sont pas issus de start-up comme aux Etats-Unis, puisqu’il s’agit de France Télécom, du groupe Arnault (LibertySurf) ou de Pinault (Mageos). De même Amazon arrive bien après Alapage.com (France Télécom), Fnac.com (groupe Pinault) et BOL (Bertelsmann), filiales de grands groupes européens.
Pour relier les gens, l’internet reste imbattable
La seconde vague d’entrepreneurs de la nouvelle économie, si elle veut réussir, doit se mettre à l’écoute de la demande réelle des marchés, qu’ils soient grand public (B-to-C et P-to-P) ou professionnel (B-to-B). Elle devra aussi s’entourer de professionnels du secteur, voire de partenaires industriels, et cela, dès la création de la société. Car il existe encore des idées à exploiter.Par exemple, l’Internet reste inégalable pour contacter individuellement et anonymement des personnes entre elles, et les services innovants dans ce domaine ?” comme ceux de eBay, Flutter ou Keen.com ?” offrent encore des opportunités de développement aux jeunes entrepreneurs.Je pense toutefois que ces créneaux se trouvent moins dans le e-commerce que dans le développement d’infrastructures, de logiciels et de services pour le commerce électronique au sens large ?” depuis les composants optiques pour les réseaux de télécoms jusqu’aux logiciels de marketing direct, en passant par l’infrastructure logicielle des services pour les téléphones mobiles. Car il y a, à la clef, un marché mondial. Pourquoi le Microsoft ou l’Oracle de l’ère de l’infrastructure e-commerce ne naîtrait-il pas en Europe ?Email : [email protected]
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