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Plus on est de fous moins on rit

L’arrivée d’Internet promettait une explosion des services communautaires. A l’usage, ces services sont loin d’être satisfaisants. Et tout reste à inventer.

En rangeant quelques disques ZIP, je retombe sur les archives de mes écrits sur des BBS (Bulletin Board System, les babillards, ces services propriétaires sur lesquels on se connectait à partir d’un modem) ou sur les serveurs Minitel. Tout cela date de 1994-1995.A l’époque, le Net venait de faire son apparition en France, mais les passionnés se connectaient encore sur des serveurs privés pour y discuter. Mon dernier message se finissait ainsi :“Les BBS vont mourir, vive l’Internet. Je quitte le BBS, mais ce n’est que pour mieux nous retrouver sur le Net.” Pas de doute, j’étais quand même sacrément naïf.Le rêve d’alors, c’était de pouvoir discuter avec la Terre entière, plus rapidement, plus simplement. Et le Net faisait figure d’eldorado pour les services communautaires (certains disaient conviviaux). Quelques années après, je remarque que ma pratique du Réseau est plutôt onaniste.Je ne participe plus aux newsgroups que lorsque j’ai besoin de quelque chose. J’utilise le e-mail uniquement comme substitut au téléphone. Par contre, il ne m’arrive plus de me connecter à quatre heures du mat’ pour voir si bidule a répondu à mon dernier message sur le forum machin. Bref, mon utilisation du Net n’est en aucun cas communautaire, elle est purement utilitaire.On me répondra MultiMania, jeux en ligne, Cerclo et compagnie. Prenons-les dans l’ordre. Les MultiMania et dérivés, malgré leur réussite, ressemblent plus à des HLM qu’à des communautés. Chacun vient y héberger ses pages, sur le palier du vingt-troisième disque dur, sans franchement connaître ses voisins.Les parties de Quake en ligne ? On joue à plusieurs, certes. Mais franchement, on s’en passerait bien si l’intelligence artificielle de nos ordinateurs était plus développée. En clair : on va chercher des humains sur le Réseau uniquement pour leur faculté à ne pas se laisser flinguer comme de la chair à canon. Pas vraiment pour discuter avec eux.Les forums et Cerclo like ? Tous ces lieux vomissent de messages. A cent contributions postées par jour, on n’en peut plus, y’en a partout. Trop. Ou alors pas assez.Et les fonctions ? J’avais mieux sur Minitel. C’est vrai. J’avais des accusés de réception de mes messages, un affichage hyperrapide, très simple, qui ne nécessitait pas d’appuyer sur dix mille boutons. Promis.Le passage des services communautaires des BBS à l’Internet a ressemblé à un déménagement d’un village à une mégapole. Avant, on connaissait tout le monde, tout était assez proche, et finalement facile d’accès, même si c’était très cher et d’une qualité moyenne. Dans la grande ville, c’est certes moins cher, plus rapide, plus, plus, plus, mais on s’y perd. En voulant devenir universels, les services communautaires se sont affaissés d’eux-mêmes.Attention ! Ne voyez pas dans cette chronique un brin de la ” France profonde ” chère à certains. En revanche, quel triste constat : le communautaire est mort depuis la généralisation d’Internet. Et tout reste à inventer : les services à apporter aussi bien que les modèles d’affaires pour les financer.D’ailleurs ?” et je reviens à ma marotte ?” les services de rencontre, qui ont toujours été la pierre angulaire du communautaire, les plus fréquentés restent ceux de dialoguez.com. Vous ne connaissez pas ? Ce n’est rien d’autre quun émulateur destiné à se brancher, gratuitement, à des serveurs… Minitel.Prochaine chronique le vendredi 6 juillet

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Alain Steinmann