Le coprésident du directoire des Galeries Lafayette annonce le lancement, en partenariat avec d’autres distributeurs, d’un nouveau site d’ici à la fin 2001. Mais il considère que “ le contexte n’est pas mûr” pour un développement du B to C et entend poursuivre son désengagement de Télémarket. Quitte à discuter avec des groupes étrangers.La grande consommation est aux avant-postes de l’économie. Ressentez-vous actuellement les effets d’un trou d’air ? Non, le monde des grands magasins est en forme sur ce premier trimestre. La tendance demeure favorable, avec plus de 5 % de croissance des ventes. C’est important dans un univers où l’on a longtemps glosé sur le thème de ” la fin des dinosaures “. Si l’on peut craindre un mouvement, aujourd’hui, c’est plutôt au niveau de l’investissement. Nous sommes donc attentifs, mais pas inquiets.Sur le plan de l’investissement, justement, n’êtes-vous pas en train de réduire la voilure sur internet ? À partir de 1999, tout le monde s’est emballé. Nous sommes restés prudents sur les applications marchandes, même si nous avons exploré de nombreuses pistes de développement au carrefour d’internet et du marketing personnalisé. Si nous donnons, aujourd’hui, l’impression d’un reflux, c’est parce que nous sommes en train d’élaguer parmi ces pistes. Notre priorité, c’est de profiter d’internet pour accélérer le développement de notre branche de prestation de services, Laser (Lafayette Service). Le problème se situe-t-il au niveau des marges ? Aujourd’hui, l’économie de la grande distribution change et illustre qu’il s’agit bien de transformations importantes dans les fonctions même de l’intermédiation. La marge tirée de la vente décroît, et elle peut même être nulle sur certaines opérations promotionnelles. Ce qui contribue à restaurer de la marge, c’est la coopération commerciale, la rémunération des distributeurs par les industriels pour leur rôle d’interface avec le client, leur rôle de marketing actif. Ce nouveau mode d’interaction permet de dégager plus de marges sans vendre plus cher. L’équation gagnante sur internet repose sur ce nouveau deal entre producteur et distributeur.Tous les produits sont-ils susceptibles de profiter de cette équation ? Depuis les origines, la distribution s’est développée en satisfaisant tout d’abord les besoins les plus élémentaires de l’homme, comme se nourrir, ou s’habiller, pour aller vers des besoins plus élaborés comme la culture. Le commerce électronique remonte cette échelle à contre-courant, en commençant par les produits qui ne posent pas de contraintes physiques, comme les voyages ou les services. Par conséquent, le succès de notre supermarché en ligne, Télémarket, repose plus sur une offre de services que sur une offre de produits : en réalité, il vend du temps.Si le créneau est porteur, pourquoi réduire votre participation de 70% dans Télémarket ? Aujourd’hui, le groupe Galeries Lafayette n’est plus impliqué de la même manière dans la distribution alimentaire. Il ne fait donc plus partie de notre métier d’être l’opérateur direct de Télémarket. L’expérience est de toute façon positive, puisque si les pertes au démarrage ont été importantes, elles ont été compensées par la dilution qui est intervenue avec l’entrée de Casino au capital en mai 2000. Notre participation devrait encore baisser dans les prochains mois. Et si nous ne trouvons pas rapidement un accord avec Casino, nous discuterons avec d’autres groupes de distribution, y compris des groupes étrangers. La création annoncée en 2000 d’un site marchand de cosmétiques et de parfumerie est-elle toujours d’actualité ? La parfumerie est un créneau intéressant car la contrainte logistique est faible, et le prix est sensiblement le même partout. Toutefois, la vente de parfums sur internet pose des problèmes d’ordre juridique. Les marques veulent protéger leurs produits en perpétuant le système de la distribution sélective sur internet. Mais le marché existe et, d’ici à la fin de l’année 2001, nous allons créer un site, avec d’autres.Où en sont les Galeries Lafayette sur le plan du B to B ? Nous sommes membres de la place de marché de la distribution WWRE depuis novembre 2000. Cette participation s’inscrit dans un programme de réduction des dépenses externes, les biens et services qui ne sont pas destinés à être revendus. Ces dépenses nous coûtent 686 millions d’euros par an (4,5 milliards de francs), et une économie de quelques pour-cent est prévue dès 2001. Dans un deuxième temps, les places de marché peuvent faire évoluer la structure de nos métiers en améliorant la chaîne d’approvisionnement. Le sujet est sensible pour l’e-commerce, car le vrai motif d’insatisfaction des clients, ce sont les produits manquants. Aujourd’hui, tout le monde fonctionne avec des stocks importants et des à-coups. L’approvisionnement n’est pas tiré par le consommateur final. Avec le net, on pourra renverser le processus.Pourquoi avez-vous rejoint WWRE en novembre 2000, parmi les derniers des 53 groupes qui la constituent ? Pour des droits similaires, nous avons fait un investissement inférieur à d’autres. Pour les commerçants, la révolution internet c’est un problème de timing.
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