Après avoir cannibalisé le marché des systèmes d’exploitation et de la bureautique sur PC, lancé sa grande offensive .NET sur les logiciels d’infrastructure, Microsoft prend pied sur le marché des applications d’entreprise. Pour la coquette somme de 1,3 milliard de dollars (1,4 milliard d’euros), l’éditeur s’est en effet porté acquéreur, le 7 mai dernier, de Navision, un des poids lourds des PGI en Europe sur le segment des PME et des entreprises moyennes.Cette acquisition, la plus importante jamais réalisée par Microsoft en Europe, est à relier à celle de Great Plains, un concurrent américain de Navision, dont le rachat, pour 1,1 milliard de dollars (1,21 milliard d’euros en 2001) en décembre 2000, avait donné naissance à la division Microsoft Business Solutions. Bientôt forte d’une équipe de 3 600 personnes dans le monde, après intégration des effectifs de Navision, “cette entité sera chargée de fournir des solutions verticales aux PME et d’uniformiser les solutions de Great Plains et de Navision au sein de l’offre globale de Microsoft “, explique Jean-Marc Kuhlmann, directeur de la division PME chez Microsoft France.Désormais, elle contrôlera l’offre Navision, dont le centre opérationnel sera néanmoins dirigé par Jesper Balser et Preben Damgaard, coprésidents de Navision au Danemark. Cette acquisition confirme le tournant stratégique opéré par l’éditeur de Redmond. “ La division Microsoft Business Solutions sera un catalyseur et une preuve de la valeur ajoutée de notre plate-forme .NET, tout comme Office l’a été pour Windows”, a d’ailleurs commenté Steve Ballmer, le PDG de Microsoft dans un e-mail aux employés.
Un positionnement ancré sur les applicatifs d’entreprise
Après moins de deux années d’existence, le catalogue de la nouvelle division est déjà bien garni. Aux PGI Solomon (grands comptes), eEnterprise (PME) et Dynamics (petites entreprises) hérités de Great Plains, Navision ajoute ses PGI Financials, orienté comptabilité, Axapta, destiné aux moyens comptes, ainsi qu’Attain, qui cible les PME. Ces deux gammes, qui intègrent des fonctions liées à la comptabilité, aux finances, à la GRC, à la chaîne logistique et aux fournisseurs, se chevauchent très largement et nécessiteront une remise à plat. Microsoft met néanmoins en avant la complémentarité géographique de ces deux gammes.Navision réalise 86 % de ses activités en Europe alors que 80 % de l’activité de Great Plains sont réalisés aux États-Unis ; un bon point pour des produits financiers et commerciaux très assujettis aux réglementations nationales. Au sein de la filiale française de Navision, passé l’effet de surprise (les dirigeants ont appris la vente par un article du Financial Times), la nouvelle est accueillie plutôt positivement. “Nous avons l’experience du marché des PME qui est un axe important de développement pour Microsoft. En retour, ses technologies vont aider à enrichir et à délivrer plus rapidement nos produits à nos clients finals”, affirme Niels Niemann, DG de Navision France. Et il ajoute que “les engagements de Navision resteront inchangés, qu’il s’agisse des produits, des services ou de la grille tarifaire”.Des arguments un peu courts, tant semble être grande la suspicion vis-à-vis de Microsoft. Pour Olivier Gaillard, directeur informatique de Champagne Le Brun, “le PGI est un métier qui nécessite d’être à l’écoute de ses utilisateurs. Or Microsoft, en général, impose plus qu’il ne propose”. Mais, ajoute-t-il, “l’aspect positif de cette acquisition est de renforcer la pérennité de Navision et son assise financière”. De son côté, Pascal Villaret, directeur commercial de Klima, ne cache pas sa déception alors qu’il apprend par notre appel le rachat de Navision : “Récemment, nous avons eu des problèmes sur le serveur NT sur lequel fonctionne Financials de Navision. Microsoft nous a demandé 800 e pour répondre à une question. Je suis interloqué par ce rachat car Microsoft représente le monopole, avec des produits instables et des coûts exorbitants.”
Un long travail de refonte pour proposer des offres packagées
Si Microsoft affirme qu’à court terme les engagements de Navision seront respectés, une refonte tarifaire pourrait avoir lieu, lorsque Microsoft réengagera les technologies des deux éditeurs dans des offres packagées. À moyen terme, les modules exploités sur le mode FAH par Navision feront leur apparition sur bCentral, le portail destiné aux PME. Dans l’Hexagone, les ambitions affichées par Microsoft sont modestes. Navision France demeure en effet une entité réduite, qui “a réalisé un chiffre d’affaires situé entre 4 et 5 millions d’euros en 2001”, détaille Jean-Marc Kuhlmann. Enfin, sur le plan opérationnel, la division .NET de Microsoft France assurera la cohérence technique de l’offre.
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