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Petits secrets de fabrication des puces

Mélangez du silicium avec différents gaz, liquides et métaux. Exposez le tout aux rayons ultraviolets et vous obtenez un processeur. Plutôt simple, la gravure des puces, non ? Explications.

Processeurs, chipsets, mémoires : les circuits électroniques de notre quotidien logés dans les micros, les assistants numériques et les téléphones mobiles sont des chefs-d’?”uvre de miniaturisation. A l’intérieur d’un petit boîtier de quelques centimètres carrés, ils peuvent renfermer plusieurs dizaines de millions de transistors. Ces composants électroniques, qui agissent comme des interrupteurs en laissant ou non passer le courant, sont reliés les uns aux autres à l’échelle microscopique dans un assemblage très complexe. Dans un processeur, cet assemblage détermine quelles fonctions exécuter et, à plus grande échelle, comment gérer le matériel et faire marcher les logiciels.Pour assembler ces millions de composants, les méthodes de fabrication sont loin d’être simples. D’autant que pour réduire l’encombrement et augmenter la vitesse de circulation des électrons entre les circuits, les puces sont conçues en trois dimensions. Les transistors sont empilés les uns sur les autres, en plusieurs couches, avec des connexions entre les différents étages. Malgré cette complexité, on peut facilement comprendre les principes de fabrication des puces par simple analogie pâtissière. Un processeur, c’est comme un gâteau : pour le créer, il faut une batterie d’ustensiles (des machines industrielles), une recette et des ingrédients.L’ingrédient de base est le silicium, un élément chimique très abondant dans l’univers et très répandu sur Terre, en profondeur comme en surface. Présent à l’état naturel dans le granite ou le silex et transformé par l’homme sous forme de verre, de cristal ou de porcelaine, le silicium est partout. Au milieu des années 50, il a été préféré au germanium, un autre élément chimique, en raison notamment de meilleures propriétés semi-conductrices dans des conditions extrêmes de température. Depuis, il est devenu incontournable.Pour fabriquer un processeur, on utilise un matériau pur à plus de 99,99 %, sous forme de galette ronde (appelée wafer). Le wafer constitue en quelque sorte le “fond de tarte” utilisé pour la gravure des puces. Ici, pas de production artisanale : on grave plusieurs centaines de circuits en même temps (côte à côte) sur une galette de quelques millimètres d’épaisseur et de 20 ou 30 centimètres de diamètre (les tailles standard utilisées actuellement dans l’industrie).

De la lumière pour sculpter les puces

Si l’on parle de gravure des processeurs, c’est parce que les opérations mises en ?”uvre pour reproduire la structure tridimensionnelle d’un circuit s’apparentent plus à de la sculpture qu’à de l’assemblage de pièces. Grâce à des moyens chimiques, on procède en même temps à la fabrication des transistors et à la construction du réseau de connexions électroniques qui les relient entre eux. On se sert pour cela d’une technologie photochimique qui utilise la lumière ultra- violette, appelée photolithographie (voir encadré page précédente). Elle sert à construire petit à petit des couches superposées ?” une vingtaine au total ?” contenant chacune des milliers de transistors (un peu comme un mille-feuille).A chaque étape, le processus est le même : par photolithographies successives, on grave dans la galette les motifs d’une couche ; on bombarde ensuite la galette avec des ions afin de créer des chemins pour laisser passer les électrons (c’est à ce moment-là que le transistor est effectivement créé) ; puis on dépose du métal (aluminium ou cuivre) pour réaliser les interconnexions entre les transistors. A la fin, on ajoute une dernière couche protectrice (le sucre glace du mille-feuille).

Des processeurs emballés avec soin

Ainsi gravés et toujours réunis sur une même galette, les processeurs sont prêts à être testés.Chaque puce est soumise à une série de tests destinés à vérifier le bon fonctionnement de toutes ses connexions électriques. Si un défaut est détecté, l’emplacement correspondant sur la galette est marqué afin que le processeur soit plus tard écarté. Vient alors le moment de la découpe. Les galettes sont placées dans une machine équipée d’un “couteau” en diamant.La précision est de rigueur car la surface occupée sur la galette par une puce nue (aussi appelée die) n’est que de quelques centimètres carrés. Pour un Pentium 4 de dernière génération, elle équivaut à celle d’un demi-timbre poste !Après la découpe, chaque processeur doit être conditionné dans un emballage de protection. L’opération s’effectue à l’aide d’une autre machine qui va souder de minces fils d’or aux emplacements prévus sur la puce nue. Ces fils sont ensuite reliés aux connecteurs internes du boîtier du processeur, eux-mêmes reliés aux connecteurs électriques externes. Ce sont ceux que l’on voit quand on tient un processeur dans la main et qui servent à enficher le circuit sur la carte mère d’un PC.Après cette phase de conditionnement, tous les processeurs sont à nouveau testés. Il arrive, en effet, que la puce nue ait été endommagée lors de la soudure. Le fonctionnement du circuit et sa fiabilité sont testés, ce qui permet aussi de déterminer à quelle fréquence il pourra fonctionner sans risque. Une fois validé, le circuit est prêt à être livré. Il se retrouvera dans un PC quelques semaines plus tard.

Pas un microgramme de poussière !

Toutes ces opérations sont effectuées dans des usines spécialement adaptées à une production industrielle à l’échelle microscopique. Les machines sont installées dans des salles blanches (clean room), dont l’accès est strictement réglementé. Car à l’intérieur de ces salles antistatiques, une propreté extrême est de mise. Toutes les particules du monde extérieur sont filtrées, afin que les galettes de silicium, les produits chimiques et les processeurs gravés ne risquent pas d’être “contaminés”. A l’échelle d’un processeur, un simple grain de sel déposé sur une puce nue est comme un énorme bloc de pierre détaché d’une montagne qui serait tombé sur une voiture ! Dans les salles blanches, l’air est donc filtré en permanence.Le personnel doit porter des combinaisons spéciales qui filtrent toutes les particules humaines (peau, cheveux, par exemple) et celles provenant de l’extérieur (poussière, pollen, etc.). Gants, chaussures, casque avec système de filtrage d’air : rien n’est laissé au hasard. Avant de pénétrer dans une salle blanche, il faut impérativement effectuer plus de 40 vérifications. Ces contrôles prennent au minimum une demi-heure à des visiteurs, les professionnels y arrivent en cinq minutes

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Jean-Marc Gimenez