Quatre heures avant son départ, Aruna Jhala a reçu un appel de la firme de Los Angeles qui l’avait recrutée, lui annonçant que les difficultés économiques actuelles l’obligeaient à geler ses embauches. Pour cette informaticienne indienne de 26 ans, le rêve américain s’est effondré en un instant. Comme Aruna, ils sont plusieurs milliers d’ingénieurs en Inde à subir le contrecoup du ralentissement de l’économie américaine, obligés soit de revenir des États-Unis, après avoir été licenciés, soit d’annuler leur départ. La situation est problématique en Inde même.Soixante-dix sociétés ont mis la clé sous la porte à Bangalore, la capitale indienne de l’informatique, faute de commandes. Même la société d’édition logicielle Infosys ?” qui recrutait 1 500 ingénieurs par an depuis 1996 ?” a annoncé un gel des embauches. Après une hausse de 114 % en 2000, son chiffre d’affaires ne devrait progresser que de 30 % cette année. Une hausse confortable néanmoins, qui prouve que les difficultés des entreprises informatiques indiennes restent relatives.Comme l’explique Rajiv Gupta, du cabinet Golden Sachs à Delhi, “le ralentissement de l’économie américaine a surtout un impact psychologique. Mais les ingénieurs qui perdent leur emploi sont les moins qualifiés. De même, les firmes qui font faillite sont jeunes et ont été créées sans expertise “. Une opinion que partage S.V. Ramachandran, le directeur de Nasscom, l’association indienne des fabricants de logiciels : “2000 a été exceptionnelle, avec une hausse des exportations de logiciels de 70 %. Cette hausse devrait être de 40 % en 2001, soit la moyenne de ce que nous enregistrons depuis dix ans. Nous atteindrons notre objectif de 50 milliards de dollars [58,9 milliards d’euros] de chiffre d’affaires en 2008. L’Inde est spécialisée dans la maintenance de systèmes informatiques et la conception de logiciels. Deux domaines qui ne peuvent pas subir la crise “.
Priorité à la recherche
Directeur d’Exodus Communication, B.V. Jagdesh va plus loin : “La crise américaine est une chance pour l’Inde. Elle va nous permettre d’assainir le marché de l’emploi en récupérant les bons informaticiens revenus des États-Unis. Cela va aussi nous obliger à nous recentrer sur des projets à long terme avec une forte valeur ajoutée“. Les firmes indiennes qui éditent des logiciels devraient accroître leurs activités de recherche et développement et s’orienter vers de nouveaux métiers, comme l’informatique de banque. Elles vont aussi s’intéresser davantage au marché européen, qui ne représente que 23 % de leur chiffre d’affaires à l’export (contre 65 % pour les États-Unis). Le coup de blues d’Oncle Sam devrait surtout inciter de nombreuses firmes américaines à faire concevoir leurs logiciels en Inde, profitant d’une main d’?”uvre compétente et bon marché. Plusieurs grandes sociétés ont d’ailleurs annoncé des investissements élevés, tel Oracle qui va construire un centre de développement à Bangalore pour dix millions de dollars. Quant à Sun Microsystems, il annonce un investissement de 50 millions de dollars et l’embauche de 600 informaticiens.
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