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Patrick Partouche, directeur général du groupe Partouche : ” Une machine à sous fidélisante “

Le leader français des casinos fait passer son parc de bandits manchots à l’ère de la relation client tout en accélérant son offensive dans le jeu en ligne.

Dans quelle mesure l’activité du jeu d’argent est-elle affectée par une crise économique ? Durant une crise, le joueur garde ses habitudes. Il va peut-être reporter certains achats, mais il ne va jamais cesser de pratiquer sa passion. Notre croissance reste donc à 2 chiffres d’une année sur l’autre.Cette constance dans l’activité jeu, visiblement non tributaire des crises, est un atout non négligeable pour vos actionnaires… Des analystes nous ont interrogés sur l’éventuel impact du 11 septembre. On peut distinguer deux secteurs. Le premier n’a quasiment pas été affecté. Il concerne la majeure partie des établissements français. Je vous rappelle que 90 % du produit brut des casinos est en provenance des machines à sous. Les casinos qui disposent d’une clientèle captive de proximité n’ont pas souffert. Le second englobe les établissements transfrontaliers ou ceux qui sont très significativement orientés vers une clientèle étrangère. Eux ont connu une déperdition. Relative puisqu’elle s’est faite sur les jeux traditionnels, et non sur les machines à sous. Ainsi, Le Carlton à Cannes a beaucoup souffert. Parce que c’est le plus gros casino de jeux de table, qui travaille avec une clientèle qui voyage beaucoup. Mais, globalement, l’activité est revenue à la normale fin décembre.Quelle est la place des technologies modernes dans les casinos aujourd’hui ? Il y a deux types de technologies. Celles qui sont orientées client et celles qui sont internes. En interne, sont concernés la gestion et le suivi online du fonctionnement des machines. Chaque machine est reliée à un serveur. Nous suivons, en temps réel, les mouvements qui s’y effectuent. Les tapis ne sont pas reliés parce que cela ne nous sert à rien, mais nous centralisons les informations en fin de soirée. Quand on se connecte sur une machine, on sait exactement combien elle a encaissé et combien elle a distribué de jackpots. Alors à la question que vous ne me posez pas “Est-ce qu’il y a une possibilité d’influer sur la machine en temps réel”, la réponse est non. C’est une opération en oneway [à sens unique, ndlr]. Chaque machine est comme un terminal sans disque dur, avec une carte mère dont nous n’avons pas la clé, puisqu’elle est scellée par les services du ministère de l’Intérieur. C’est sur la carte mère que résident les algorithmes et les taux de distribution.Et vis-à-vis de vos clients, quelle est la place de ces nouvelles technologies ? Nous allons passer à une nouvelle ère et, modestement, je précise que c’est moi qui en suis à l’origine en France : celle du ” player- tracking “. C’est un système de fidélisation intégré à la machine à sous. Nous allons vous donner une carte avec une piste magnétique. Vous allez introduire votre carte dans une machine à sous qui va vous identifier. En effet, cela m’intéresse de savoir quand vous venez, quelles sont les machines qui vous attirent, etc. Nous nous créons ainsi une base de données. Mais quel est l’intérêt pour le client ? Je vais le rétribuer en points sur les volumes de jeux qu’il va générer. Vous allez, au bout du compte, gagner des voyages dans nos établissements, comme à Djerba en Tunisie, des repas dans nos restaurants, des lots, des téléphones portables et des remises sur l’ensemble de nos prestations. Sur Juan-les-Pins, nous avons déjà 20 à 22 % des enjeux qui sont identifiés. Mon rêve serait de repérer les habitudes du client, comme ce qu’il aime boire ou manger, puis de le devancer dès que je repère sa présence, en lui envoyant un message sur un pager. Car, même si nous sommes cotés, nous sommes avant tout des commerçants. C’est ça les nouvelles technologies orientées clients. Quels moyens allez-vous déployer ? En dehors des investissements classiques, il y a l’investissement technologique orientation-client. La barre symbolique que je n’aimerais pas dépasser, c’est 1 500 euros par machine. Nous avons 3 000 machines, mais nous n’avons pas intérêt à les équiper toutes. Certaines réalisent entre 770 et 1 200 euros (entre 5 000 et 8 000 francs) de chiffre par jour. Elles ne pourront raisonnablement pas rapporter davantage.Vous avez jeté un beau pavé dans la mare en ouvrant un site de jeu…Je serai le premier en France sur ce créneau. Dans notre pays, c’est interdit, donc il n’y a pas de chiffres concernant le jeu en ligne. Dans le monde, on doit être autour de 6 milliards de dollars [6,83 milliards d’euros]. On annonce 20 milliards d’ici à 5 ans. Je vais donc y aller, car aujourd’hui, n’importe quel Français doté d’une carte de crédit peut jouer sur des casinos en ligne…Y compris les moins de 18 ans ? Vous avez bien entendu.Y a-t-il un danger ? Aujourd’hui, la nébuleuse internet ne peut pas garantir au Groupe Partouche l’intégrité de sa marque. Je dois faire face à deux dangers: que l’on utilise notre marque et que l’éthique de l'” emprunteur ” ne soit pas celle de notre groupe. Je ne peux rien contrôler. Si vous vous faites escroquer sur un site qui s’appelle Casino Partouche, vous ne mettrez plus jamais les pieds chez moi. Aujourd’hui, je détiens le domaine www.casino-partouche.com et, celui-là, je l’assume. C’est ma meilleure parade. La législation française est pourtant draconienne…On peut jouer sur 1 500 sites de jeux depuis la France. Je ne suis pas du genre à rester sur le quai de la gare. Je monte dans le train et après je vois le contrôleur. Si je ne suis pas présent aujourd’hui, dans 3 ou 4 ans, il sera trop tard.

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Propos recueillis par Philippe Bonnet et Celia Penavaire