Dissonances, brusques variations d’intensité, allégresses des vocalises, sauts mélodiques, force du récitatif… La musique baroque a mis l’affect au c?”ur de sa partition. Dans le même temps, les peintres français de la cour de Louis XIV, à l’instar de Charles Le Brun, favori du Roi-Soleil et directeur de l’Académie de peinture et de sculpture de l’époque, travaillaient sur l’expression des variations de l’âme, prônaient une esthétique plus dynamique, plus théâtrale que celle, figée et maniérée, des portraitistes de la Renaissance. L’exposition Figures de la passion, à la Cité de la musique, convie au dialogue entre la peinture et la musique baroques, interrogeant la passion sous sa forme religieuse, littéraire ou encore triviale.
Confrontations
À La Villette comme sur internet, le spectateur est invité à vivre les correspondances, réelles ou supposées, entre la représentation de l’extase religieuse d’une Marie-Madeleine touchée par la grâce (La Madeleine soutenue par deux anges, de Simon Vouet, quatrième tableau du site à voir sur www.cite-musique.fr, cliquez sur Les Figures de la passion, puis sur Exposition dans le Menu et suivez la flèche en bas à gauche) et les oratorios d’un Marc-Antoine Charpentier ou les airs plaintifs de Sébastien Le Camus. Il confronte son regard, amusé par les vils plaisirs de la Bacchanale de Jacques Blanchard (premier tableau), aux envolées au clavecin d’un Jean-Baptiste Rameau, et compare le théâtral Portrait de Marie-Anne de Chateauneuf (par Nicolas de Largillière, cinquième tableau, sur www.cite-musique.fr) aux expressives tonalités de Sully ou Couperin.Curiosité du site : si les tableaux en ligne sont bien ceux de l’exposition “réelle”, les musiques en écoute sont différentes de celles diffusées par les audio-guides distribués dans l’enceinte de la Cité de la musique. Les droits d’auteurs sont passés par là… Sur le web, ce sera donc un sublime (mais trop court) extrait des Folies d’Espagne de Marin Marais, que l’on écoutera en visionnant l’incroyable expression de terreur du héros de L’effroi, dessin de Charles Le Brun (troisième tableau du site), quand l’exposition réelle propose, entre autres, la ritournelle lente et sévère de la scène IV de l’acte III de L’Armide de Jean-Baptiste Lully, pièce maîtresse de cet inventeur de l’opéra à la française.Marc-Antoine Charpentier et Jean-Baptiste Lully furent sans doute les deux plus grands compositeurs (et frères ennemis) du baroque à la française. Le site www.multimania.com/baroque, conçu par un amateur éclairé de la musique baroque, propose une intéressante biographie de chacun d’eux (cliquer sur Espace biographies). Où l’on découvre que Jean-Baptiste Lully, considéré comme LE compositeur français par excellence, est né Giovanni Battista Lulli à Florence, et que ce surintendant du roi en musique, expert en intrigues à la Cour, s’était octroyé un monopole en matière d’opéra et de comédie ballet, contraignant Marc-Antoine Charpentier à se consacrer, pour le meilleur, à la musique sacrée. Une façon de rappeler que l’art baroque français est intimement lié à l’absolutisme monarchique… et qu’il ne résistera pas au déchaînement de passions, toutes laïques celles-là, de la Révolution.
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