Le rappel des faits : 2003, la Ville de Paris remet en cause le principe d’un parc informatique entièrement sous logiciels propriétaires. 2004, elle lance une étude économique sur le passage au logiciel libre.
Décevante pour les partisans de l’open source, l’étude fait apparaître des coûts beaucoup plus élevés que ceux escomptés. Cependant, si sur le papier la majorité municipale reste favorable au logiciel libre, en 2005, aucune
décision concrète n’est venue étayer cette volonté politique.
__________________C’est un dossier symbolique qui pèse 160 millions d’euros. La mise à jour du parc informatique de la Ville de Paris et sa conversion au logiciel libre est l’un des dossiers phares de la première mandature de Bertrand Delanoë. Le
passage au libre d’une capitale de la taille de Paris constituerait un signal fort pour bon nombre d’administrations encore hésitantes et pour un Microsoft qui demeure largement dominant. Au-delà, au sein même des élus du Conseil de Paris, la
philosophie du libre ne convainc pas tout le monde. Depuis quatre ans, le dossier avance à pas comptés.Les trois adjoints au maire chargés de ce dossier, Danièle Auffray, chargée de la recherche et des NTIC, François Dagnaud, chargé de l’administration et de l’informatique ?” quoique chapeautée par une direction des services
informatiques (DSI) indépendante ?” et Christian Sautter, maire adjoint chargé du budget, ont commandé il y a un an à Unilog une étude économique sur la migration vers le logiciel libre. Or les conclusions de l’étude rendue en juillet 2004
font apparaître des coûts de migration largement dissuasifs.L’existant fait état d’un parc informatique d’environ 15 000 postes tournant sous Windows, d’une infrastructure également propriétaire et d’un seul logiciel libre parmi les applications métiers. Cette exception s’appelle
Lutece, c’est un CMS (Content Manager System) consacré à la conception et à la gestion de portails Web. Elle a été développée avec la DSI de Paris et a été reprise ?” librement ?” par 120 municipalités.
Un petit succès, largement mis en avant par François Dagnaud. Il démontre selon Jérôme Relinger, conseiller d’arrondissement PC à la mairie du XIIIe et partisan de l’open source, qu’avec le logiciel libre
‘ nous pouvons faire aussi bien, voire mieux, que les logiciels propriétaires ‘.
Un rapport critique
Unilog a envisagé plusieurs scénarios. Le premier consiste à conserver un système d’exploitation Microsoft et à déployer une suite de type OpenOffice sur tous les postes de travail (20 000 dans le rapport). Le second, plus
ambitieux, envisage le basculement des systèmes d’exploitation. Pour ces deux premiers scénarios, rien n’est envisagé sur les services d’infrastructures et peu sur les applications métiers mis à part la gestion des clients migrés qui devra être
redéveloppée sous Linux. Le bilan du premier scénario affiche un déficit de 16 M?, le second de 56 M?. Des sommes colossales qui ont provoqué une réaction de méfiance de la part de certains élus.Pour le premier scénario, les coûts sont estimés à 28 M?, dont 21 M? pour le seul accompagnement des utilisateurs (5 jours de formation, de support et de montée en compétence sont prévus) tandis que les
économies se chiffrent à 12 M?. ‘ Les temps de formation paraissent anormalement surestimés ‘, juge Jérôme Relinger.En effet, pour une migration comparable, celle des 16 000 postes des douanes, Jean François Donikian, PDG de StarXpert, estime que le temps de formation à OpenOffice effectif est compris entre une demie journée et une journée
par poste. D’après nos informations, les montants investis par les douanes sont environ vingt fois inférieurs au million d’euros dépensés auparavant chaque année en licences Microsoft Office.
Des hésitations politiques
Pour le deuxième scénario, le temps de formation passe à six jours, auquel s’ajoutent 36 M? de prestations externes… Pourquoi Unilog a-t-il défendu une hypothèse aussi pessimiste ? La réponse est peut-être à chercher
du côté de Munich, où les recommandations pro-libre d’Unilog ont été critiquées après les difficultés rencontrées par la capitale bavaroise durant le déploiement effectif. Mais aussi peut-être ailleurs.Jérôme Relinger estime que la question du libre recoupe une ligne de fracture idéologique beaucoup plus profonde : ‘ Les tenants du libéralisme de marché voient dans le libre une forme d’infraction aux
règles ‘. Au-delà, la direction informatique de la Ville a émis une recommandation technique défavorable au libre. Jérôme Relinger pense d’ailleurs que l’argument d’autorité l’a emporté sur la réflexion politique :
‘ Il ne suffit pas d’accumuler des expériences locales [comme à la mairie du XIIIe, NDLR], il faut qu’il y ait une décision politique qui vienne d’en haut ‘.Pour le moment, la Ville de Paris a lancé un appel d’offres, clos au mois de mai dernier, pour des prestations de formation à OpenOffice et à Office de Microsoft. Préservant ainsi dans la capitale le statu quo entre
le logiciel libre et logiciel propriétaire.(*) Nous avons extrait de nos archives quelques annonces tonitruantes, promesses solennelles et autres sujets ayant fait la une de l’actualité ces derniers mois. Les engagements ont-ils été tenus, les résultats prédits
obtenus ? Rendez-vous tous les vendredis durant l’été pour un retour sur lactualité.
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