Le nouveau gouvernement, qui dispose désormais d’une majorité suffisamment importante pour mettre en ?”uvre son programme, a indiqué à plusieurs reprises que sa réalisation sur le plan économique reposait sur une hypothèse de croissance moyenne annuelle de 3 %. Si la France dispose de réserve en la matière, situation qu’a confirmée la vigoureuse reprise des années 1997-2000, on est en droit de s’interroger sur le réalisme d’une telle approche. En particulier, le gouvernement peut-il par sa politique économique influencer l’économie du pays de façon assez déterminante pour atteindre durablement l’objectif annoncé ? Pendant les années keynésiennes, c’est-à-dire pendant les an-nées 1960 et 1970, la conviction dominante était que la politique économique était effectivement à même d’accroître le taux de croissance par une gestion systématique de la demande.Ce type de politique économique a eu des résultats positifs tant que les gains de productivité dégagés, notamment dans l’industrie, permettaient de concilier augmentation du pouvoir d’achat, investissement privé et financement du déficit budgétaire. Lorsque la productivité du capital a commencé à décliner, ces politiques ont eu comme conséquence une baisse des taux d’investissement, une hausse des taux d’intérêt et une explosion de l’inflation. La conclusion qu’en ont tirée certains économistes était le caractère illusoire de toute forme de politique économique, et la nécessité d’un désengagement général de l’État. Pourtant, le plan de relance de l’économie américaine décidé en 2001 par une administration républicaine, a priori peu favorable à l’interventionnisme étatique, montre que tous les gouvernements continuent à considérer la politique économique, et en particulier la politique budgétaire, comme un de leur moyen d’action privilégié. Cela correspond à une approche nouvelle de la donne économique qui fait dire aux économistes que l’économie est, à long terme, une économie de l’offre et, à court terme, une économie de la demande.
Susciter l’investissement
En clair, cela signifie que l’État peut augmenter sur une courte période le taux de croissance par sa gestion de la demande publique, et plus particulièrement du déficit budgétaire, mais que sur le long terme cette action devient vaine si les entreprises n’investissent pas et si la quantité de travail nécessaire à la rentabilisation de ces investissements n’est pas fournie. La possibilité pour le gouvernement actuel d’atteindre le taux de croissance qui lui permettra de tenir ses promesses repose donc sur son habileté à conduire sa politique budgétaire, mais aussi sur son environnement en terme d’investissements.Le secteur où ceux-ci semblent les plus à même d’être effectués est très clairement celui des NTIC. Pourtant, l’évidence de leur nécessité n’est pas acquise. Il est courant de parler de palier technologique pour qualifier la situation de ce secteur. Et en 2001-2002, la contribution des télécoms à la croissance française a été négative. Si, globalement, l’exemple américain montre que les NTIC sont le plus important facteur de croissance dont disposent aujourd’hui la France et l’Europe, le risque qui les caractérise y limite encore les investissements.Or, pour le gouvernement, il s’agit désormais d’y susciter l’investissement qui soutiendra la croissance dont il a besoin. Sans revenir au volontarisme de la politique industrielle des années 1960, il lui appartient de conduire ses réformes fiscales dans ce sens. Une baisse de l’impôt sur le revenu conduit à une injection automatique de demande de consommation dans l’économie et risque de partir en fumée d’inflation. Une défiscalisation poussée des NTIC permettrait, elle, de construire les gains de productivité indispensables à la croissance.* Professeur à lESCP-EAP
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