Parc immobilier, informatique, câble, production audiovisuelle… La litanie de cessions d’actifs des grands opérateurs européens de télécommunication se poursuit à un rythme accéléré.Dernière annonce en date, British Telecom qui vient de se défaire d’une partie de ses immeubles pour 3,8 milliards d’euros (25 milliards de francs), après avoir momentanément renoncé à céder sa filiale de services informatiques Syntegra. Le motif de ces opérations est, bien sûr, d’alléger un endettement colossal devenu incompatible avec la nouvelle conjoncture mondiale du marché des télécommunications.”
Les cessions peuvent parfois rassurer les marchés financiers qui scrutent les bonnes nouvelles “, explique Laurent Balcon, analyste chez Global Equities. La liste des opérateurs engagés dans ce processus de nettoyage de bilan est longue.Le Néerlandais KPN vient de vendre ses 21 % de l’opérateur irlandais Eircom, et pourrait lâcher aussi E-Plus, son activité de téléphonie mobile en Allemagne.Le copieux programme de délestages annoncé par Deutsche Telekom et France Télécom devrait se traduire, à brève échéance, par la mise sur le marché d’importants actifs immobiliers, tandis que Telefonica pourrait se débarrasser d’abord de ses parts (5 %) dans le conglomérat britannique Pearson .
Préserver l’activité
Pourtant, cette ” opération bilan propre “, annoncée et entamée depuis de nombreux mois, ne convainc pas les marchés financiers. Au contraire, les titres des opérateurs ” historiques ” poursuivent leur érosion, la cure d’amaigrissement menaçant de devenir une véritable saignée.” On peut se demander si un certain nombre d’opérateurs ne sont pas en train de passer sous la ligne de flottaison. Ce ravalement financier, dû au coût du déploiement des réseaux mobiles de troisième génération et à l’expansion internationale, ne doit pas se faire au détriment de l’activité même. Or, l’hypothèse de la cession de Syntegra par BT, société cruciale pour sa position sur le marché des entreprises, ou le recentrage de KPN sur les Pays-Bas, touchent à la stratégie industrielle de ces groupes “, souligne Laurent-Pierre Baculard, vice-président d’AT Kearney, société conseil de grands opérateurs européens.Certains, comme Deutsche Telekom, préfèrent se tourner vers les emprunts obligataires. Car les cessions stratégiques allègent autant le cours de Bourse que la dette. Les amputations d’actifs remontent d’autant plus haut que la dette est importante, mais le remède pourrait, dans certains cas, se révéler plus dangereux que le mal.Un cercle vicieux auquel n’échapperont que les opérateurs les plus solides. Les plus menacés ? Ceux dont l’endettement est le plus lourd, ceux dont le déploiement international est faible, et enfin ceux dont l’intégration verticale (téléphonie fixe, téléphonie mobile, Internet) est embryonnaire.Au titre de l’endettement, Telefonica apparaît comme l’un des mieux lotis. Pour financer ses acquisitions, notamment en Amérique latine, le groupe espagnol a eu systématiquement recours aux augmentations de capital plutôt qu’à l’endettement. Récemment, il a même annoncé qu’il renonçait à céder son pôle audiovisuel. Le ratio dette nette/Ebitda (bénéfices avant impôts, intérêts et amortissement) du groupe espagnol n’est que de 2,3, alors que celui de France Telecom atteint 5,6.
Le magot de France Telecom
Il est vrai que le groupe français détient plusieurs participations financières de taille, dans ST Microelectronics (11 %, soit 3 à 3,5 milliards d’euros), Bull, Sema, Noos (1 milliard d’euros) ou Sprint PCS, sans compter son parc immobilier (5 milliards). Selon Laurent Balcon, NTL (câble et téléphone fixe), dans lequel France Télécom détient une participation de 18 %, aurait vocation à être vendu.Le même ratio dette/Ebitda ressort à 4,4 pour BT, 4,2 pour Deutsche Telekom, qui peut encore s’appuyer sur l’introduction en Bourse de T Mobil, sa filiale de téléphonie mobile. Malgré tout, à brève échéance, Deutsche Telekom pourrait voir sa notation de dette abaissée une nouvelle fois par les agences spécialisées.La palme de l’endettement revient toutefois à KPN (multiple de plusieurs dizaines). Sa situation est telle que le néerlandais fait régulièrement l’objet de rumeurs de rachat. Une tentative a d’ailleurs échoué avec Telefonica.Sous l’aspect du déploiement international, France Télécom (présent dans une vingtaine de pays) et le britannique Vodafone (80 pays), sont en pointe.Deutsche Telekom, en revanche, n’a que peu d’ancrage à l’étranger. L’achat au prix fort de Voice Stream aux États-Unis ne compense pas une faible diffusion européenne.BT, lui, se retrouve dans l’impasse. ”
En vendant J Phone au Japon ou Airtel en Espagne, BT a cédé ses bijoux de famille, même s’il détient encore et pour peu de temps sa participation en France dans Cegetel, indique Laurent Balcon. Désormais, le groupe va être isolé en Europe. BT mène une stratégie perdante. “Troisième axe enfin, l’achèvement de l’intégration verticale. Telefonica et FT semblent encore bien placés. Pour Deutsche Telekom, la logique est là, même si la réalisation n’est pas achevée. Selon Laurent Balcon, la direction de Deutsche Telekom a au moins le mérite de maintenir le cap en conservant ses activités, excepté le câble.De son côté, Laurent-Pierre Baculard estime que “
les autres opérateurs, KPN et BT en tête, paraissent plus fragiles “.
De frêles réserves face à de lourdes dettes
Les actifs cessibles des grands opérateurs de télécommunications | ||||||
Variation en Bourse depuis le 1er janvier | Endettement net (en milliards d’euros) | Cessions d’actifs envisageables à court terme | ||||
KPN | -49% | 23,2 | E-Plus | |||
Telefonica | -6% | 24 | Pearson (5 %) | |||
France Télécom | -42% | 60 | Immobilier (5 MdE) | |||
STMicro (3 à 3,5 MdE) | ||||||
Noos (1 MdE) | ||||||
Deutsche Telekom | -29% | 56 | Immobilier (17 MdE) | |||
Câble | ||||||
British Telecom | -60% | 50 | Syntegra | |||
British Wireless | ||||||
Immobilier | ||||||
ATT | 19% | 56 | ATT Wireless | |||
Câble | ||||||
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