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Onyx, l’écran LED qui va révolutionner les salles de cinéma

La façon de diffuser des films pourrait être bouleversée par l’arrivée de grands écrans LED. Pour le public, cette technologie promet des gains en termes d’image, ainsi que de nouveaux usages.

De Cinema Paradisio à La Cité de la peur, en passant par Inglorious Basterds, le cinéma a glorifié la figure du projectionniste. Mais le métier a perdu de son expertise et de son romantisme depuis une dizaine d’années avec la généralisation de la diffusion numérique : il suffit maintenant de lancer un fichier pour qu’un film s’affiche sur grand écran. C’est maintenant au tour du nom même de « projectionniste » de se voir menacé. Car d’ici quelques années, la cabine où il officiait aura peut-être tout bonnement disparu, tout comme les vidéoprojecteurs ou projecteurs laser qu’elle renfermait.

Gary Guillier-Marcellin, directeur de la division Display de Samsung et Pascal Mogavero,  senio vice-président d'Eclair à l'inauguration de l'écran Onyx ce 7 novembre.
Eclair – Gary Guillier-Marcellin, directeur de la division Display de Samsung et Pascal Mogavero, senio vice-président d’Eclair à l’inauguration de l’écran Onyx ce 7 novembre.

C’est en tous cas ce à quoi travaille Samsung avec sa nouvelle gamme d’écrans de cinéma LED Onyx. « Les projecteurs ne vont pas s’évanouir  demain, mais nous pensons que l’écran LED pourrait s’imposer partout d’ici 10 ans », ambitionne Gary Guillier-Marcellin, directeur de la division Display de Samsung.

Nous avons pu assister à une démonstration de cette technologie cette semaine au siège de la société française Eclair, premier laboratoire en Europe, et deuxième au monde, à s’être doté d’un tel écran. Et nous avons été clairement impressionnés, même si le rendu est parfois déstabilisant par rapport aux images que l’on a l’habitude d’apprécier en salles.

Une technologie venue de l’affichage

Il ne s’agit plus de projeter un film sur l’écran mais de le diffuser directement sur plusieurs dalles LED appelés « cabinets » assemblées les unes aux autres… un peu comme si vous aviez mis bout à bout plusieurs téléviseurs de salon. Mais attention, il n’est pas question ici de rétroéclairage, car chaque diode émet sa propre lumière.

L’écran Onyx s’appuie sur la technologie SMD (Surface Mount Device) qui équipe déjà les écrans LED Indoor dans le domaine de l’affichage. Une norme spécifique a toutefois été développée pour ces écrans de cinéma qui sont certifiés DCI. Le LED SMD consiste à encapsuler les trois diodes électroluminescentes rouge-vert-bleu dans des puces et à les monter en surface sur des cartes de circuit imprimé.

A gauche, le rendu avec un vidéoprojecteur classique, à droite avec l'écran Onyx.
Samsung – A gauche, le rendu avec un vidéoprojecteur classique, à droite avec l’écran Onyx.

Avec un système de vidéoprojection, il est impossible d’obtenir des noirs ou une luminosité similaires à ce que l’on perçoit dans la vie. De plus, l’écran de cinéma distord légèrement l’image sur les côtés. Autant de défauts qui disparaissent avec l’écran Onyx. « Il permet d’obtenir des noirs vraiment noirs, apporte une grande luminosité et des contrastes beaucoup plus performants. Il y a aussi plus d’uniformité sur toute la surface de l’écran », détaille Cédric Lejeune, vice-président technologie chez Eclair. Pour comparaison, un écran de cinéma plafonne à une luminosité de 48 cd/m². quand l’Onyx monte jusqu’à 500 cd/m².

Un écran de 10,3 mètres de base est constitué de 96 dalles appellées "cabinets".
Samsung – Un écran de 10,3 mètres de base est constitué de 96 dalles appellées “cabinets”.

Les chefs opérateurs vont gagner en créativité

Il existe plusieurs tailles d’écran Onyx : 5,2 mètres, 10,3 mètres et bientôt 14 mètres de base. Celui que nous avons pu découvrir chez Eclair est le plus petit et de format seulement 2K. Mais il est en plus compatible Eclair Color HDR. Un procédé de traitement des couleurs proposé depuis deux ans aux professionnels du cinéma et intégré directement dans les logiciels d’étalonnage et de mastering en postproduction. « Cela permet d’augmenter encore la luminosité de l’image, sa netteté, et d’obtenir une meilleure dynamique avec une plus grande plage de couleur », précise Anne Ferret, responsable de la post-production chez Eclair. En résumé, la gamme des couleurs est plus vaste et fait apparaître des dégradés plus précis.

« Aujourd’hui les réalisateurs ont à disposition des caméras très performantes qu’ils ne sont pas en mesure d’utiliser à plein à cause des capacités réduites des vidéoprojecteurs. Avec un écran LED, les chefs opérateurs vont pouvoir repenser leur lumière et envisager complètement différemment, par exemple, les scènes qui se déroulent dans la pénombre », détaille Gary Guillier-Marcellin. C’est comme si le terrain de jeu des réalisateurs et des directeurs photo allait soudainement s’agrandir avec une palette beaucoup plus vaste à leur disposition. Le cinéma 3D devrait aussi beaucoup y gagner, avec des détails plus nets, davantage de profondeur et des textes que l’on pourra enfin lire malgré les trois dimensions.

Difficile, lors de la projection, de distinguer l’apport de l’écran Onyx de celui de la technologie Eclair Color HDR. C’est un ensemble que nous avons dû juger. Les noirs plus noirs, le gain en luminosité, en netteté et en détails nous ont immédiatement sauté aux yeux. Avec bonheur lors des séquences de films tournées dans l’obscurité. Et moins de confort lors des scènes d’un documentaire au pôle Nord ou d’extraits en extérieur avec un avion du film Belle et Sébastien. Car les grands espaces et les environnements clairs nous ont donné l’impression d’être surexposés et nous ont presque fait cligner des yeux. Probablement une question d’habitude. Les scènes d’intérieur plus intimistes nous ont paru plus riches en couleurs et nous nous sommes même surpris à nous attarder avec plaisir sur la teinte rose d’un pull d’un personnage à l’écran.

Bientôt des séances de cinéma en pleine lumière

Mais l’écran Onyx ne se contentera pas d’améliorer l’image. C’est tout l’écosystème des salles obscures qui pourrait être impacté. La disparition de la cabine de projection et du faisceau lumineux va permettre de rajouter des gradins en haut des salles et donc d’augmenter le nombre de fauteuils. Il a aussi fallu repenser une partie du son. Actuellement, les voix d’un film sont diffusées depuis un haut-parleur situé derrière la toile. Impossible avec des écrans LED. Des enceintes JBL ont donc été placées en remplacement au-dessus de l’Onyx, comme on peut le voir dans le visuel ci-dessous. Le son est d’abord projeté sur l’écran, puis revient sur le spectateur.

Le système audio qui accompagne les écrans Onyx.
Samsung – Le système audio qui accompagne les écrans Onyx.

L’Onyx pourrait bien aussi modifier le modèle économique des exploitants. Avec un tel écran, il n’est plus nécessaire de faire l’obscurité pour voir les images. On pourrait imaginer des séances en pleine lumière pour les enfants qui ont peur. Et la location de salles à des entreprises, pour des concerts ou des tournois de jeux vidéo.

Il existe une vingtaine de salles de cinéma dans le monde qui bénéficient déjà d’un écran Onyx dont une en Suisse, deux en Allemagne et une en Autriche. En France, Samsung espère pouvoir inaugurer une première salle l’année prochaine. Mais refuse de détailler le surcoût, qui semble conséquent concernant son équipement. Cela pourrait retarder l’adoption des écrans LED au cinéma.

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Amélie CHARNAY