Numericable passe au plan B. A l’automne, le câblo-opérateur avait discuté avec Vivendi d’une fusion avec SFR. Mais cette piste n’a toujours pas abouti, et semble enlisée, même si “l’offre est toujours sur la table”, dit-on côté Numericable.
Numericable -ou plus précisement ses actionnaires Carlyle, Cinven et Patrick Drahi- travaillent donc sur un schéma radicalement différent: une offre de rachat pur et simple de SFR, tout en cash. Puis, dans une deuxième étape, SFR pourrait être rapproché avec Numericable.
A cette heure, l’offre n’a pas encore été déposée, et notamment son financement n’a pas encore été réuni. Mais Vivendi a été informé de ce projet -il aurait été évoqué il y a quelques jours lors d’un rendez-vous entre Carlyle et le président du conseil de surveillance de Vivendi Jean-René Fourtou.
Avantages multiples
Ce plan B, beaucoup plus simple, règle pas mal des difficultés posées par une fusion. En effet, Vivendi sortirait du capital de SFR, et donc n’aurait plus à s’inquiéter de son avenir, et notamment de sa valeur future ou de son lourd endettement.
Surtout, pour fusionner, il fallait se mettre d’accord sur la valeur des synergies entre les deux opérateurs, ce qui a donné lieu à de longs débats, si ce n’est à des divergences. Numericable chiffrait les synergies à un milliard d’euros, un chiffre jugé surévalué par certains.
Enfin, cela permettrait à Vivendi de trouver un moyen de sortir de SFR, étape indispensable dans son projet annoncé de recentrage sur les médias. De leur côté, les actionnaires de Numericable pensent qu’une sortie du câblo-opérateur sera plus facile s’il fait partie d’un ensemble plus important.
Evidemment, racheter 100% du capital revient plus cher que de racheter 51%, comme prévu dans le schéma de fusion. Mais l’idée est de faire largement appel au marché de la dette, actuellement porteur. “Liberty Media vient de lever très facilement trois milliards pour racheter le câblo-opérateur britannique Virgin Media”, dit un banquier.
Mêmes obstacles
Mais ce plan B ne résout pas tout. D’abord, il faudra se mettre d’accord avec Vivendi sur une valorisation de SFR, ce qui promet d’être sportif. Mi-2011, l’opérateur mobile avait été valorisé 23 milliards d’euros lors de la sortie de Vodafone. Aujourd’hui, Vivendi assure que sa valeur reste encore “proche de 20 milliards d’euros”. Les analystes financiers, eux, pensent plutôt que SFR vaut 10 à 15 milliards d’euros.
Ensuite, même si l’offre est majoritairement financée par emprunt, il faudra quand même que Carlyle, Cinven et Patrick Drahi apportent un minimum de capital (3 à 6 milliards d’euros, selon la valorisation retenue de SFR).
En outre, une vente pure et simple de SFR fera apparaître crûment la perte de valeur de l’opérateur mobile, une humiliation que Vivendi cherche à éviter.
Vivendi aurait renoncé à vendre SFR
Mais le principal obstacle est la volonté de Vivendi de vendre SFR. Certes, le patron de SFR Stéphane Roussel martèle que “SFR n’est pas à vendre et ne l’a jamais été; il n’est pas non plus question de fusion”, comme il l’a déclaré il y a un mois au Parisien.
Mais il est difficile de le croire sur parole. En effet, durant l’automne, les dirigeants de Vivendi ont répété qu’une vente de SFR n’est “pas taboue”, embauché les banques BNP Paribas et Goldman Sachs pour étudier la question, et assuré qu’ils voulaient se recentrer sur les médias…
Cependant, plusieurs signes indiquent que Vivendi aurait récemment changé d’avis. Ainsi, SFR a baissé fortement ses prix en janvier. “Cela diminue la valeur de la société à court terme. On ne fait pas cela quand on veut vendre rapidement”, dit un analyste financier. “Cela montre que SFR est revenu dans la bataille”, abonde un proche de l’opérateur.
Autre signe: l’idée d’une scission de Vivendi entre télécoms et médias, officiellement écartée fin août par Vivendi, a refait surface fin décembre dans Le Figaro. Ce qui signifierait que Vivendi aurait renoncé à vendre tous ses actifs télécoms, un objectif apparemment trop difficile à atteindre…
Enfin, il y a le surprenant appel du pied lancé publiquement par Numericable il y a un mois dans Le Figaro. Surprenant car les négociations sur des rachats se tiennent en général derrière des portes closes, et non sur la place publique. “Cette interview révélait en creux que Vivendi avait dit non à Numericable, qui tentait ainsi un ultime forcing”, dit-on du côté de Vivendi.
Last but not least, certains administrateurs de Vivendi -comme Vincent Bolloré- estimeraient toujours que ce n’est pas le bon moment de vendre SFR, étant donné que sa valeur est au plus bas. Quelque soit la taille du chèque que leur proposera Numericable, ils seront donc difficiles à convaincre…
Interrogé sur les discussions avec Numericable, Vivendi s’est refusé à tout commentaire. De même, Numericable n’a pas souhaité faire de commentaires.
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