La ponction effectuée par les États européens sur les opérateurs de téléphonie mobile a contribué à aggraver la crise du secteur des télécoms. Cette ponction a trait à l’attribution de licences exclusives d’utilisation de l’UMTS, un protocole qui permet une transmission à haut débit et une connexion permanente via les téléphones mobiles de troisième génération (3G).En décidant de faire payer ces licences au prix fort, et avant même qu’elles aient généré un seul euro de facturation, les gouvernements ont eu une vision à très court terme.En France, la récente décision du gouvernement de diviser par deux ou trois le prix réel des licences françaises et de réduire drastiquement la partie fixe de cette redevance va certes dans le bon sens. Mais cela ne suffira pas à dissiper les nuages qui planent sur la téléphonie 3G.Premier souci : le caractère européen des opérateurs et du déploiement de l’UMTS. Si la France a pu revoir sa copie, car le processus d’attribution des licences n’y était pas terminé, Bruxelles s’est prononcé contre la renégociation des licences dans les pays ayant finalisé leur processus. Or, les licences françaises étaient loin d’être les plus chères…Lors d’enchères publiques qui se sont tenues entre avril 2000 et février 2001, la France a en effet accordé deux licences exclusives contre 10 milliards d’euros quand l’Italie en attribuaient cinq pour 12,2 milliards d’euros, le Royaume-Uni cinq pour 36,8 milliards et l’Allemagne six pour 50,4 milliards.On estime que le coût total levé par les États européens pour ces licences sera compris entre 130 et 160 milliards d’euros. Une somme à débourser en grande partie avant même que les opérateurs n’aient construit et mis en route leurs nouveaux réseaux, qui devraient coûter 200 milliards d’euros au moins.Les opérateurs pensaient financer leurs projets surtout par des augmentations de capital, et à la marge par emprunt. Mais le ralentissement de la croissance du secteur, aggravé par les doutes des marchés financiers, a conduit à une chute des capitalisations boursières des opérateurs mobiles ?” en baisse de 60 % en moyenne par rapport à l’an dernier. Déjà fragilisés par le surcroît de dette dû à la course à l’UMTS, les opérateurs ont été forcés d’emprunter de l’argent au prix fort.Deuxième gros nuage : le manque de visibilité sur les sources de revenus induites par l’UMTS. Pour justifier son investissement, Vodafone avait estimé devoir faire passer son revenu moyen par abonné de 480 euros à 900 euros. Une grosse partie de ces futurs revenus devaient provenir de l’accès aux données. E-mails, e-commerce, Net mobile : les perspectives semblaient bonnes.C’était compter sans le 802.11, un protocole qui permet de transmettre, sans fil, des données à très haut débit (54 Mb/s) dans un rayon de la taille d’un immeuble. En opérant dans des fréquences non réglementées, le 802.11 sort du champ d’application des licences UMTS.Par ailleurs, l’interopérabilité des points d’accès 802.11 permettra à un utilisateur ayant commencé une session d’e-mail sur son PC de bureau de la continuer dans un café voisin sans se reconnecter via son modem. Le prix des cartes permettant d’obtenir un point d’accès chez soi est tombé à environ 200 dollars aux États-Unis.Et la vague commence à déferler sur l’Europe, notamment en Scandinavie et en Grande-Bretagne. Si, à terme, la complémentarité existe entre les services de téléphonie mobile 3G et ceux qui naîtront autour du protocole 802.11, les conséquences à court terme sont importantes.
Qui inventera l’eBay du mobile ?
Si les opérateurs UMTS n’ont plus le monopole de l’accès aux données mobiles à haut débit, les services de téléphonie 3G risquent d’être retardés. Les dirigeants des jeunes sociétés qui se lancent dans la 3G seraient donc avisés de réduire leur dépendance vis-à-vis de l’UMTS.Cette situation devrait aussi pousser les opérateurs à sortir de leur modèle : le contrôle de tous les services de leur réseau. Pour que la 3G décolle, ils ont intérêt à laisser s’exprimer les jeunes entrepreneurs. La plupart des idées nouvelles subiront sans doute le sort des .com d’hier, mais il en sortira sûrement quelques eBay capables de pérenniser l’écosystème de l’UMTS. C’est en favorisant ces idées neuves que l’opérateur DoCoMo, au Japon, a découvert les services qui ont fait d’iMode un tel succès.
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