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Nous avons visité le centre de design parisien de Huawei, qui inspire toutes les créations du géant chinois

Inauguré en 2015, ce studio de design est unique en son genre. A sa tête, François Duris veille sur  l’unité et l’identité esthétiques du groupe.

C’est en plein cœur de Paris et avec une vue imprenable sur la Tour Eiffel que Huawei a choisi d’installer son Aesthetics Research Center il y a quatre ans. L’inauguration avait eu lieu en présence du président d’alors, Ken Hu. Unique en son genre au sein du groupe, ce studio est chargé de donner le « la » en matière de design à toutes les activités du géant chinois. A sa tête, François Duris. La quarantaine, ce diplômé de l’Ensad a travaillé durant 15 ans chez Citroën et Peugeot avant d’être appelé chez Huawei. Passer des concept cars aux flagships de la téléphonie mobile n’a pas été un cap si difficile à franchir.

Une salle de réunion du centre de design.
Huawei – Une salle de réunion du centre de design.

« Paris, c’est la mode »

Crinière noire et voix de stentor, le designer déroule ses arguments. « Ma mission, c’est de donner une unité et une identité à Huawei », explique-t-il d’emblée. Pourquoi un Français et pourquoi Paris ? « Paris, c’est la mode », évacue lapidairement François Duris. Sur les 15 collaborateurs du studio, certains profils sont d’ailleurs passés par Dior, Chanel et Givenchy. Grâce à la proximité géographique, des collaborations s’installent aussi plus facilement avec de grands acteurs comme Vuitton qui a confectionné un étui pour Huawei vendu en Chine.

La tâche du charismatique François Duris est immense puisque son champ d’action s’étend aussi bien aux produits grand public et professionnels, qu’aux stands des salons, à la communication web, aux boutiques, aux événements et même parfois aux uniformes des hôtes et hôtesses. Son studio fait également de la veille et réalise chaque année un cahier de tendances contenant photos et échantillons de matières, envoyé aux 900 designers du groupe. S’il rapporte directement au PDG de Huawei, il n’occupe pas non plus le poste de directeur artistique, qui n’existe d’ailleurs pas dans cette organisation. Le plus gros des troupes du design, environ 800 personnes, se trouve au siège social en Chine. Une autre centaine est dispersée entre Paris, Londres, Munich, à Helsinki, à Milan, en Corée et au Japon. Chaque équipe est spécialisée mais tout le monde travaille ensemble.

L'équipe du studio a aussi pour tâche de faire de la veille et de publier chaque année un cahier de tendances.
Huawei – L’équipe du studio a aussi pour tâche de faire de la veille et de publier chaque année un cahier de tendances.

Epurer et humaniser

Si François Duris refuse d’être pris en photo, il parle de son travail au quotidien sans langue de bois. « Huawei voulait passer à un langage plus international, monter en gamme mais aussi humaniser son image pour toucher une clientèle plus féminine. Quand je suis arrivé, l’esthétique c’était plutôt Star Trek et Tron, avec un univers un peu noir et proche de la science-fiction. J’ai souhaité épuré tout cela, enlever des éléments inutiles, ajouter des détails raffinés. Je voulais une techno plus humaine, plus chaude, élégante et pas intrusive », détaille-t-il. Lyrique, il s’enflamme même jusqu’à rêver de donner de la sensibilité, de la poésie et de la grâce aux objets, même lorsqu’il s’agit de produits secondaires comme des écouteurs.

L'ancien et le nouveau logo de Huawei.
Huawei – L’ancien et le nouveau logo de Huawei.

La première chose à laquelle il s’est attelé, c’est le logo de Huawei. « L’idée, c’était de jouer avec le logo radiant qui ressemblait plutôt au départ à des faisceaux qu’à des fleurs de lotus. Je voulais aussi absolument changer la police de caractères », témoigne-t-il. Il a pu très vite dégager des codes qui constituent maintenant la bible du design chez Huawei et a œuvré pour qu’ils soient systématiquement repris partout. Pour que l’on puisse toujours reconnaître au premier coup d’œil un produit Huawei, même s’il s’agit d’un serveur dans un centre de données. « Il y a toujours une touche de rouge. C’est la couleur de Huawei et celle de la passion, de la performance, de la chance, une couleur positive ». Autre constante, celle des lignes qui symbolisent des flux de données ou des microsillons et prennent parfois l’apparence de stries.

Des routeurs Wi-Fi 6. On remarquera la pointe discrète de rouge et la présence d'une ligne.
Huawei – Des routeurs Wi-Fi 6. On remarquera la pointe discrète de rouge et la présence d’une ligne.

Un travail de six mois sur chaque smartphone

Parmi ses nombreux projets, il élabore le design d’environ trois à quatre smartphones par an des gammes P et Mate. Entre les premiers coups de crayon et l’industrialisation, il se passe six mois, durant lesquels il se déplace en Asie pour évaluer les différentes maquettes. Il cherche à peser sur le layout mais sait bien qu’il n’a pas le fin mot sur l’emplacement des composants. La forme finale du smartphone est toujours le résultat d’un compromis. Difficile aussi de s’affranchir des codes imposés longtemps par Apple. Mais l’Américain ne fait pas pour lui figure de modèle. « Nous avons largement prouvé que nous pouvions innover en matière de design, ne serait-ce qu’en matière de nuances de couleurs et de dégradés ».

Le Huawei Mate 30 Pro
Huawei – Le Huawei Mate 30 Pro

Son travail consiste enfin à composer avec les différences culturelles. « On m’a fait comprendre que je ne pouvais pas trop insister sur le chiffre 4, qui porte malheur et est synonyme de mort en Chine. Dans l’autre sens, j’étais assez réticent vis-à-vis des standards asiatiques des couleurs, plus pétants, et qui semblent moins naturels qu’en Europe. J’ai évolué à ce sujet », confesse-t-il.

A l’avenir, il espère que son équipe ne va pas trop grossir. «  Nous avons la chance d’être un peu à distance à Paris et de ne pas pouvoir tout faire. Cela nous permet de garder du recul sur les choses ». Son dernier défi ? Le premier flagship store de Huawei qui va ouvrir à Paris au début de l’année prochaine. François Duris nous a juré qu’il ne ressemblerait pas aux Apple Store…

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Amélie Charnay