Vous souhaitez avoir un avant-goût des transports de demain ? Vous pouvez désormais emprunter gratuitement tous les week-end la navette autonome qui relie la mairie de Vincennes au cœur du bois du même nom. C’est ce que nous avons fait lors d’une présentation à la presse organisée par la RATP cette semaine.
Un safety driver à bord
Nous prenons place à l’intérieur de ce petit véhicule aux formes arrondies d’une contenance de quinze personnes, mais qui ne peut accueillir que six passagers assis. Nous sommes accueillis par un safety driver, un agent de la RATP chargé de reprendre le contrôle manuellement sur la machine en cas de problème. Il se tient en alerte avec, en bandoulière, une sorte de grosse console de pilotage.
Première surprise, on est prié de boucler notre ceinture, parce que le véhicule peut être amené à freiner brutalement. Nous constatons que le système de navigation fonctionne de façon fluide : la navette lit parfaitement la signalétique routière et réagit rapidement aux changements des feux de signalisation. Même chose par rapport à l’environnement. Elle détecte sans aucun problème les voitures ou piétons à proximité.
Une vitesse assez lente
En fait, le seul reproche qu’on pourrait lui faire, c’est sa vitesse qui est plutôt lente : entre 13 et 18 km/h. Vous progresserez donc plus vite en vélo ou même en courant si vous tenez une bonne allure. Il est toutefois prévu de parvenir à une vitesse moyenne de 20 km/h dans les mois qui viennent.
On comprend mieux cette vitesse modérée quand on sait comment elle fonctionne. « La navette détecte en avance de phase à plusieurs dizaines, voire centaines de mètres tout ce qui est autour d’elle. Quand elle voit un piéton sur le bord d’une route ou un vélo en contre-sens, elle commence à anticiper la trajectoire en ralentissant, voire même en s’arrêtant », nous explique Côme Berbain, le directeur de l’innovation du groupe RATP. « Il y a aussi une bulle de sécurité autour des navettes. Dès que quelque chose entre dedans, quel qu’il soit, elle ne réfléchit plus et s’arrête ».
Des automobilistes agressifs
On ajoutera que la cohabitation avec les voitures n’est pas aisée et joue probablement sur cette progression mesurée. Le safety driver doit intervenir régulièrement pour lancer une alerte sonore, afin qu’une voiture libère une voie de passage obstruée. Nous avons d’ailleurs été étonnées par le manque de tolérance des conducteurs qui croisent sa route et qui se montrent prompts à la klaxonner dès qu’elle les ralentit sur leur trajet habituel.
Il existe deux modèles de constructeurs différents pour assurer le trajet : le EZ10, de la société EasyMile, et l’Autonom Shuttle, de l’entreprise Navya. Mais ils fonctionnent de façon globalement similaire. « Pour la géolocalisation, nous disposons d’une centrale inertielle, d’un odomètre pour compter le nombre de tour de roues et d’un GPS NRTK. L’électronique embarquée se trouve sous le capot », détaille Olivier Pairot, directeur produit et marketing d’Easy Mile.
Lidars, radars et caméras
L’environnement et les obstacles sont scannés grâce à une flopée de lidars, radars et caméras. « Aujourd’hui, l’essentiel des navettes travaillent plutôt sur du lidar et du radar, la caméra venant plutôt en appoint, d’autant qu’il y a des problématiques de données personnelles qui sont plus complexes à gérer », nous explique Côme Berbain.
Chaque type de capteur présente des forces et des faiblesses. « Un lidar, ça voit très bien à très longue distance, ça repère bien les objets fins mais mal sur la neige. Le radar est plus adapté pour faire de la proximité comme détecter un objet qui est à moins d’un mètre ou repérer les objets métalliques comme les voitures mais il n’est pas efficace pour détecter les piétons », complète Côme Berbain.
Avant d’être lâchée dans les rues de Vincennes, la navette a du tourner à vide et suivre toute une phase d’apprentissage afin de reconnaître le parcours et d’être capable de se repérer. Mais sa capacité d’adaptation est primordiale parce que l’environnement évolue sans cesse. Le bois n’est pas le même en septembre ou en janvier et comporte plus ou moins de végétation. Même le paysage urbain varie avec plus ou moins de voitures garées dans les rues en fonction de l’heure de la journée.
Cette expérimentation va durer deux ans et devrait se faire en parallèle d’autres tests comme celui qui reliera les gares parisiennes d’Austerlitz, Bercy et Lyon et qui est attendu dès cet été.
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