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Noms de domaine : crise à l’Icann

L’attribution de nouveaux suffixes, prélude à l’élargissement des noms de domaine, mécontente la plupart des acteurs d’Internet. À commencer par les membres de l’Icann.

En novembre dernier, l’Icann a donné son feu vert pour l’attribution de sept nouveaux suffixes : . biz, . info, . pro, . name, . museum, . coop et . aero. Cette décision révolutionne la politique de nommage sur Internet, inchangée depuis quinze ans, et remet en cause le quasi-monopole de Network Solutions (attribué par l’Icann), qui gère au niveau mondial trois grands domaines génériques du Net (gTLD, ou generic Top Level Domain), les . com, . net et . org. “Le domaine . biz, réservé aux sites à vocation commerciale, deviendra une zone de qualité au sein d’Internet, contrairement au . com, qui fait figure de fourre-tout. Pour les entreprises, le domaine . info sera parallèlement une zone de communication institutionnelle “, argumente une société d’enregistrement française.

Les avis sont contrastés sur l’attribution du . biz

es procédures d’enregistrement de ces deux nouveaux domaines (lire encadré) doivent débuter dans le courant de l’été. Alternative au . com, le . biz suscite autant de convoitises que de questions. “Vu l’intérêt de nos clients pour ce suffixe, nous nous attendons à une progression de 300 % de notre activité “, se réjouit, par avance, Sébastien Socchard, responsable du bureau d’enregistrement BookMyName. Laurent Chamla, cofondateur de Gandi, l’un des cinq bureaux d’enregistrement, a un avis radicalement opposé : “Nous disons à nos clients que ce nouveau suffixe est une arnaque. Officiellement, l’objectif du . biz est de libérer de la place pour de nouveaux sites, mais il est évident que les détenteurs des . com vont rafler tous les . biz.” En effet, rappelle-t-il, les entreprises auront la possibilité, avant l’enregistrement, de déposer leurs marques chez NeuLevel, l’organisme chargé de gérer ce nouveau domaine. Celui-ci empochera au passage pas moins de 90 dollars (82 euros) pour chaque nom de marque déposé. L’objectif affirmé de NeuLevel est de protéger la propriété intellectuelle et de faire barrage au cybersquatting. Par ailleurs, la société a prévu un dispositif de tirage au sort pour départager des candidats demandant la même adresse web. “Avec le dépôt des marques et le tirage au sort, les modalités d’attribution restent floues et NeuLevel n’a pas été très clair sur ce point “, regrette Olivier Guillard, ingénieur à l’Afnic (l’organisme qui gère les . fr). D’après lui, “le public est demandeur de suffixes ayant une signification précise, comme le . biz, mais, à trop tirer sur la corde, l’Icann pourrait provoquer le ras-le-bol d’entreprises incitées à multiplier les enregistrements défensifs de leur nom “.

L’Icann au c?”ur de toutes les polémiques

n mécontentement largement partagé par les bureaux d’enregistrement réunis à Stockholm pour la convention trimestrielle de l’Icann. Cette réunion s’est déroulée sur fond de crise où l’autorité de l’Icann est apparue plus contestée que jamais, l’attribution des nouveaux suffixes étant prétexte à une fronde. Dès l’ouverture de la convention, les gestionnaires de domaines nationaux, ou ccTLD (country code Top Level Domain) ont voté à l’unanimité pour se retirer de la Domain Name Supporting Organization (DNSO), l’un des trois groupes fondateurs de l’Icann. Reprochant à l’organisation sa gestion trop centralisée et rappelant qu’ils financent le tiers du budget de l’Icann, ils ont plaidé en faveur d’une nouvelle structure autonome, où leur point de vue serait mieux pris en compte. Les gestionnaires de domaines alternatifs, qui reprochent à l’organisation sa lenteur dans l’attribution des nouveaux suffixes, étaient également venus faire entendre leur voix. Parmi eux, New Net, une société qui a ouvertement défié l’Icann en mars dernier, en annonçant l’ouverture de vingt nouveaux suffixes, tels que . xxx, . web ou . kid.Habituée aux attaques, l’Icann a fait front en défendant le principe d’un développement contrôlé des noms de domaine. “L’introduction trop rapide de nouveaux suffixes pourrait nuire aux performances et à la stabilité d’Internet “, a rappelé Stuart Lynn, le président de l’Icann. Mais, a-t-il ajouté, “l’introduction de nouveaux suffixes, cette année, est un premier pas ouvrant la voie à d’autres noms de domaine “.

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Laurent Sounack et Julie de Meslon