Dans l’imaginaire collectif occidental du XXe siècle, un personnage se détache comme un héros mythologique : l’espion. Dans le monde de l’information surabondante, il est l’homme du secret ; dans le monde de l’apparence souveraine, il est l’homme de l’ombre. L’agent secret, James Bond, Mata Hari.Aujourd’hui, la découverte des activités de Robert Hanssen, agent du FBI au service des Russes depuis 1985, émeut l’Amérique toute entière. L’appel du mystère est toujours aussi fort, et le marketing ne pouvait l’ignorer.Les sociétés ont en effet appris à laisser filtrer suffisamment d’informations pour entourer leurs projets d’un halo de conspiration. Dans l’ombre, tout paraît plus grand, plus révolutionnaire. L’attente est le moteur de la rumeur, et la rumeur est le meilleur des vecteurs de communication.Pour susciter cette attente, pour parler du futur produit avec un sourire entendu, l’arme principale est de lui donner un ” nom de code “. Avant même le choix du nom, cette appellation est déjà tellement connotée qu’on a l’impression que l’entreprise prépare au moins Pearl Harbour dans ses labos.Le choix du nom est alors primordial : il peut s’agir d’un animal (” raven “?” corbeau ?” chez Microsoft, ” dolphin “ chez Nintendo), ou d’un lieu, de préférence situé en Amérique centrale (Panama chez Oracle, Monterey chez IBM), ou d’une blague de potache (Snoopy chez Lotus, contré par Red Baron chez Microsoft).Une astuce supplémentaire pour exciter la curiosité est d’accoler le mot ” projet “, équivalent civil de l'” opération ” militaire, au nom de code. Dès lors, le buzz se charge de faire vivre le produit jusqu’à son annonce officielle. Parfois, à l’image de la Xbox, la console de jeu de Microsoft, le produit final garde son nom de code, tellement celui-ci a été largement adopté. Inversement, son concurrent Nintendo a caché sa future Gamecube sous le nom mystérieux et sous-marin de Dolphin, jusqu’à ce que le design soit dévoilé et justifie instantanément ce nom.Certaines entreprises comme Microsoft, Apple ou Intel se sont même faites les spécialistes des noms de code, en en attribuant à chacun de leur produit, au grand plaisir de leurs aficionados. Le Mac TV est ainsi connu sous le nom de Peter Pan et le Power Mac 7500 nest autre que TNT.En somme, un peu de poésie dans un monde binaire.Prochaine chronique le jeudi 22 mars.
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