Lors du Mobile World Congress de Barcelone, il a été sur toutes les lèvres. Exit les séduisants Huawei P10 et LG G6, la foule était du côté de chez Nokia. Pas pour voir les smartphones annoncés par la marque – ils ont eux-mêmes été victimes du gigantesque plan de communication nostalgique, mais pour voir le 3310. Ou plutôt, un petit téléphone en plastique qui reprend le nom de l’appareil emblématique du début des années 2000.
Tout ce que le 3310 n’est pas
Face à l’arrivée de smartphones «vraiment» intéressants, nous nous sommes dits que nous ferions tout simplement l’impasse sur un produit qui n’a pas grand chose à faire dans notre rubriques «Tests». Et puis une, puis deux, puis trois personnes de notre entourage nous ont demandé sa date de sortie, suggérant qu’ils pourraient passer à la caisse. L’objet de cet article est avant tout de leur rappeler ce qu’ils vont vraiment acheter, en nous appuyant sur quelques jours d’utilisation du produit.
Rappelons ce qu’est le Nokia 3310. Du moins, rappelons ce qu’il n’est pas, à commencer… par un Nokia 3310. En aucun cas, vous ne retrouverez ce bon vieil appareil qui vous accompagnait alors que vous alliez acheter un CD 2 titres des L5. Ce que propose la marque rachetée par HMD Global est tout simplement un feature phone – un téléphone «bête» – en plastique fin, sans connexion 3G (et encore moins 4G) et presque sans mémoire interne. Pour en profiter, il faudra donc acheter une carte microSD – non comprise. Sinon, vous ne pourrez faire qu’une chose : téléphoner.
Pour être de bonne foi, précisons que l’on peut aussi jouer à «Snake», le jeu qui nous a tant accompagnés dans le bus, le métro, le train ou l’avion. Mais là encore, n’espérez pas déguster une madeleine de Proust. La version installée sur l’appareil est certes modernisée – et pas désagréable, mais n’a tout simplement rien à voir avec le jeu que nous connaissons. Pour le retrouver plus fidèlement, vous n’aurez qu’à télécharger une application gratuite sur Android ou iOS.
Oubliez le Web
Comme beaucoup de téléphones vendus près des caisses de nos supermarchés, sa connexion se limite à la 2G. C’est très utile pour appeler, envoyer des SMS ou des MMS. Ca l’est beaucoup moins lorsqu’il s’agit d’aller sur Facebook ou n’importe quel site. Nous y sommes tout de même parvenus (nous avons même pu envoyer un message privé!), mais après de longues minutes de chargement sur chaque page.
De son côté, l’appli météo cherche toujours à importer les informations sur le temps qu’il va faire – enfin, qu’il a fait depuis que nous l’avons lancée. Ce que pourra faire ce téléphone sur le Web se résume donc en quelques mots : à peu près rien.
Nokia a également revu la façon de se servir du téléphone, en y intégrant une interface (propriétaire) à base d’icônes. A la différence des menus verticaux du 3310 des années 2000, elle nécessite de se déplacer verticalement et horizontalement. Le fabricant a donc inclus un pavé directionnel, qui posera problème à ceux qui n’ont pas des mains de pianiste : le cadre permettant de naviguer dans les menus est bien trop fin pour ne pas appuyer sur le bouton principal par erreur. Enfin, évoquons l’impression que nous avons eue lorsqu’il a fallu écrire un SMS à l’aide du clavier T9, à une époque où nous ne communiquons plus que par écrit. Elle est assez proche de celle que vous aurez en reprenant le tricycle Smoby de votre enfance pour faire 200 km.
Après avoir rappelé ces nombreuses limites, on aurait pu se réjouir du retour d’un téléphone incassable et ultra-personnalisable. Là encore, il n’en est rien. La coque arrière en plastique de l’appareil est toujours amovible, au même titre que la batterie. Mais le fabricant n’a pas pris le soin d’ajouter un bouton permettant d’effectuer l’opération sans se briser un ongle. Comme l’ont montré nos amis de chez SOSav, le clavier n’est plus aussi facilement interchangeable. Vous ne serez donc pas tentés d’en changer, à moins de démonter l’appareil.
70 euros ? 60 euros de trop
L’autre force du 3310 était bien sûr sa solidité. Très épais, l’appareil pouvait survivre à de nombreuses chutes (ou à un lavage en machine) sans une égratignure. Là encore, la nouvelle version n’est pas au même niveau. Bien que plutôt robuste, elle ne résistera pas aussi bien aux cas extrêmes, comme a pu le montrer SOSav.
Alors, à quoi peut bien servir ce téléphone ? En y regardant de plus près, il n’est pas totalement dénué d’intérêt. Il embarque par exemple un capteur photo de 2 Mpix qui proposera des clichés presque exploitables, à condition de rester parfaitement immobile durant trois secondes. Avec une carte SD, il peut faire office de baladeur – il a une prise jack, lui – doublé d’un téléphone pour des sorties sportives en extérieur. Quant à l’autonomie, elle est évidemment meilleure que celle de la plupart de nos smartphones.
Mais à 70 euros, le clin d’œil est bien cher payé… et très approximatif. Un ami hipster vous le ramène de chez Colette ? Ne lui jetez pas la pierre, il pensait sûrement bien faire. Peut-être vous amuserez-vous une soirée entière avec le gadget. Peut-être vous aura-t-il donné l’envie de revenir en arrière, pour faire une petite «détox numérique» – terme marketing utilisé par Nokia pour le lancement du nouveau 3310. Mais pour cela, une flopée de téléphones vendus une dizaine d’euros vous attendent depuis dix ans. La place de ce nouveau Nokia 3310 est à leurs côtés, en grande surface. Ou dans un bar PMU.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.