Il y a un an, nous passions en grande pompe le cap de l’an 2000. Pas de bug désastreux et une nouvelle économie en plein boum. Une idée originale suffisait à faire tomber les billets. Un an plus tard, le ton a changé. Les capitaux-risqueurs se risquent moins, et les fonds se font rares. Par-delà les idées, il faut désormais apporter de solides business plans, des personnes d’expérience et des perspectives de retour sur investissements à des échelles de temps acceptables. “Nous ne sommes pas des puits sans fond“, lance Jean-Emmanuel Rodocanachi, directeur des opérations de Gorillapark France. Une réaction qui étonne certains entrepreneurs : “Les investisseurs réclament des revenus, des références clients, des prévisions sérieuses de retour sur investissements. Les 2e
et 3e tours de table se font dans la douleur ou ne se font pas“, explique en effet un créateur de sites. “Les investisseurs attendent des résultats tangibles pour entrer dans le capital. Les investissements se font plus tard dans le processus de développement de la start-up “, souligne Jean-Emmanuel Rodocanachi. Résultat : certaines entreprises manquent de liquidités, ayant misé sur une seconde levée de fonds plus rapide, et les entrées en Bourse sont annulées. L’heure des premiers dépôts de bilan sonne. “Nous subissons, avec 6 mois de retard, ce que les États-Unis ont commencé à vivre “, explique Christophe Chausson, p-dg de Chausson Finance. Le profil des entreprises en faillite connaît aussi un décalage : la première vague des sociétés touchées aux États-unis était constituée de sites B to C, la seconde de B to B. La France semble emboîter le pas avec le dépôt de bilan de Redgift (vente de cadeaux), Alidoo (animaux domestiques), ou vivrefemme.fr, etc. À quand l’hécatombe du B to B et des places de marché en France ?
Les grands industriels annexent la Net-économie
Investisseurs, banquiers et autres professionnels de la Bourse en perdent leur latin. “On ne crée pas une société internet comme on construit une usine, souligne Christophe Chausson. Alors que dans l’économie traditionnelle, l’investisseur réclame des références clients, des business plans structurés, des prévisions de retour sur investissements ; dans l’autre, les premières levées de fonds se sont faites à partir de simples idées. ” Pierre Sissmann, pdg de Cybercapitale, confirme : “Pour créer une entreprise traditionnelle, l’entrepreneur doit démarcher des banques afin d’obtenir des prêts qu’il devra rembourser. Le financement des start-up est très différent : les investisseurs donnent de l’argent en contrepartie d’une participation dans le capital. Leur objectif étant de récupérer leur mise avec une plus-value, ils incitent l’entreprise à se faire racheter ou à entrer en Bourse, quitte à valoriser des pertes. Une telle économie ne peut fonctionner longtemps !“Les investisseurs analysent donc de près les projets et après avoir porté aux nues le B to C, puis le B to B, ils ne misent que sur les projets à forte valeur ajoutée technologique. Mais que sait-on de ce qui sera porteur demain ? Ce qui est sûr c’est qu’en quelques mois, le visage de la Net-économie a changé. Il ne s’agit plus de projets portés par quelques étudiants issus de grandes écoles. Les industriels ont repris les rênes de la Net-économie. Ils apportent des moyens financiers, technologiques et humains colossaux et phagocytent le marché. La réalité économique prend le dessus et l’on peut imaginer qu’à terme il ne restera que quelques grands acteurs dans chaque secteur d’activité. Quoi qu’il en soit, la Net-économie a fait rêver. Tout le monde pensait qu’enfin il était possible de faire fortune sur une idée originale !
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