” L’avenir de Napster est incertain “, explique Mark Mulligan, consultant chez Jupiter MMXI. Après la démission de son PDG, Konrad Hilbers (désavoué par le conseil d’administration) et le départ de son fondateur, Shawn Fanning, le pionnier des logiciels de peer-to-peer devrait bientôt se placer sous la protection de la loi américaine sur les faillites.Les dissensions entre actionnaires et les rejets successifs des offres de rachat déposées par le groupe allemand Bertelsmann ont peut-être scellé définitivement le sort de la société.
La start-up sous perfusion depuis un an
Depuis sa création en mai 1999, et plus particulièrement depuis la fermeture de son site à l’été 2001, sur injonction judiciaire, Napster était sous perfusion financière. Bertelsmann, qui s’était posé comme acquéreur potentiel, investissait 50 000 dollars par jour dans la start-up, 85 millions de dollars au total.Selon Klaus Eierhoff (PDG de Direct Group Bertelsmann), Napster avait tous les atouts pour devenir ” un nouvel AOL “. Pour se relancer, Napster devait ouvrir un nouveau service de musique en ligne sur abonnement, au mois de mars 2002. Un projet aujourd’hui reporté sine die.De son côté, Bertelsmann, après avoir perdu plusieurs centaines de millions d’euros dans ses activités Internet, s’est finalement lassé de l’indécision des actionnaires de Napster et a brusquement décidé lundi dernier d’arrêter les frais.
Dissension des actionnaires face à la menace des majors
En interne, la guerre faisait rage entre les partisans d’une reprise par le groupe allemand (qui avait placé un homme de confiance à la tête de la start-up en la personne de Konrad Hilbers, un ancien responsable de BMG entertainment) et certains membres du conseil d’administration, défendant les intérêts de la société de capital-risque Hummer Winblad.Après avoir investi 13 millions de dollars dans Napster, Hummer Winblad attendait toujours un hypothétique retour sur investissement, et posait ses conditions à l’arrivée de Bertelsmann. Ses représentants au conseil d’administration, Hank Barry et John Hummer, demandaient au groupe allemand de couvrir les frais des différentes procédures judiciaires qui pourraient être intentées à leur encontre par les majors du disque.Bertelsmann ?” qui dans une première offre de reprise de 16,5 millions de dollars avait consenti à effacer la dette de Napster ?” a toujours refusé de se plier à ces exigences. Pour pallier cette situation de blocage, l’oncle de Shawn Fanning ?” membre du conseil d’administration de la start-up ?” avait récemment demandé à la justice américaine, mais en vain, l’éviction de Barry et de Hummer dudit conseil d’administration.
Bertelsmann reste en embuscade
Aujourd’hui, selon Mark Mulligan, le grand vainqueur de cette partie de poker menteur pourrait être Bertelsmann. Car le groupe allemand reste de très loin le principal créditeur de Napster. Si la start-up était déclarée en faillite, Bertelsmann pourrait en récupérer les actifs (base de données d’utilisateurs, marque commerciale…) et réorganiser à son gré l’ex-icône du peer-to-peer. Pour rester à flot, Napster avait déjà dû resserrer ses équipes et se séparer, depuis le début de l’année, de 40 % de ses collaborateurs.Par ailleurs, Bertelsmann ne serait pas comptable des multiples procédures judiciaires intentées contre Napster par la RIAA (Recording Industry Association of America) et l’industrie du disque. Enfin, Bertelsmann, qui détient par l’intermédiaire de sa filiale BMG des parts dans le service sur abonnement MusicNet, pourrait également utiliser le savoir-faire de Napster au profit de l’ensemble de ses autres activités de musique en ligne, aujourd’hui réunies sous le vocable BeMusic. A son apogée, au printemps 2001, le logiciel Napster avait été téléchargé par 80 millions d’internautes.
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