Si on aime la verdure et les images un brin simplificatrices, on pourrait dire que les puces actuelles sont conçues comme nos villages ou nos lotissements. Chaque unité ou bâtiment s’étale horizontalement, prenant ses aises.
Corollaire immédiat, il faut évidemment des infrastructures, des routes, pour que les habitants ou les données aillent d’un point à un autre. De la maison au bureau, de la mémoire au processeur, par exemple. Aussi bien pour les humains que pour les données, les temps de trajets peuvent alors être longs, embouteillés, ce qui implique une perte de temps et d’énergie.
Des gratte-ciels pour gagner du temps
Voilà pourquoi des chercheurs de trois universités américaines se sont associés à des ingénieurs de l’université de Stanford pour créer une nouvelle architecture révolutionnaire à plusieurs étages, en forme de gratte-ciel. Cette nouvelle approche est baptisée Nano Engineered Computing Systems Technology, ou N3XT, pour faire simple. Elle est conçue sur l’idée que les différentes unités nécessaires au fonctionnement d’un ordinateur sont regroupées par étage, les étages étant superposés, comme dans un immeuble.
« N3XT mettra fin au goulet d’étranglement des données en intégrant les processeurs et la mémoire comme des étages d’un gratte-ciel et en connectant ces composants avec des millions de ‘vias’, qui jouent le rôle de petits ascenseurs électroniques », explique le communiqué de Stanford.
On serait alors tenté d’objecter que les puces 3D en silicium existent. Mais les chercheurs américains ont déjà leur réponse. Celles-ci sont extrêmement complexes à concevoir. Les différents niveaux sont d’ailleurs préparés séparément puis empilés, superposés plutôt qu’assemblés directement. La fabrication de ces puces exige par ailleurs des températures très élevées pour éviter qu’un étage n’abîme l’autre, explique les chercheurs du projet N3XT. A l’inverse, leur solution imbrique les différents composants, fabriqués grâce à des transistors en nanotubes de carbone, directement sous forme de couches superposées. « Elle immerge l’unité de calcul et la mémoire dans un super-appareil électronique », expliquent les ingénieurs de Stanford. Et les nanomatériaux suppriment, en plus, le besoin de recourir à de hautes températures.
Un grand changement pour un grand saut
Si l’adoption de cette nouvelle approche va demander « d’énormes investissements » de l’industrie des composants, la promesse est plus que séduisante. L’approche N3XT déplacera les données bien plus rapidement et en utilisant bien moins d’énergie que dans les circuits classiques.
« Quand vous combinez une plus grande vitesse et une plus faible consommation d’énergie, les systèmes N3XT surpassent les approches conventionnelles par un facteur mille », explique le professeur Wong de Stanford.
Pour atteindre de telles performances, les universitaires ont donc adopté des nanomatériaux qui permettront d’aller là où le silicium ne peut pas s’aventurer, de gagner de la hauteur. La multiplication des différentes couches offrira aussi la possibilité de faire grimper la puissance disponible de manière exponentielle : « Avec N3XT, le tout est en effet plus grand que la somme de ses parties », commentait Kunle Olutokun, co-auteur du document scientifique qui présente cette nouvelle architecture et professeur à Stanford, qui a aidé à optimiser l’interaction entre logiciel et matériel.
Evidemment, comme avec les puces en silicium, la question de l’échauffement est à prendre en compte. Ainsi, pour éviter une dégradation des performances à cause de la surchauffe, des étages de ventilation sont également prévus.
Des puces futuristes pour le futur
Les puces N3XT sont conçues pour fournir la puissance de feu nécessaire au besoin de l’informatique de demain, explique Suhhasish Mitra, professeur associé à Stanford. Un monde où d’énormes quantités de données ont besoin d’être traitées rapidement et de manière fiable pour résoudre des problèmes de santé publique, par exemple. Les chercheurs de l’université de Stanford avaient déjà, en 2014, fabriqué une puce pour prouver le bien fondé de leur approche. Leurs derniers travaux confirment que la voie offre un potentiel énorme. Demain, nos données seront donc des rats des villes. Elles se déplaceront peut-être dans des puces en forme de gratte-ciel, emprunteront des ascenseurs pour aller plus vite et être plus vite traitées. Contrairement aux humains, aucune ne regrettera le pâle azur d’un matin blême sur la plaine givrée, ni les barbecues amicaux des week-ends ensoleillés…
Source :
Université de Stanford
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