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M’sieur, M’sieur, y copie !

Droits d’auteur et Internet font mauvais ménage. D’un côté, des individus et des entreprises rêvent de montagnes de dollars. De l’autre, des technologies de copie numérique frôlent la perfection. Et la coexistence pacifique, personne n’en veut ?

Ça commence toujours de la même façon. Un individu lambda a une idée, il trime, il donne naissance à une oeuvre. Ça pourrait s’arrêter là, mais non. Notre futur ex-anonyme attend rétribution de son ?”uvre. Quoi de plus humain ; il a, comme nous tous, besoin d’argent pour vivre. Alors, il diffuse sa création. Il n’a que l’embarras du choix pour ce faire. Mais, quelle que soit la voie de diffusion choisie, il s’embarque dans une sacrée aventure : celle de la défense de ses droits d’auteur.Tous les modèles de protection des droits d’auteur en vigueur datent sérieusement. Ils existaient avant même que l’on parle d’informatique ou de réseaux : les plus anciens ont déjà quelques siècles ! Et ils divergent très largement d’un pays à l’autre. Certes, l’Europe tente par ses directives d’harmoniser les textes. Mais ça ne résout pas la question au niveau planétaire, loin de là.Les sociétés d’auteurs, qui gèrent les droits pour ceux qui y cotisent, rêvent d’une solution technique globale. Le doute reste entier sur leur capacité à mener à bien un tel projet… Sans parler qu’il ne prendra pas corps avant dix-huit mois au moins. Les grandes entreprises multimédias, comme Vivendi Universal, AOL-Time Warner ou Bertelsmann, n’attendent rien de ces sociétés. Elles utilisent l’arsenal habituel de la menace et du procès pour continuer à engranger leur dû. Les initiateurs de Napster en savent quelque chose. Elles élaborent aussi des systèmes de protection complexes pour interdire la copie numérique.Là réside l’un des n?”uds du problème. Avant l’apparition de l’infosphère, il n’existait pas de moyen universel pour reproduire une oeuvre à l’identique. Désormais, du moment qu’elle est stockée sous la forme d’un fichier binaire, elle est copiable à l’infini. Alors, c’est la mort des droits d’auteur ? Ou s’agit-il de la copie à titre privée, autorisée par la loi française ? Si l’on suit l’avis de M. Brun-Buisson, “si la création n’est pas rémunérée, elle dépérira”. D’où des mesures alambiquées pour récolter quelques francs ?” quand on achète un CD-R, une cassette vidéo, etc. ?” et les redistribuer aux auteurs.Comme si la création n’existait que dans le cadre marchand. Les licences GPL, pour le logiciel, ou Open Art, pour les ?”uvres d’art numériques, montrent que la création peut être désintéressée. Comme s’il était impossible d’imaginer d’autres façons de payer les auteurs. La vente de logiciels sous forme de shareware instaure un rapport direct entre le créateur et le consommateur.Il serait temps que législateurs, auteurs, ayants droit et diffuseurs considèrent la question des droits d’auteur d’un peu plus haut. L’infosphère est un milieu très plastique, suffisamment pour qu’on le modèle de manière à satisfaire tout auteur. Et pas seulement les sociétés marchandes et les plus adulés des créateurs.

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Michaël Thévenet