Avec Donald Trump qui revient au pouvoir, c’est avec le doigt sur la couture du pantalon que les grandes entreprises tech américaines se sont sagement et rapidement alignées sur les préceptes du futur président américain prônant une liberté d’expression « totale », même si cela libère les paroles les plus extrémistes à droite. Meta, qui se sait visé par le futur locataire de la Maison Blanche, a voulu montrer patte blanche en renversant complètement sa politique de modération.
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Adieu les vérificateurs de faits (qui étaient, il faut bien l’avouer, assez discrets), bonjour les « Community Notes » comme sur X/Twitter. Autrement dit, ce sont les utilisateurs de Facebook et d’Instagram qui devront apporter des corrections aux contenus susceptibles de contenir des informations fausses ou trompeuses.
Si cette nouvelle politique ne s’applique qu’aux États-Unis, Mark Zuckerberg a été très clair : il entend bien « travailler avec le président Trump pour s’opposer aux gouvernements étrangers qui s’attaquent aux entreprises américaines pour censurer davantage ». En substance, le CEO et fondateur de Meta, qui a fait une allégeance totale au futur pouvoir en place, voudrait que tous les pays du monde s’alignent sur le principe de liberté d’expression en vigueur aux États-Unis.
Voilà qui promet un sérieux carambolage avec les règles en vigueur en Europe, tout particulièrement le règlement sur les services numériques (DSA), qui corsète la modération des grandes plateformes en ligne. Twitter et Elon Musk pourraient d’ailleurs en faire les frais assez rapidement.
L’« inquiétude » de Paris
La France exprime de son côté son « inquiétude » face à cette décision. Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères déplore la décision de Meta « de remettre en cause l’utilité de la vérification de l’information (fact-checking) pour limiter la circulation de fausses informations ». Paris entend maintenir sa vigilance quant au respect des obligations de l’entreprise dans le cadre du DSA, qui fait « partie intégrante du bon fonctionnement démocratique de l’UE, et pour protéger nos concitoyens des ingérences étrangères et manipulations de l’information. »
Le Quai d’Orsay rappelle aussi que si la liberté d’expression est protégée en France comme en Europe, elle ne saurait être « confondue avec un droit à la viralité qui autoriserait la diffusion de contenus inauthentiques touchant des millions d’utilisateurs sans filtre ni modération ».
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La Commission européenne a de son côté rejeté les affirmations de Mark Zuckerberg selon lesquelles « l’Europe [adoptait] un nombre croissant de lois institutionnalisant la censure et rendant difficile toute innovation ». « Nous réfutons absolument toute allégation de censure », affirme un porte-parole à Reuters. Le régulateur rappelle que le DSA n’oblige pas les plateformes à supprimer des contenus licites. Mais le texte demande aux géants du numérique de retirer les contenus qui pourraient être nuisibles, notamment pour les enfants et les démocraties européennes.
Meta pourrait cependant abandonner sa politique de vérification des faits en Europe pour la remplacer par ce nouveau système de vérification par les utilisateurs de la plateforme. Le groupe américain devra au préalable réaliser une évaluation des risques et la soumettre à la Commission. L’UE ne prescrit pas la forme que la modération des contenus doit prendre : par conséquent, un format de type « Community Notes » aurait toute sa place.
« Quel que soit le modèle choisi par une plateforme, il doit être efficace, et c’est ce que nous examinons… Nous vérifions donc l’efficacité des mesures ou des politiques de modération des contenus adoptées et mises en œuvre par les plateformes ici dans l’UE », précise le porte-parole.
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