Première parution le 10 mars 2003. Le tribunal de commerce de Marseille devrait examiner, demain 11 mars, l’assignation en référé déposée par le CE de Gemplus. Si la demande d’assignation est acceptée par le tribunal, il désignera ensuite un expert chargé de faire
la lumière sur les faits dénoncés par le CE.Ce dernier, qui n’a pas confirmé nos informations, dans l’attente de diffuser un communiqué de presse, a présenté au tribunal un dossier articulé autour de la menace de fragilisation qui pèse sur Gemplus France.Le CE dénonce une opération de renflouage des caisses déficitaires de Gemplus Corp. aux dépens de Gemplus France, dont elle est une filiale.
Gemplus Corp. veut gonfler les dettes de sa filiale française
Dans cette opération, le holding de contrôle du groupe Gemplus, Gemplus International SA (Gisa), basé à Luxembourg, prêterait 82,5 millions de dollars à Gemplus France, en compte courant, pour que cette dernière participe à une
augmentation de capital de Gemplus Inc., dont dépend Gemplus Corp.A l’issue de l’opération, Gemplus Corp. rembourserait le prêt non pas à Gemplus France, mais à Gisa. Ce montage, quelque peu complexe, aurait pour conséquence d’endetter Gemplus France vis-à-vis de sa maison mère, Gisa.La requête du CE vise également le patrimoine de brevets de Gemplus France. Le CE estime ne pas avoir été informé de l’état de ce patrimoine, et craint qu’il ait été tout bonnement soustrait à Gemplus France, l’appauvrissant encore.Enfin, le CE souhaite obtenir des éclaircissements sur la conformité de subventions, de prêts personnels aux dirigeants et sur les remboursement de frais. Derrière cette procédure se cache l’inquiétude du CE de voir Gemplus France subir
le même sort que Metaleurop. Il soupçonne ainsi Gemplus International de ‘ charger la barque ‘ de Gemplus France pour justifier à terme sa fermeture, ou sa restructuration drastique.
Un troisième plan social en préparation ?
Déjà, les rumeurs évoquent un troisième plan social, qui toucherait 320 personnes en France, pour la fin de l’année ou en début d’année prochaine. Ces suspicions semblent rejoindre celles des enquêteurs de la Commission des
opérations de Bourse (COB).La COB s’est saisie du dossier à la suite d’informations que lui ont fait parvenir d’anciens actionnaires et dirigeants. Deux sénateurs, Jean-Claude Gaudin et Marie-Claude Beaudeau, inquiets des répercussions sur l’emploi dans
leurs circonscriptions, auraient aussi appelé la COB à faire la lumière sur d’éventuelles irrégularités.Selon nos informations, la COB enquêterait actuellement sur la publication par Gemplus de faux bilans au cours des années fiscales 2001 et 2002.L’ancien directeur général, Ron Mackintosh, avait notamment annoncé que Gemplus redeviendrait bénéficiaire au quatrième trimestre 2002. Finalement, la société affichera une perte de 96,6 millions d’euros…La COB enquêterait également sur la diffusion de fausses informations financières au moment de l’introduction en bourse de Gemplus, le 6 décembre 2000. Elle suspecterait la société d’avoir occulté les rémunérations de plusieurs
dirigeants par l’intermédiaire des filiales luxembourgeoises et de Dubaï.
Gemplus suspecté d’abus de bien social
Surtout, la COB soupçonne un abus de bien social, qui aurait eu lieu dans le cadre du contrat passé fin 2001 entre Gemplus et Differentis, une société d’audit informatique, présidée par Ron Mackintosh. Pour ajouter à la collusion
d’intérêts au profit de celui qui deviendra quelques mois plus tard directeur général de Gemplus, 46 % du capital de Differentis était à cette époque aux mains du
fonds d’investissements américain TPG. Lequel se trouve aussi être le principal actionnaire de Gemplus.Plusieurs membres du conseil d’administration de l’époque affirment aujourd’hui ne pas avoir été mis au courant par TPG de sa participation dans Differentis, affirmant qu’ils auraient voté contre. Pire, certains dénoncent la rédaction
de faux document falsifiant les comptes rendus du conseil d’administration pendant lequel a été évoqué ce contrat.Au-delà de ces deux procédures, les salariés comme les actionnaires minoritaires restent vigilants quant aux modalités de rémunération du nouveau DG, Alex Mandl. Ces dernières doivent encore être votées par le conseil d’administration.
Si elles étaient adoptées en l’état, leur contenu controversé pourrait devenir un nouvelle bombe judiciaire à retardement pour lentreprise.
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