Passer au contenu

Microsoft déverse son soft dans les “smartphones”

La firme de Bill Gates attaque un nouveau marché : celui des mobiles intelligents, pré-carré du consortium Symbian et du système Palm, qui vont devoir trouver une réplique.

Depuis l’arrêt brutal de la progression du marché des PC, les acteurs du secteur cherchent un relais de croissance. Tous leurs sens sont en éveil à la recherche d’un domaine en progression.À la conférence du Gartner Group, il y a quelques semaines à Monaco, Nicholas Negroponte, cofondateur du Media Lab du MIT (Massachussets Institute of Technology) confirmait la voie que tous commençaient à entrevoir : “Le futur passe par la communication sans fil, par la possibilité de demander et de recevoir de l’information en toute circonstance, en tout lieu.”Une vision confirmée par Will Strauss, analyste pour le cabinet Forward Concepts, spécialisé dans les marchés de l’électronique, qui voit les expéditions de puce sans fil exploser à vue d’?”il. “Elles vont doubler entre 2002 et 2003 pour atteindre 19,3 millions d’unités”, annonce-t-il.

Orange dans la danse

Toute la communauté s’engouffre dans la brèche, chacun dans son domaine. Notamment Intel, qui a pris le train en marche pour concevoir des puces adaptées à cet usage. Et, en fanfare, arrive maintenant le symbole de l’univers du PC, Microsoft.Il y a quelques jours, Orange officialisait la mise sur le marché de son téléphone SPV. Construit par le Taiwanais HTC, l’engin abrite le système d’exploitation (OS) de Microsoft, Smartphone 2002. La filiale de France Telecom est le premier opérateur à proposer cet OS, connu, depuis qu’il est sorti des cartons, sous le nom de Stinger. SPV ressemble à un téléphone traditionnel, mais à y regarder de plus près, on ressent une sérieuse impression de déjà vu.L’interface Microsoft qu’il abrite permet d’accéder à du chat, à son agenda, son carnet d’adresses, à ses e-mails… voire de servir de dictaphone ou de lecteur MP3. Un look familier des utilisateurs d’assistants personnels sous Pocket PC. “Mais l’engin est un téléphone, pas un PDA communiquant”, précise Laurent Dugimont, chef de produit mobilité Microsoft France.Très vite, des applications pourront être téléchargées, telle le téléphone personnalisé. Avec cet OS, Microsoft abat d’un coup les frontières entre le téléphone mobile et le smartphone, sous sa forme d’assistant numérique personnel communiquant. Mais il affronte directement l’hégémonie du consortium Symbian du côté du téléphone (57 % du marché ce trimestre, grâce notamment au 7650 de Nokia, selon le cabinet d’analyse Canalys) et le système d’exploitation de Palm côté PDA (20 % de parts de marché).Un marché que Microsoft avait déjà commencé à entamer gravement depuis l’arrivée du Pocket PC, ralliant des sociétés telles HP, Toshiba, puis, récemment Fujitsu Siemens et bientôt Dell (en décrochant 20 % des parts de marché au passage).Jusqu’à présent, ces deux univers étaient aux antipodes. D’un côté, le monde très envié de la téléphonie mobile, qui, après une période un peu dure, devrait de nouveau atteindre quelque 400 millions d’unités vendues dans le monde cette année. De l’autre, celui des assistants personnels communicants, assez confidentiel pour l’instant, mais avec une marge de croissance phénoménale.Ce sont 1,2 million d’unités qui ont été expédiées dans la zone Europe, Moyen-Orient et Afrique (EMEA) ce trimestre, le double du trimestre équivalent de l’année précédente. “65 % des Français sont équipés de portables alors que seulement 2 % possèdent un smartphone”, commente Laurent Dugimont. Ces engins restent intimidants pour la grande majorité de la population, d’où l’intérêt d’inclure ces fonctions sur un téléphone.

Redistribution des cartes

“De plus en plus, les facteurs formes vont se rejoindre”, confirme Lawrence Surtee, analyste chez IDC. L’arrivée de Microsoft, en obligeant tout le monde à s’affronter sur le même terrain, redistribue formidablement les cartes. Chaque acteur devra mettre en avant ses plus beaux atours. Nokia, maître de 35 % du marché de la téléphonie mobile vient de dévoiler son jeu avec son 7650.Le Suédois utilise l’interface Symbian pour mettre en avant l’interactivité de ses téléphones multimédia avec appareil photo intégré et la possibilité de faire du MMS (Multimedia Messaging Service). S’il est avantagé par ses relations ténues avec les opérateurs, Nokia, avec ces applications, vise un marché de masse, “alors que l’affrontement va se situer sur le marché professionnel”, selon Lawrence Surtee. “Nokia devra s’habituer à une réelle concurrence et “booster” sa créativité sur les applications demandées par les professionnels”.Une donne stratégique intégrée par Handspring, qui vient de mettre sur le marché la dernière version de son Treo. Licencié Palm OS, le petit outsider compte bien “damer le pion des grands en apportant précisément aux clients ce qu’ils attendent”, selon le responsable des produits pour la zone EMEA, Eric Tholomé. Si Handspring entre sur le champ de bataille par le bas ?”“Nos clients sont des professionnels, mais la décision d’achat est personnelle”?”, Microsoft compte bien y entrer par le haut, misant sur l’habitude qu’ont les directeurs informatique de ses systèmes.“Microsoft doit être pris très au sérieux quand il arrive sur un marché, confirme Chris Jones, directeur de Canalys, et sa connaissance du marché “corporate” va peser lourd dans la balance.” Pour mieux s’implanter sur ce nouveau marché pour lui, Microsoft a déjà signé des partenariats avec les Américains Verizon, le plus grand opérateur local avec 30 millions d’abonnés, et AT & T pour développer des applications.Mais officiellement, Microsoft n’inquiète pas Symbian. “80 % des téléphones sur le marché fonctionnent avec notre OS”, revendique le porte-parole du consortium, Peter Bancroft. Dans les deux ans, huit sociétés vont mettre sur le marché seize nouveaux produits sous ce système. “Et il est curieux de voir que Siemens et Samsung, licenciés Stinger 2002 de longue date, viennent juste de signer des accords avec nous”, persifle-t-il.Pour l’instant, aucun des grands noms du téléphone n’a rallié sa bannière. “Microsoft ne va pas gagner toutes les batailles, s’insurge le directeur marketing Europe de Palm Source, Jean Marc Holder, précisément à un moment où de plus en plus d’entreprises essayent d’échapper à son hégémonie.”

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Agathe Remoué