« La règlementation Biden va au-delà de ce qui est nécessaire ». En janvier dernier, Joe Biden signait un dernier décret s’appliquant aux semi-conducteurs, avant de quitter la Maison-Blanche. Le texte, le quatrième depuis octobre 2022, était destiné à porter un dernier coup à l’industrie chinoise, en limitant la vente de puces électroniques destinées à l’intelligence artificielle (IA) à la Chine et à d’autres pays « adverses ». Son objectif était de garantir que Pékin n’accède pas à la technologie américaine par l’intermédiaire de pays tiers.
La particularité de la règlementation de janvier 2025 est qu’elle s’applique pour la première fois à de nombreux pays du monde, dont des pays européens comme la Pologne ou la Grèce, jusque-là non soumis à de telles restrictions. Un problème pour Microsoft qui demande à Donald Trump de revenir cette « réglementation de dernière minute », et de l’assouplir, dans un article de blog publié ce jeudi 27 février. « Si (cette législation) n’est pas modifiée, elle risque de compromettre la capacité des États-Unis à réussir » dans la course à l’IA, plaide Brad Smith, à la tête du groupe américain.
« Cessez de reléguer les amis et les alliés des États-Unis à un deuxième niveau qui sape leur confiance (…) »
Pour Microsoft, la règlementation Biden pourrait en effet restreindre les ventes de puces d’intelligence artificielle de pointe « américaines », comme celles de Nvidia, ou d’autres contenant des technologies américaines, dans une grande partie du monde. Le géant des logiciels souhaite qu’elle ne s’applique pas à des pays alliés des États-Unis, dont l’Inde, la Suisse, Singapour, mais aussi le Portugal, la Pologne et la Grèce, des États dans lesquels « nous et de nombreuses autres entreprises américaines avons d’importants centres de données ».
Le dirigeant explique notamment s’être rendu à Varsovie en Pologne la semaine dernière pour annoncer « avec le Premier ministre Donald Tusk, une expansion de 700 millions de dollars de l’infrastructure du centre de données de Microsoft en Pologne ». Or, la Pologne a été cataloguée dans le niveau 2 dans le décret Biden, un niveau qui ne lui permet pas « de manière certaine d’acheter davantage de puces d’IA américaines dans le futur ». Tous les pays qui font partie de la 2ᵉ catégorie de ce système à trois niveaux sont soumis à des contrôles aux exportations. La règle ne manque pas d’« ironie » car au même moment, « l’administration Trump presse l’Europe d’acheter davantage de produits américains », écrit Brad Smith. « Cessez de reléguer les amis et les alliés des États-Unis à un deuxième niveau qui sape leur confiance dans l’accès continu aux produits américains », écrit-il.
Le PDG prend soin de préciser que la moitié de ses investissements réalisés en 2025 seront faits sur le sol américain, et que « la grande majorité de notre puissance de calcul restera donc aux États-Unis » – un moyen de monter patte blanche face à Donald Trump qui a exigé des entreprises américaines qu’elles rapatrient une partie de leur production dans le pays.
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La Chine, grande bénéficiaire de la règlementation Biden ?
Or, si ces pays ne peuvent plus s’approvisionner en puces américaines, ils se tourneront vers la Chine qui pourrait leur fournir ce dont ils ont besoin, estime Microsoft. « Si elle n’est pas modifiée, la règle de Biden donnera à la Chine un avantage stratégique en diffusant au fil du temps sa propre technologie d’IA, faisant écho à son ascension rapide dans les télécommunications 5G il y a dix ans », écrit le président de Microsoft. Dit autrement, ces restrictions pourraient permettre à la Chine de prendre de l’avance dans la course à l’IA.
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Interrogé par le Wall Street Journal, Brad Smith est allé plus loin, en affirmant que la Chine se vantait déjà d’être un meilleur partenaire à long terme que les États-Unis en matière d’IA, du fait de cette règlementation. L’administration de Donald Trump serait en train d’étudier le texte, avant de prendre une décision. Nvidia, le leader américain du secteur directement concerné par ces restrictions de vente, a été bien plus critique, décrivant cette règlementation comme portant « atteinte aux intérêts américains », et appelant, dans un article de blog, à l’annuler.
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