Au commencement fut le verbe. Quelques étapes plus tard fut créé l’avatar-tronc. Et Mark Zuckerberg vit que cela était bon… mais pas suffisant. Et comme la route pour atteindre un métavers immersif était encore longue, Meta décida qu’il serait bon de donner à tous une paire de jambes pour gambader sur ce chemin.
Des jambes… à prendre à son cou ?
Si vous vous rendez de temps à autre dans l’Horizon virtuel de Meta, vous avez sans doute constaté que vous y tenez plus du pion Cluedo des années 70 que de l’alter ego numérique réaliste. Vous y êtes un buste en culbuto… sans membres inférieurs. Vous lévitez au-dessus du sol, vous agitez mollement. C’est assez surprenant.
Mark Zuckerberg a expliqué pendant son Meta Connect 2022 que ce choix s’est imposé parce qu’il était extrêmement difficile de reproduire précisément et fidèlement les jambes – et même les bras d’ailleurs – ce qui explique que souvent, vous n’avez que des mains qui flottent devant vous, sans coude, ni rien d’autre. Il est tout simplement très compliqué pour un casque de réalité virtuelle de réussir à placer les articulations au bon endroit – même pour une personne qui a le bras long, comme Mark Zuckerberg.
Or, une mauvaise implémentation nuirait profondément à l’immersion. L’esprit est capable de tolérer des entorses à la réalité quand l’environnement et les corps ne sont pas totalement réalistes, mais attention à la vallée de l’étrange quand le réalisme est l’objectif.
L’occlusion, un avenir bouché ?
Pour résoudre ce problème des membres supérieurs, et désormais inférieurs, Meta a fait appel à des algorithmes de suivi et des technologies de prédiction, entraînés grâce au machine learning. Pourquoi les jambes arrivent-elles plus tard, vous demandez-vous, alors que nourrisson, vous avez découvert votre pied à peu près au même moment que votre main ? Parce que dans la réalité virtuelle, il faut tenir compte de l’occlusion. L’occlusion, c’est quand un objet se place entre votre regard et un autre élément, par exemple quand vous vous asseyez à une table opaque. Vos jambes sont là, mais vous ne les voyez pas. Et ça, dans la réalité virtuelle ou même augmentée/mixte, c’est un sacré défi. Car le casque autonome (sans capteurs extérieurs pour apporter davantage de données) et ses caméras sont incapables de voir ce qu’elles font et il leur faut alors imaginer, deviner avec pertinence. Pas facile.
Voilà pourquoi Meta a développé des modèles d’intelligence artificielle dont le but est de déterminer et de prédire avec précision et en permanence la position de tout votre corps. Une mission qui va évidemment se complexifier au fur et à mesure que la plate-forme virtuelle va s’enrichir d’objets divers, de végétations, d’animaux ou d’autres avatars virtuels.
Meta a donc a priori trouvé le truc et va, dans le courant de l’année prochaine, vous donner des jambes grâce à une nouvelle génération d’avatars. Elles apparaîtront d’abord dans sur sa plate-forme sociale Horizons, mais seront, comme les avatars qu’elles soutiennent, utilisables dans toutes les applications du groupe et en réalité virtuelle, bien entendu.
Évidemment, Mark Zuckerberg s’est fendu d’une petite démonstration pendant sa présentation. L’effet était assez saisissant et vraisemblable. Il s’est même amusé à sauter en pliant les jambes et, bonne nouvelle, ses genoux se sont pliés dans le bon sens, et ses pieds ont suivi. Néanmoins, cette vidéo était préenregistrée, et le rendu a très bien pu être pré-calculé par ailleurs. Il est donc très difficile de savoir si ce qu’on a vu, et qui était assez bluffant, est l’état de l’art actuel qu’il faudra peaufiner avant de le mettre entre les mains des utilisateurs, ou si c’est une déclaration de principe, un point vers lequel tendre.
Vers l’infini, et au-delà
Et le futur de proche à lointain, Mark Zuckerberg l’a également montré rapidement. Il y aura d’abord ces avatars un peu plus expressifs, grâce au nouveau codec d’avatars. Ils seront capables de reproduire une moue, ou un geste, et seront disponibles sur les différentes plates-formes du groupe, qu’il s’agisse d’applications ou de portails Web. Vous pourrez ainsi réaliser des Reels avec votre avatar, ou chatter en vidéo en vous faisant remplacer par votre avatar. Et sur ce point, la vision de Mark Zuckerberg paraît pertinente, il voit l’utilisation d’un avatar capable de reproduire certaines de vos expressions comme un intermédiaire entre les chats avec la vidéo allumée et coupée, une troisième voie. Vous êtes présents, sans que ce soit réellement vous. Cette fonction, elle aussi, devrait être disponible l’année prochaine.
Le patron de Meta, et avec lui le chœur de ses salariés qui ont pris la parole, l’ont répété : leur métavers est ouvert à tous. Oui, même à toi, Apple, si tu ne fermes pas tout, et ne gardes pas tes jouets rien que pour toi. Logiquement, les annonces de partenariats technologiques ont été assez nombreuses.
Bien entendu, les avatars bénéficient de ces rapprochements. Ils pourront ainsi s’inviter dans les réunions Zoom et également dans les sessions de travail sur Teams, grâce à un accord avec Microsoft, qui a fait l’objet de quelques annonces. Mais Mark Zuckerberg a aussi déclaré que le Meta Avatars SDK arrivera bientôt sous Android et iOS dans Unity, afin que les développeurs mobiles puissent en tirer parti. Et pour les développeurs accros à la réalité virtuelle la plus immersive, le SDK va par ailleurs être compatible avec l’Unreal Engine.
Enfin, quoi de mieux pour commencer à attirer les développeurs – et générer plus de revenus – qu’un store ? C’est pourquoi Meta lancera un peu plus tard cette année un avatar store en réalité virtuelle, où pourront être vendus des vêtements pour votre « vous numérique », ou alors des apparences spécifiques, notamment en partenariat avec Netflix… Bref, vous l’aurez compris, Meta ne sera pas seul, il ne veut pas être seul, dans le métavers. Peut-être parce que pour l’instant, il a l’air de s’y ennuyer un peu.
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