Vous revenez juste des États-Unis. Quel scénario de reprise anticipez-vous ? Cette crise a engendré une prise de conscience qui peut conduire à une meilleure gestion politique de ces problèmes. On peut aller vers plus d’Europe et de gouvernance. Je crois, et c’est pourquoi j’ai confiance en un scénario de reprise en V, que la vie est plus forte que la peur. Dans la dernière semaine de septembre et les premiers jours d’octobre, outre-Atlantique, les ventes sont au même niveau que l’an dernier. Quelques éléments intéressants : les ventes de McDonald’s ont légèrement progressé en septembre et se portent plutôt bien début octobre. Idem pour Wall Mart. La téléphonie mobile et l’automobile marchent encore bien. Pourtant, il y a quelques points noirs dans les secteurs du voyage, du tourisme et les sorties. Chez les clients que j’ai rencontrés, la situation est plus contrastée. Dans le transport aérien et le tourisme, on ne peut rien leur demander. Dans la grande consommation, ils sont plutôt enclins à développer des opérations de relance et à mettre de la pression publicitaire supplémentaire.Votre constat paraît plus optimiste que les prévisions de croissance du marché publicitaire…En matière de prévision, on semble avoir perdu la capacité à voir avec un peu d’avance. Au mois de novembre de l’an dernier, Zenith prévoyait des hausses importantes partout. Ensuite, les prévisions ont été modifiées mois après mois jusqu’à atteindre -2,6 % en août au niveau mondial. Le secteur a été entraîné par la chute des dot-com et du secteur des télécommunications. Concernant Publicis, nous ne nous sommes pas laissés aller autant que d’autres à la mode des dot-com et des marketing services. Ce qui, à l’époque, nous était reproché. Aujourd’hui, cela nous sert de pilier de sécurité par rapport au marché. C’est la seule raison pour laquelle Publicis souffre un peu moins que ses confrères. Sur l’année 2001, nous devrions connaître une croissance organique de 3,5 à 5 %. Il y a encore des annonceurs pour hésiter à investir en temps de crise…Il y a une réactivité plus grande de la part des annonceurs. Certains sacrifient la part de marché au profit de la dernière ligne du bilan. Je pense qu’ils ont tort. Parce qu’on ne rattrape jamais des parts de marché perdues et qu’il faut surinvestir pour espérer rattraper son retard. Estimez-vous, comme certains grands patrons français, que la Bourse prend une part trop importante dans la stratégie des entreprises ? De quoi se préoccupe-t-on ? De critères excessifs qui sont donnés aux entreprises pour gérer leurs ressources et livrer leurs résultats. Il est vrai que la Bourse sanctionne et parfois brutalement. Mais c’est marginal. La plupart des grands investisseurs mondiaux sont responsables. Il importe que les entreprises mènent leur politique à partir de trois critères essentiels. Si l’on ne tient compte que d’un seul, on va dans le mur. Ces trois critères sont, le client, d’abord, parce que sans débouché il n’y a pas d’entreprises ; les collaborateurs, ensuite ; et l’actionnaire, enfin, qu’il soit individuel ou un fonds de pension. Il y a donc trois sanctions qui s’imposent à l’entreprise. Celle du marché ne vient qu’en dernier et très tardivement. La consolidation a-t-elle atteint ses limites dans la publicité ? Au contraire, elle est devant nous. Les périodes de crise sont toujours favorables à la consolidation. Il y a des sociétés qui se fragilisent et qui deviennent vulnérables. Nous, nous avons eu une stratégie de masse critique et nous l’avons aujourd’hui. Ceci étant, nous confirmons ce que nous avons dit en juin, nous allons poursuivre des acquisitions très ciblées. D’ailleurs, depuis le 11 septembre, nous avons acquis Fusion DM à San Francisco et nous avons aussi implanté notre enseigne Fallon à Sao Paulo, Singapour et Hongkong.Vous regardez le Japon ? Nous avons l’intention de nous renforcer au Japon, je le confirme. Mais le problème sur l’archipel tient au fait qu’on sait quand une négociation commence, mais pas quand elle se termine. Nous avons entamé des discussions depuis quelques mois avec plusieurs cibles possibles. Jusque-là vous avez investi prudemment dans le net. Est-ce par défiance vis-à-vis de l’économie en réseau ? Internet et les réseaux vont devenir essentiels à la vie des entreprises. Ce n’est pas un élément anecdotique. Je viens d’ailleurs de donner mon feu vert au portail de Publicis, qui a une vocation de communication interne et externe. Par ailleurs, je vous annonce la création d’une place de cotation pour tous les métiers de l’édition. Il s’agit d’une place de marché qui va mettre en relation des clients et des fournisseurs pour acheter du papier, de l’affiche… Elle sera à la disposition de nos clients et d’autres prestataires. Buymundo.com ?” c’est son nom ?” sera basée à Paris puis développée au niveau européen. L’édition pèse environ 6,1 milliards d’euros (40 milliards de francs). Si on prend ne serait-ce que 5 % de chiffre d’affaires sur ce marché et si, sur ces 300 millions, nous réalisons une marge d’1 %, cela fait 300 000 euros. C’est la meilleure réponse que je puisse apporter à votre question.
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