01.net :
Qu’est-ce qui vous choque le plus dans ce
guide commandé par le ministère de la Culture et de la Communication et le ministère délégué à l’Industrie, la démarche ? Le contenu ?
Martine Billard : Le fait d’anticiper des décisions de justice et des débats parlementaires. Il y a un débat au niveau judiciaire sur le peer-to-peer : un procès se conclut d’une façon, un autre
d’une autre. Or, dans la brochure, le gouvernement prend position pour les plaignants [l’industrie du disque, NDLR]. Ensuite, il y a un projet de loi toujours en cours sur la propriété intellectuelle.
Enfin, sur la forme, cette brochure associe des ministères et des acteurs privés. Notamment Vivendi [maison-mère de la major du disque Universal, NDLR] et la Sacem qui sont juges et parties dans l’histoire. En
revanche, on n’a pas associé à cette initiative les parents d’élèves et le milieu éducatif, ce qui est surprenant quand on veut alerter des collégiens.Et le contenu du guide ?
Dans le texte lui-même, à propos du rappel des droits, la brochure oublie un article : celui qui autorise la copie pour usage privé ! Quand on cache sciemment une partie des droits, ça affaiblit l’ensemble de l’argumentaire.
Il y a aussi des approximations sur le sujet des rémunérations pour copie privée, sur le débat général sur le droit d’auteur… Il y a un vrai débat sur ce thème et une évolution est nécessaire. Mais quand on voit, pages 12 et 13,
une publicité pour les sites de vente de musique, ça frise l’indécence.Le principe-même d’un guide pour informer les adolescents sur ces sujets vous paraît-il inutile ?
Non, ça ne me pose pas de problème. Passer par les collèges n’est pas choquant en soit. Mais pas maintenant. Là, cela procède d’une démarche de marchandisation de l’école, comme on le fait avec la Semaine du goût pour le lobby du sucre.
Cette fois, c’est le lobby de l’industrie du disque. C’est un mélange des genres.Voulez-vous l’arrêt de la distribution de ce guide ?
Oui. Et qu’on attende les décisions de justice et que ce ne soit pas une plaquette public-privé.Vous êtes la seule personnalité politique à vous élever contre ce guide. D’autres rejoignent-elles votre avis ?
Apparemment oui, je suis la seule, mais d’autres se sont exprimés à l’époque de la pétition pour faire cesser les poursuites judiciaires contre des internautes. Il y a eu des prises de position à ce moment-là. Moi, je n’avais pas signé, je
n’avais pas suivi le sujet.
Depuis, j’y ai travaillé. Et je suis bibliothécaire, j’ai rencontré les mêmes problèmatiques avec la photocopie. Et pendant longtemps, dans les bibliothèques, on n’a pas eu le droit d’avoir des CD. On disait que ça nuisait au droit
d’auteur.
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