Internet a-t-il rayé de la carte tous les intermédiaires ? S’approvisionne-t-on directement chez le fournisseur ? Non, et loin de là. Les grandes surfaces tournent à plein, les réseaux de concessionnaires sont maintenus, Amazon l’une des success stories du e-commerce reste avant tout un distributeur. Et Dell, l’un des porte-drapeaux de la vente directe en ligne, réussit essentiellement sur le créneau des moyennes et grandes entreprises et peine à s’imposer sur le marché du grand public et des PME qui lui préfèrent apparemment les Fnac et autres revendeurs locaux.Internet n’a donc pas supprimé les intermédiaires. Mieux, il en a créé de nouveaux : les places de marché spécialisées dans la revente d’occasion, tels que ProXchange, Tradorama, par exemple. Il pourrait même renforcer certains réseaux physiques traditionnels dans leur rôle : “Qui mieux que les grossistes peuvent vous fournir en temps réel les informations de stock et de prix dont vous avez besoin pour établir une commande par Internet ?”, constate Jean-Daniel Pick, directeur associé de OC&C Strategy Consultants.Certains intermédiaires ont néanmoins bel et bien disparu, nous explique Marc Singer, directeur associé de McKinsey & Company et coauteur du livre Valeur sur le Net (Editions d’Organisation, 2000). Essentiellement parce qu’ils n’ont pas pu proposer d’autres services que celui de mettre en relation un client et un fournisseur.
Pour lui, la nouvelle voie qui s’ouvre est celle de l’infomédiation. Explications.
01net. : On prétendait il y a quelques années, qu’Internet se substituerait aux réseaux de distribution physiques traditionnels et ferait disparaître les intermédiaires. Qu’en est-il aujourd’hui ?Marc Singer : On n’a pas vu disparaître de catégories d’intermédiaires. Mais, à l’intérieur de chaque secteur, les moins efficaces, ceux qui n’ont pas réussi à se transformer avec l’arrivée d’Internet, ont disparu.En quoi ces intermédiaires n’ont-ils pas su se transformer ?Pour survivre, les intermédiaires doivent devenir infomédiaires et proposer des services à valeur ajoutée au-delà de la transaction entre le fournisseur et le consommateur. Cette fonction, qui représentait la valeur ajoutée avant Internet, s’est en effet banalisée et a perdu de sa valeur avec l’arrivée d’Internet qui a permis à tout un chacun de commander directement au fournisseur. Internet a-t-il fait naître de nouveaux types d’intermédiaires ? Oui, on a vu émerger des versions en ligne de magasins traditionnels, comme les libraires (Amazon), les agences de voyages (Expedia, Orbitz, Travelocity), les services financiers (Intuit Online, Etrade, Eloan, etc.) ou les enchères (eBay, Priceline).Ces nouveaux intermédiaires nés sur Internet ont parfois échoué… Beaucoup n’ont pas marché, comme les sites de vente d’automobiles ou de produits alimentaires à domicile (WebVan), par exemple. La vente en ligne de voitures manque de cette relation personnelle indispensable pour une transaction d’un tel montant et qui comprend aussi une grande part d’émotivité.Vous évoquez une nouvelle catégorie d’intermédiaires, les infomédiaires. Quel est leur rôle ? Un infomédiaire est un intermédiaire en informations. Les consommateurs sont prêts à fournir des informations les concernant à condition d’en tirer une valeur.Ces infomédiaires existent-ils aujourd’hui? Il existe très peu d’infomédiaires pure players. AllAdvantage.com en était un mais a depuis disparu. Les fondateurs ont bâti leur business model sur la base des informations contenues dans notre livre. Il proposait de payer l’utilisateur contre leurs informations personnelles et pour chaque bandeau publicitaire vu. Mais ils ont été victimes de leur succès et ont rapidement été à court d’argent.Pourquoi le bon infomédiaire serait-il une société avec une forte marque ? Si l’ intermédiaire est une grande marque, le consommateur sera moins réfractaire à lui fournir ces informations personnelles, s’il ne l’a pas déjà fait. La grande marque pourra aussi proposer de conserver et de protéger votre identité électronique (carte de crédits, numéro de sécurité sociale, etc.) en agissant comme un infomédiaire pour toutes vos transactions sur Internet, par exemple.
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