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MacBook Pro 2016 : Apple trahit les photographes

En retirant port SD et prise USB classique, Apple force les photographes à acheter des accessoires supplémentaires (adaptateur, lecteur de carte) ce qui agace une grande partie de la communauté.

Cablegate, épisode 2 : après la disparition de la prise jack sur les nouveaux iPhone 7, Apple connaît une seconde tempête avec l’élimination des prises de ses nouveaux MacBook et plus particulièrement la disparition du port pour cartes SD. Un emplacement cher aux photographes, puisque la quasi-totalité des appareils photo sont équipés d’une telle carte.

Interrogé par le quotidien britannique The Independant, le directeur marketing d’Apple, Phil Schiller, explique la raison de la suppression du port pour cartes SD :

The Independant : Les nouveaux MacBook Pro n’ont plus de port SD pour les cartes mémoire des appareils photo. Pourquoi ? 

Phil Shiller, Apple : « Pour plusieurs raisons. Primo, c’est un port encombrant. Vous avez cette chose (la carte mémoire, ndlr) qui dépasse à moitié. Ensuite, il y a des lecteurs de cartes mémoire USB très bons et très rapides, et vous pouvez tout aussi bien utiliser des (cartes) Compact Flash que des SD. Nous n’avons jamais pu résoudre ce problème – nous avons choisi la SD parce qu’il y a plus d’appareils grand public qui sont équipé en SD mais vous ne pouvez choisir qu’une seule prise. C’était donc un arbitrage. Et puis il y a de plus en plus d’appareils photo qui intègrent une connexion sans-fil. Une solution très pratique. Nous pensons donc qu’il a une double solution où vous pouvez choisir entre un adaptateur physique ou utiliser le transfert sans fil. »

Colère des photographes

La photo est un domaine dans lequel Apple a toujours eu, à l’instar des communautés graphiques et vidéo, une grande part de marché. Sur DPreview, un site référent sur la photographie qui agrège une communauté très active, le nombre de commentaires (négatifs, en grande majorité) autour de la disparition du port SD génère autant voire plus de commentaires que des tests de boîtiers pourtant très attendus comme le RX100 Mark V !

Commentaires tirés de DPreview.com

Traductions des commentaires : 

– Apple vend désormais 17 dongles. C’est leur industrie la plus florissante.
– “Phil Schiller d’Apple explique que les ports pour cartes SD sont encombrants”
Quelle explication idiote. Le port SD est l’interface la plus utile d’un PC portable.
– Transférer mes fichiers RAW en Wi-Fi ? Mais bien sûr…
– Parfait, cela résout mon problème. Pas de MacBook Pro pour moi.
– Je pense que le suffixe “pro” a pris sa retraite. Apple ne cible plus les professionnels de l’image – c’est une décision de marché de masse.

Vétéran de la blogosphère anglophone dédiée à la photographie, Mike Johnston de The Online Photographer, pas geek pour un sou, a même considéré se construire un hackintosh sur la base d’un PC portable. S’il est peu probable que tous les photographes passent à l’acte, le simple fait qu’un grand nombre d’entre eux évoquent la possibilité de se passer d’Apple montre à quel point cette disparition les touche.
Le photographe en goguette, qu’il soit professionnel, expert ou amateur, aime partir le plus léger possible. L’ajout d’un accessoire supplémentaire, à la fois fragile et qu’on peut facilement perdre, est une faiblesse dans le flux de travail du pêcheur d’images, qui passe souvent ses soirées à vider, trier et développer ses clichés de la journée. Que faire quand on n’a rien pour vider sa carte ? Un problème qui touche encore plus les reporters qui se doivent d’agir vite.

Déni de réalité

Dans le monde d’Apple les fils ont disparu, car le designer en chef de la marque, Jonathan Ive, déteste les câbles, un jusqu’au boutisme qui s’étend à tout ce qui dépasse de ses machines. Quand Phil Schiller affirme qu’il est gênant de voir une carte SD dépasser de son ordinateur quand on la vide, il ne fait que chercher une réponse polie à l’injustifiable. La carte SD n’a pas vocation à rester dans l’appareil, on la branche, on la vide et c’est fini.

De plus, de nombreux PC portables offrent des ports SD où la carte peut s’enfoncer totalement dans le corps de la machine. Quant à la mention la carte Compact Flash, on nage en plein délire : des appareils pros comme l’EOS 5D Mark III ou le Nikon D810 intègrent deux emplacements de cartes mémoires dont un SD. Et en cas d’oubli du lecteur CF, il suffit d’un câble mini ou micro USB pour relier l’appareil photo à l’ordinateur, une solution désormais impossible avec la disparition des prises USB classiques (USB-A) au profit des Thunderbolt au format USB-C.

Avec les nouveaux MacBook Pro, il va donc falloir acheter soit un adaptateur USB pour votre lecteur de carte, soit un nouveau lecteur de cartes au format Thunderbolt. Une perte d’argent et une production de matériel à la fois inutile et polluante. Au temps pour la caution environnementale dont Apple se pare à chaque conférence. 

La supériorité de la liaison directe

Que ce soit en termes de vitesse, de consommation énergétique, de sécurité ou de complexité de mise en œuvre, la liaison directe d’un produit à un autre est toujours supérieure au passage à une liaison sans fil. L’argument “pratique” de la liaison sans fil ne fonctionne pas puisque de nombreux appareils photo ne prennent en charge que des liaisons vers les applications propriétaires des smartphones.

On ajoute à cela que le risque de se retrouver dans le précieux câble ou accessoire pour vider sa carte mémoire – vous avez vraiment envie de vider 64 Go de RAW en Wi-Fi ? – force le professionnel comme le passionné à réfléchir au rachat de tout ou partie de son équipement afin de prévenir le moindre risque de panne de cet intermédiaire. Là encore, l’absence de prise USB classique s’avère un vrai problème.

Un rayon de soleil dans la tempête

Olympus est l’un des derniers constructeurs d’appareils photo à faire appel à un câble propriétaire pour la liaison informatique de ses boîtiers.

Il y a un bon point dans cet orage : la décision d’Apple pourrait forcer les constructeurs d’appareils photo à avancer un grand coup et à harmoniser leur prise de données vers une prise USB C.
Actuellement, le monde de la photo est un grand chaos : USB 2 ou USB 3 selon les marques et modèles, avec des prises allant du Mini USB, au Micro USB classique ou Micro USB 3 avec broches supplémentaires. Sans parler d’Olympus qui persiste avec son stupide câble au format propriétaire – coucou les ingénieurs d’Olympus.

Gare à ne pas jeter trop vite la pierre aux constructeurs d’appareils photo : contrairement à GoPro et Apple qui ont très vite intégré la prise au format USB-C du nouveau standard Thunderbolt, les groupes japonais ne sont pas des entreprises sans usine. Ce sont de gros groupes qui possèdent souvent leurs usines et répondent à des logiques industrielles. Le remplacement de chaque élément est longuement pesé à l’aune des coûts de développement et d’intégration.

Espérons que la décision tyrannique d’Apple puisse au moins mettre un peu d’ordre dans le câblage des appareils photo. Ça sera toujours ça de gagné.

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Adrian BRANCO