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Lutte contre le cybercrime : tir groupé contre le projet gouvernemental

Après le vote du Sénat, intervenu cette nuit, le projet de loi de lutte contre la cybercriminalité devrait être adopté dans l’urgence par l’Assemblée nationale à la fin du mois. Tollé des organisations de défense des libertés individuelles.

Dans la nuit du 17 octobre, le Sénat a adopté à mains levées le projet de loi sur la ” sécurité quotidienne “. Le texte doit maintenant retourner devant l’Assemblée nationale pour une lecture définitive, le 31 octobre. Ce texte reprend un ensemble de dispositions déjà présentes, au printemps, dans le projet de loi sur la société de l’information (LSI).Pour beaucoup d’organisations ?” dont la Ligue des droits de l’homme, Reporters sans frontières, le Syndicat de la magistrature, le SNJ et Attac ?”, ces mesures sont ” lourdes de conséquence pour les libertés “.D’autres associations comme Iris (Imaginons un réseau Internet solidaire) n’hésitent pas à évoquer des mesures “liberticides”.Quoi qu’il en soit, il semble probable que si elles avaient été retenues dans le cadre de la LSI, ces dispositions (contestées) auraient pu faire l’objet d’un examen détaillé de la part du Conseil constitutionnel. Or, aujourd’hui, les parlementaires semblent avoir renoncé à un tel recours.Cité par Le Monde, le rapporteur du projet de loi au Sénat, le sénateur RPR Jean-Pierre Schosteck, reconnaît ainsi que “la période ne se prête pas à la rédaction d’un dispositif parfait, il faut agir en urgence et, en conséquence, nous soutenons le gouvernement”.

L’union sacrée est de retour

En d’autres temps, il y a quelques mois à peine, l’unanimité du vote sénatorial sur un texte touchant de si près au respect des libertés publiques aurait fait figure d’exercice de ” démocratie couchée “.Mais depuis le 11 septembre, la donne politique et électorale a radicalement changé. L’union sacrée est de retour. Au point que les parlementaires de tous bords semblent ne plus faire qu’un seul homme derrière le gouvernement.Aujourd’hui, les dispositions incriminées touchent à la durée de conservation des données de connexion, aux “obligations des fournisseurs de prestations de cryptographie”, et aux moyens de déchiffrement mis à la disposition de l’autorité judiciaire.Sur le premier point, le texte prévoit la conservation pour une durée maximale d’un an des données de connexion à Internet par les FAI “dans le seul but de permettre […] la mise à disposition d’informations à l’intention de l’autorité judiciaire
.Les conditions d’applications de cette mesure seront fixées par décret au Conseil d’Etat, après avis consultatif de la Commission nationale informatique et libertés (Cnil).Jusqu’ici, en l’absence de toute réglementation, les FAI conservaient ces informations pendant trois mois, sans que cela ne pose aucun problème.A la tribune du Sénat, le ministre de l’Intérieur, Daniel Vaillant, a déclaré : “Nous devons reconnaître nos vulnérabilités pour renforcer nos contrôles, parce que c’est à ce prix que nous pouvons espérer sauvegarder nos libertés et nos vies. Mais il ne s’agit en aucun cas d’intercepter le contenu des courriers électroniques. “

” toute forme de surveillance électronique ou exploratoire pratiquée à grande échelle est interdite “

De son côté, l’Iris rappelle la position du Parlement européen pour qui “en vertu de la Convention européennes des droits de l’homme et conformément aux arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme, toute forme de surveillance électronique ou exploratoire pratiquée à grande échelle est interdite “.Par ailleurs, grâce à ce projet de loi, les juges, pour mettre à jour les secrets de données cryptées, pourront désormais recourir à des spécialistes de la cryptographie, ainsi qu’“aux moyens de l’Etat soumis au secret de la défense nationale”.Enfin, les prestataires de cryptographie seront tenus de livrer, si besoin est, aux autorités, leurs conventions de déchiffrement des données cryptées par leurs services.Si l’issue du vote semble prévisible, la navette parlementaire n’est toutefois pas terminée et, pour que chacun puisse se faire une idée précise, le Forum des droits de l’Internet vient, en bon juge de paix, de mettre en ligne un dossier complet sur ce sujet.

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Philippe Crouzillacq