On ne sait si on connaîtra un jour toute la vérité sur cette affaire, mais une chose est sûre : depuis le lundi 22 janvier, les sites des clients de Digiweb France, ainsi que les listes de diffusion gérées par l’hébergeur du Sentier, à travers Poplist, ne sont plus accessibles.Les explications de cette interruption de service varient énormément selon que l’on parle avec Digiweb ou avec Interliant. Ce dernier refusant de répondre aux accusations et sous-entendus de l’hébergeur français.
La version de Digiweb
“Après sept mois sans factures, Interliant nous a demandé 70 000 dollars à la mi-janvier. Alors qu’il n’avait pas été question de suspension, le service a pourtant été interrompu trois jours plus tard. Interliant avait, un moment, promis de rétablir le service avant de nous demander en échange de signer une renonciation à toute poursuite judiciaire “, explique Stéphane Cohen, directeur général de Digiweb, qui affirme avoir versé immédiatement 10 000 dollars par virement électronique.Il se refuse à payer l’intégralité de la somme, qui ne fait pas l’objet d’une facture détaillée. Mais surtout il affirme que l’incompétence d’Interliant tout au cours de l’été lui a coûté 40 % de ses clients et environ un million de dollars.Il exige donc des dommages et intérêts, qui viendraient en déduction de la somme demandée. “Interliant a racheté plusieurs dizaines d’hébergeurs, dont Digiweb USA qui était le nôtre. Je précise que nous n’avions pas de relation d’affiliation, simplement une relation commerciale avec Digiweb USA, ajoute Jacques Deguest, gérant de Digiweb France. Depuis le printemps, Interliant fait preuve d’incompétence. Il y a des coupures fréquentes. Toute l’équipe technique a été licenciée et le réseau n’a plus été surveillé 24 heures sur 24 pendant un moment.”
La version d’Interliant
Chez Interliant, on est franchement moins causant. La directrice des relations publiques, Rosanne Desmone, s’en tient à son communiqué. “Nous avons suspendu les comptes de Digiweb France pour cause de non-paiement en accord avec les termes de leur contrat. Nous avons envoyé à Digiweb de nombreux avertissements pour non-paiement ainsi qu’un avertissement de suspension.”La société se dit touchée par le sort des clients de Digiweb en France. “Nous avons offert à Digiweb France, par l’intermédiaire de ses avocats, la possibilité de discuter d’une solution pour que ses clients récupèrent leurs données. Mais tant que nous n’avons pas l’autorisation écrite de Digiweb France, nous ne pouvons malheureusement pas aider ses clients.”Stéphane Cohen bondit. “Interliant a dit à plusieurs de nos clients qu’il attendait notre autorisation écrite pour reprendre le service. Nous n’avons jamais reçu cette demande, mais nous avons quand même envoyé cette autorisation. Bien sûr que nous voulons que nos clients aient accès à leurs sites !”Jean-Claude Nicou, de JCN Consultants, est client de Digiweb depuis deux ans. L’ancien employé d’IBM se dit très satisfait des services de Digiweb, qui héberge les sites qu’il développe pour des associations. “Digiweb m’a dit avoir payé la facture en question par virement électronique. Mais un responsable d’Interliant aux Etats-Unis, avec qui j’échange par e-mail, m’affirme que non. “
Des discussions de rachat qui déraillent
Stéphane Cohen attaque alors sur un autre terrain, celui des pratiques anti-concurrentielles. “Cet été,
Interliant Europe [alliance entre Vivendi, Softbank et Interliant Inc., NDLR] nous a contactés en vue du rachat de nos activités d’hébergement. Nous étions intéressés, car notre but est de nous concentrer sur nos activités autour des listes de diffusion de Poplist. En octobre, il n’était plus intéressé. Puis fin décembre, il a repris contact en nous disant que début janvier soit Interliant, soit Cegetel (Vivendi) allait nous racheter. Finalement ce fut un nouveau non et la lettre d’Interliant exigeant 70 000 dollars peu après.”En attendant, Digiweb s’est adressé à freesbee (LibertySurf) pour trouver une solution de rechange. Ainsi les clients français peuvent-ils déménager manuellement leurs sites sur de nouveaux serveurs, même si leurs données sont toujours prisonnières des serveurs d’Interliant. “Ils devraient retrouver leurs adresses d’ici à ce soir “, promet Stéphane Cohen. Le service Poplist, quant à lui, n’est pas encore rétabli.Conclusion de Jean-Claude Nicou à propos de cette triste histoire : “Peut-être faudrait-il que tout le monde soit plus diplomate…”
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