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L’intelligence artificielle va profondément modifier le monde du travail. Oui, mais comment ?

Comment l’IA va-t-elle transformer notre travail ? Il n’existe aucun consensus en la matière, les réponses diffèrent en fonction des auteurs des différentes évaluations.

À quel point l’intelligence artificielle va-t-elle transformer nos métiers ? À cette question, des analystes apportent des réponses différentes, depuis des années. On connaît le dernier rapport de Goldman Sachs publié en mars dernier, qui montrait que l’intelligence artificielle générative allait « affecter » 300 millions d’emplois à temps plein dans le monde. Mais que veut dire affecter ? S’agit-il de remplacer, de transformer, d’améliorer, s’interroge le New York Times, le 10 juin dernier ? Le quotidien rappelle en effet qu’affecter ne veut pas forcément dire supprimer. Parmi les postes qui disparaitraient, on trouve tous les métiers réputés automatisables. Mais là aussi, les évaluations de ce qui est considéré comme pouvant être automatisé varient fortement. En 2021, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) évaluait que seuls 9 % des emplois présentaient un risque élevé de remplacement par des robots ou des logiciels.

Un chiffre bien plus bas qu’une autre évaluation, publiée en 2014, qui estimait que 47 % des professions actuelles pouvaient être automatisées. « Les gens pensent toujours qu’un chiffre doit être solide, parce qu’il s’agit d’un chiffre. Mais les chiffres peuvent vraiment être très trompeurs », expose Melanie Arntz, auteur principal d’une autre étude du centre ZEW, interrogée par nos confrères. En 2017, son équipe considérait que seulement 9 % des professions dans 21 pays pouvaient être automatisées. Qui a raison, qui a tort ? 

Tout ce que fait un salarié n’est pas forcément automatisable

« L’incertitude est énorme », explique David Autor, professeur d’économie au Massachusetts Institute of Technology, contacté par le New York Times. D’autant qu’au sein d’un métier, tout ce que fait un salarié n’est pas forcément « automatisable ». Il existe une foule de tâches, dont le travailleur n’est pas forcément conscience, que la machine serait incapable de reproduire. Par exemple, IBM, avec son logiciel Harvey, promettait que son outil, présenté comme révolutionnaire allait, en 2016, remplacer les radiologues, à tel point que ce métier serait bientôt en voie de disparition. Mais en 2023, cette profession est toujours là. La raison : le logiciel ne réalisait qu’une infime partie des tâches réalisées par cette profession médicale – il y en aurait 30 en tout, rapportent nos confrères, s’appuyant sur des données du gouvernement américain. 

Et à côté de la question de l’automatisation des métiers, il existe un autre élément qui pourrait modifier la donne : la façon dont les entreprises décideront d’utiliser l’IA. Vont-elles adopter cette technologie pour remplacer leurs effectifs, ou l’utiliser au contraire pour accroître l’expertise humaine de leurs salariés, s’interroge Daron Acemoglu, professeur au M.I.T. interrogé par nos confrères. Le travailleur va-t-il être remplacé par la machine, ou au contraire « augmenté », l’IA nous libérant des tâches répétitives pour nous permettre de nous concentrer sur les parties les plus créatrices ou à plus forte valeur ajoutée ?

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Dans le domaine du service clientèle, une entreprise pourrait par exemple vouloir remplacer une partie de son service par un logiciel, ne faisant intervenir les opérateurs humains que pour résoudre des problèmes. À l’inverse, la même société pourrait conserver les travailleurs humains, mais mettre en place un outil d’IA générative qui va fournir des suggestions aux agents sur les réponses à apporter aux clients. Une étude de Stanford et du MIT sur une entreprise qui avait mis en place un tel système montre que l’outil améliore surtout les réponses des agents les moins qualifiés comme les débutants. Cette approche sera-t-elle majoritaire dans le secteur ? Réponse négative pour le professeur Acemoglu, plutôt pessimiste, qui estime que les entreprises, actuellement, ne s’orientent pas vers une « voie pro-humaine ».

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Source : The New York Times


Stéphanie Bascou