I-travailleuses, i-travailleurs, groupez-vous et demain l’Internationale sera l’i-genre humain. Au premier tour de la présidentielle, dans notre groupe dirigé par l’un des princes de l’internet français, nous sommes nombreux à vouloir voter pour Arlette. Pourquoi des privilégiés et autres cadres très sup’ votent-ils pour l’ennemie intime de notre PDG Roland et de son vieux pote des rallyes du xvie, le baron Antoine-Ernest ? Pourquoi des branchés fringués Armani et Kenzo craquent-ils pour le top model 3e âge de chez Kiabi ? Parce que les i-boss nous traitent comme des i-b?”ufs ! Parce qu’on est payés en monnaie d’i-singe, et que la semaine de 70 heures, on en a plein l’i-c… ! Notre patron, Roland, à la mâchoire aussi carrée que celle de Lindsay Owen-Jones, chef suprême des cosmétrucs loréaliens, et aussi tentaculaire que celle de J6M (Monsieur “J’ai-6-Mâchoires”), essaie de nous faire voter pour Chirastignac, mais c’est Arlette qu’on va voter ! C’est la s?”ur à Trotsk-i, la mère à Gavroch-e, et même si vu son look c’est pas avec elle qu’on irait au coiffeur, on sait bien qui c’est qui lutte pour nous, et laquelle qui se dégonfle pas face aux patrons ! Donc, quand le boss nous chiraquise et déjospinise les tympans, on opine… mais au moment de voter, on sort le carton rouge. Et pour le second tour, devoir civique bernique, on ira à la pêche online… À propos d’internet, les sites de notre groupe d’exploiteurs se portent bien, et la reprise commence à gonfler nos voiles aussi fort que l’ego du patron ! Il vient même d’amener le spinnaker pour griller notre concurrent dans le dernier bord de cette folle régate que nous menons pour un très gros contrat de formation professionnelle. Trois cents cadres de la Commission de Bruxelles en formation longue durée, un vrai pactole. Objectif : leur apprendre à nager dans les méandres du web. Mission : un ixième week-end de lobbying pour convaincre le directeur de la concurrence à la Commission, la DG4. Heures sup’ non payées, sauf si succès. Et si succès : quelques euros symboliques, avec en prime un sourire mécanique du boss… Bref, la routin-e. Charlotte, notre numéro 2, et Romont, numéro 2 ex æquo, se sont donc retrouvés avec moi dans l’un de ces palaces bruxellois réservés aux VIP européens, logés dans des suites où la main d’Arlettene mettra jamais le pied. En tant que dir com et n?’ 4 de la boîte, j’étais là pour aider mes deux supérieurs à peaufiner la man?”uvre… Nous nous sommes pointés au séminaire où le directeur de la concurrence faisait un speech pompeux, que nous avons applaudi plus fort que tous les autres. Ensuite, Romont et moi nous sommes rués sur lui, en le congratulant bassement. Si bassement, quil nous a marché dessus pour se diriger vers notre rival, un grand Anglais arrogant à dentition thatcherienne. Heureusement, Charlotte a aussitôt intercepté le haut fonctionnaire, très impressionné par sa veste Versace et ce que ne cachaient pas les trous luxueux de son chemisier Yamamoto à mailles… Le lendemain matin, décoiffée, ?”il brillant et chemisier froissé, elle nous rapportait le contrat signé. i-Travailleuses, i-travailleurs, quand briserez-vous vos chaînes de sexclaves ? Eh bien, Arlette, on se tâte…
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