La situation des opérateurs paneuropéens semble critique, comment l’analysez-vous ?Cette crise est d’abord mondiale, et concerne tous les acteurs des télécoms, opérateurs et équipementiers. Tous doivent rassurer et regagner la confiance des marchés financiers. Il leur est impératif de dégager rapidement des revenus, de diminuer les coûts d’exploitation et d’atteindre très vite un Ebitda positif.La concentration et les faillites vont-elles se poursuivre ? Et jusqu’où ?La concentration est inévitable car il y a trop d’acteurs ayant des stratégies voisines en regard de la rareté des capitaux disponibles. Elle est engendrée par les marchés financiers, qui sanctionnent tous les acteurs, faute de savoir lesquels survivront. Level 3 bénéficie de sa stratégie de préfinancement, qui lui permet de disposer de 4 à 5 milliards de dollars, et d’atteindre un Ebitda positif d’ici à la fin 2001. Quant au nombre d’opérateurs viables sur ce marché, je le situerais entre cinq et sept, mais il convient de distinguer les différents profils d’opérateurs.Certaines difficultés rencontrées par les opérateurs sont dues à leur diversification. En vous lançant dans l’hébergement, ne courez-vous pas un risque ?L’hébergement n’est pas une diversification, mais un des éléments clés de notre métier. En effet, nos clients, depuis nos centres d’hébergement, accèdent à notre réseau, en bénéficiant d’une disponibilité du service de 100 % et d’un accès illimité à la bande passante. Dans nos centres d’hébergement, qui représentent 640 000 m2 au total, nos clients s’échangent des masses d’informations à des coûts réduits. À terme, la demande excédera l’offre, d’autant que la raréfaction des capitaux conduira à l’abandon d’un grand nombre de projets.De grosses sociétés de trading montrent le bout du nez en Europe. Quel rôle vont-elles jouer dans les télécoms ?Level 3 ne s’affiche pas du tout comme un trader de bande passante. Nous nous situons clairement en amont, dans la mise à disposition de services de bande passante ou de connectivité Internet disponibles sur nos réseaux. Nos clients sont des opérateurs ou des acteurs majeurs d’Internet. S’ils participent aux activités de trading, ils ont, dans nos centres d’hébergement, accès à toute la capacité dont ils pourraient avoir besoin. N’oublions pas que le nombre moyen d’intermédiaires entre le producteur et l’utilisateur final est de neuf. Je vous laisse imaginer les marges cumulées découlant de ces transactions successives. Nous considérons les traders comme une voie d’accès à un marché complémentaire.Dans votre métier, faut-il posséder ses fibres optiques ou plutôt les louer ?Il s’agit plutôt de maîtriser les conditions techniques et économiques pour offrir le meilleur rapport qualité-prix sur les court et long termes. Nous disposons d’un réseau conçu dès l’origine pour être évolutif, permettant de recevoir les fibres de dernière génération, et offrant une capacité croissante à un prix compétitif. La plupart de nos concurrents sont confrontés à des dilemmes majeurs : certaines de leurs fibres ne seront jamais mises en service car les coûts opérationnels seront trop élevés par rapport aux nouvelles conditions du marché. Les autres seront tributaires de la pérennité de leurs fournisseurs d’équipements.
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