Contrairement aux apparences, la faiblesse de l’euro n’est pas une fatalité. Elle est due principalement à un problème de cohérence politique au sein de l’Union européenne et de crédibilité monétaire. Ainsi, si le ralentissement de l’économie de l’Euroland est aujourd’hui si avancé, c’est notamment parce que la BCE a trop tardé à abaisser son étreinte monétaire. Pourtant, mieux vaut tard que jamais et il serait vain de critiquer l’institut monétaire pour cet acte amplement justifié. En fait, il faut que la BCE continue sur sa lancée. Il faut également qu’elle entre (enfin !) dans l’ère de la ” nouvelle économie “. Qu’elle fasse preuve de plus de transparence et d’une réactivité accrue.
Entrée dans le réel
Pour ce faire, trois solutions très simples pourraient être mises en places. Primo, publier le contenu des réunions de politique monétaire, en indiquant notamment le nombre de voix pour ou contre la décision prise, sans pour autant spécifier l’identité des votants. Secundo, établir une règle de décision en fonction de l’inflation, hors énergie et produits alimentaires, c’est-à-dire la seule sur laquelle la BCE puisse agir. Tertio, puisque l’euro fait l’objet de pressions à chaque réunion monétaire, il serait bon de limiter ces dernières à une par mois. Mais, au-delà de cet enjeu certes primordial, deux événements majeurs pourraient renforcer notre devise début 2002.Le premier est inévitable, puisqu’il s’agit de l’avènement physique de l’euro et de la disparition de ses subdivisions actuelles. À l’instar du passage réussi à l’euro scriptural, celui-ci devrait générer un impact psychologique fort sur sa valorisation.L’autre événement est moins sûr, mais serait peut-être plus porteur, puisqu’il s’agit de l’éventuelle adhésion du Royaume-Uni à l’UEM. Comme l’a laissé entendre Tony Blair, un référendum pourrait avoir lieu sur la question dans le sillage des élections législatives. En cas de victoire du oui, la Suède et le Danemark pourraient évidemment suivre l’exemple, ce qui permettrait à l’euro d’être enfin la devise de l’Europe des Quinze et, dans ce cadre, d’asseoir définitivement sa crédibilité. Un match équilibré entre l’euro et le dollar s’engagera alors.Ainsi, d’ici le printemps prochain, une fois que la croissance de l’Euroland sera ragaillardie et que la monnaie unique aura remplacé physiquement les devises des pays de la zone euro, un électrochoc haussier devrait se produire. Avec, cependant, une condition indispensable : la réussite du remplacement physique des devises nationales par l’euro. Evidemment, le changement de monnaie fait naturellement peur. Néanmoins, l’arrivée de l’euro constituera une première : ce sera la seule fois qu’un tel changement intervient en temps de paix et concerne, en même temps, près de 310 millions d’individus. L’aspect euphorisant de ce défi exceptionnel devrait l’emporter sur les traditionnelles craintes liées à la perte de souveraineté monétaire.Certes, le fait que seulement 47 % des entreprises françaises déclarent qu’elles seront prêtes avant le 1er janvier 2002 apparaît inquiétant. Mais cela ne doit pas pour autant nous affoler. En effet, à mesure que l’échéance 2002 va approcher, la nécessité de s’adapter va devenir pressante, mais surtout va constituer un enjeu commercial majeur. Dès lors, les entreprises multiplieront leurs efforts d’adaptation et le feront savoir, de manière à rassurer leurs clients. Autrement dit, ne pas être prêt pour le passage à l’euro sera un facteur de défiance de la clientèle. C’est pourquoi, intégrant cette nouvelle donne, la grande majorité des entreprises françaises et européennes devraient êtres prêtes techniquement et économiquement à l’arrivée de l’euro avant même le 1er janvier 2002.Au total, le passage réussi à l’euro, qui plus est relayé par la perspective d’une prochaine entrée du Royaume-Uni dans l’Union monétaire, ne manquera pas de susciter l’électrochoc psychologique évoqué plus haut. C’est ce qui, malgré les déboires actuels de notre devise, nous permet de rester relativement optimistes et d’envisager le retour à la parité avec le dollar dici au printemps 2002.
*Responsable des études économiques de Natexis Banques Populaires
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