Le présent est fasciné par le changement, au point d’en faire un but et non un moyen d’améliorer les conditions de vie. C’est ce que le philosophe Pierre-André Taguieff condamne sous le nom de ” bougisme “. À vouloir à tout prix changer, la société finit par se couper de ses racines et par accepter sans réfléchir l’inacceptable. Ainsi, comme les nouvelles technologies permettent des décisions rapides prises localement sur la base d’informations faciles à échanger et à vérifier, il est devenu de bon ton de défendre la décentralisation et de soutenir tous les mouvements politiques qui prônent la disparition des États nations actuels. Personne n’ose dénoncer avec la vigueur néces-saire les indépendantistes corses, basques ou autres. Taguieff s’indigne de l’acceptation tacite du racket pratiqué par les groupuscules séparatistes dès lors qu’ils le qualifient d'” impôt révolutionnaire “.Le discours sur la modernité et le snobisme qui le diffuse sont devenus des instruments à démolir l’État. Ils nourrissent des diatribes simplistes contre l’État jacobin, qui servent les firmes multinationales et justifient les terroristes. Or, si le monde ancien n’était pas parfait et si les évolutions techniques doivent s’accompagner d’évolutions institutionnelles, le rôle des dirigeants est de faire en sorte que celles-ci ne remettent pas en cause les acquis démocratiques qui se sont incarnés dans l’État républicain. Avec son acuité intellectuelle habituelle, Pierre-André Taguieff appelle politiques et citoyens à réfléchir avant de se laisser entraîner dans des mutations qui conduiraient la société à se fragmenter en d’impuissantes petites structures, sorte de principautés féodales dignes du Moyen-?’ge.
*Professeur à lESCP
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