Un Allemand embêtait la France. Certes, notre pays en a quelque peu pris l’habitude au cours de sa brave histoire, mais cette fois-là, c’était grave : un Allemand pouvait-il empêcher la France, le pays des champions, de regarder dans les semaines qui viennent la Coupe du monde de football 2002 à la télévision ? Détenteur des droits mondiaux de retransmission de l’événement, Leo Kirch les cédait à un prix qui, dans son exagération, nous rappelait un peu le contentieux de l’Alsace et de la Lorraine. Si orgueilleux soit-il, notre pays en venait à se poser des questions : aimions-nous tant que ça le foot ? Et d’ailleurs, les Bleus étaient-ils assez en forme pour que nous déboursions plus de 150 millions d’euros afin de les voir perdre leur titre sur un bout de pelouse coréenne ? Humm !Bref, le pays en était là, à se demander s’il allait une fois de plus capituler devant l’Allemand, lorsque la nouvelle explosive tomba : TF1 achetait, toute seule, comme une grande, les droits exclusifs de diffusion des deux prochaines coupes du monde pour la bagatelle de 168 millions d’euros ! C’est dur à dire mais quand même, sur ce coup pas très franc, TF1 sauvait la France. D’où la colère de la ministre de la Communication, Mme Tasca. Il est vrai qu’à l’annonce que TF1 allait diffuser gratuitement la quasi-totalité des matchs, le citoyen pouvait bien avoir envie de payer sa redevance à TF1 plutôt qu’au service public ! Car après tout, est-ce notre faute à nous, contribuables, si TF1 sait mieux compter que l’État ?Patrick Le Lay, PDG de TF1, affirme qu’en dépit de l’investissement colossal, sa chaîne ne devrait pas perdre d’argent dans l’affaire ; et qu’il est même sérieusement envisageable qu’elle en gagne. Ce qui, après tout, est le but d’une société privée, mais pas de l’État. Alors ? L’État sait-il faire ses calculs sur un bout de table ? L’État aime-t-il le foot ? L’État aime-t-il les Français ? Grâce à TF1, nous pourrons bientôt regarder la Coupe du monde sans bourse délier. Un sport populaire sur une chaîne populaire au prix le plus populaire qui soit : la gratuité. Posons-le franchement : une fois nest pas coutume, le privé a rendu service au public.* Journaliste et essayiste
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