Le CES apporte parfois son lot de surprises. Alors qu’on quitte le rayon des drones sous-marins, la masse gigantesque d’un genre de tracteur géant équipé d’une rampe de pulvérisation de 36 m totalement déployée nous pousse à nous demander si nous ne nous sommes pas trompés de salon. Est-ce la fatigue ou une erreur de casting façon patate connectée ?
Une fois arrivé sur le stand de la marque John Deere, on comprend vite que le gros véhicule (dont chacune des roues fait la taille d’un homme debout) est bel est bien à sa place sur le salon des nouvelles technologies. Ordinateur de bord, pilotage semi-autonome avec correction automatique des trajectoires et cockpit façon avion de chasse, le « Sprayer » n’est pas n’importe quel tracteur.
« Notre ‘’Sprayer’’ est déjà commercialisé, notamment en France, et il embarque des technologies de pointe », se félicite Julian Sanchez, directeur de la stratégie du département d’agriculture de précision chez John Deere.
À l’avant, plusieurs modules caméra affinent le guidage en partie géré par la coupole GPS sur le toit de la cabine. Un poste de pilotage qui se rapproche de plus en plus d’un vrai cockpit d’avion.
GPS de voiture et buses d’imprimante
« Le domaine agricole fait de plus en plus appel aux composants électroniques, mais aussi à des principes issus des nouvelles technologies », continue Julian Sanchez.
Comme les innombrables buses de projections de liquide qui équipent le gigantesque boomerang à l’arrière du tracteur.
« Pour développer ces buses, nous nous sommes inspirés de celles qui sont intégrées aux imprimantes jet d’encre, ce qui permet d’être plus précis dans la projection ».
La projection de quoi ? D’engrais ou de pesticides évidemment.
Dès que le mot pesticide arrive dans la conversation, on sent Julian Sanchez se préparer au pire. Il faut dire que, déjà critiqué pour sa politique visant à limiter les réparations des agriculteurs sur ses machines, l’Américain sait aussi que la pulvérisation massive de pesticide est de plus en plus critiquée par l’opinion et les autorités sanitaires. La tech est ici un outil pour faire amende honorable et tenter de se racheter une conduite. « On sait très bien que le public a peur des pesticides. Mais il faut savoir que les agriculteurs eux aussi veulent diminuer les quantités, aussi bien pour des raisons économiques qu’écologiques ».
Et John Deere a un moyen de réduire de manière draconienne cet usage.
« D’ici trois ans, chacune des buses de projection intégrera une caméra qui détectera la nature du sol, des plantes, etc. Avec la précision de nos buses, on pourra faire baisser jusqu’à 90% la quantité de produits pulvérisés en ne projetant que sur les plantes. Et en cas de passage sur des zones de terre ou d’eau comme de petits étangs, les buses ne déclencheront pas », promet Julian Sanchez.
Selon lui, « les prototypes de ces buses sont d’ores et déjà fonctionnels », mais il faut encore affiner la technologie et industrialiser les procédés de productions. Une approche qui n’est pas sans rappeler celle de Blue River, start-up que nous avions rencontrée à la GTC en 2017 et qui a depuis été rachetée par Monsanto.
Futur : des flottes de tracteurs autonomes
En tant que vendeur de véhicules agricoles, John Deer a une vision évidemment très mécanisée de l’agriculture et préfère vendre de gros véhicules alors que certaines tendances prônent un retour à de petits tracteurs qui compriment moins les sols. C’est notamment le cas de la start-up Smart AG, que nous avions rencontré l’année dernière en Californie.
Dans la vision du futur de l’entreprise, « le ‘’farmer’’ du futur pilotera sa flotte de véhicules depuis la ‘’tour de contrôle’’ de sa ferme », s’enthousiasme Julian Sanchez, mettant en avant les avancées technologiques (5G, conduite autonome de niveau 3 et 4, etc.) qui arrivent ». Un scénario qui a de quoi faire saliver l’entreprise puisque ces machines hyper high-tech sont évidemment les plus chères.
À un moment pivot où les modèles agricoles intensifs sont de plus en plus remis en question, il est difficile de dire si c’est bien la vision de l’entreprise américaine qui prévaudra. Mais une chose semble sûre : l’impact des nouvelles technologies est aujourd’hui tel, que toutes les industries s’en emparent avec rapidité. Qu’il s’agisse de drone ou de moissonneuses-batteuses.
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