La taxe Gafa, cette taxe appliquée en Europe sur les services numériques, est-elle vouée à disparaître sous la pression de Donald Trump et de ses droits de douane ? Si en France, l’option ne semble pas envisagée, au Royaume-Uni, c’est tout comme. Interrogée par la BBC dimanche 23 mars, Rachel Reeves, la ministre des Finances, a confirmé que la taxe locale, qui rapporte chaque année près de 800 millions de livres (soit 957 millions d’euros environ), faisait bien partie des discussions en cours.
Le pays, comme l’Union européenne, négocie pour échapper à des droits de douane supplémentaires américains, qui devraient être annoncés le 2 avril prochain, selon un timing donné par Donald Trump. Pour le président américain, la menace de ces taxes encouragera les entreprises à relocaliser leurs usines dans le pays, et les contraindra à s’approvisionner auprès de fournisseurs américains.
« Un cadeau fiscal à Elon Musk, Zuckerberg et d’autres barons américains de la technologie »
Or, la taxe Gafa britannique pourrait être échangée contre l’absence de hausse des droits de douane, estiment nos confrères outre Manche. Pour la ministre britannique, il faut « trouver le bon équilibre (…). Nous voulons progresser. Nous ne voulons pas que les exportateurs britanniques soient soumis à des droits de douane plus élevés », a-t-elle déclaré au micro de la BBC.
Depuis 2020, cette taxe de 2 % s’applique aux entreprises du secteur du numérique, dont le chiffre d’affaires mondial est supérieur à 500 millions de livres (600 millions d’euros), dont 25 millions de livres (30 millions d’euros) au Royaume-Uni. Dans le pays, cette hypothèse a mis vent debout des politiques, d’autant que le gouvernement envisage de couper dans les dépenses sociales – avec notamment la suppression de cinq milliards de livres (6 milliards d’euros) de prestations sociales pour invalidité d’ici à 2030.
« Si le gouvernement envisage sérieusement de mettre en place des coupes sombres qui affecteront les personnes handicapées tout en accordant un cadeau fiscal à Elon Musk, Zuckerberg et d’autres barons américains de la technologie, alors le gouvernement travailliste risque vraiment de perdre son sens moral », s’indignée chez nos confrères la parlementaire britannique Daisy Cooper (libéraux-démocrates).
En France, la taxe Gafa aussi dans le viseur de Donald Trump
En France, la taxe Gafa, qui s’impose à Google, Amazon, Meta (la maison mère de WhatsApp, Facebook et Instagram) et Apple, a été créée en juillet 2019, notamment parce que les géants du numérique échappaient à l’impôt sur les sociétés en France, leurs bénéfices étant déclarés en dehors de l’Hexagone. Cette taxe, censée être valable jusqu’à ce qu’elle soit harmonisée au niveau international, sous l’égide de l’OCDE, est toujours en cours. L’OCDE n’est jamais parvenue à un consensus sur le sujet. En 2024, la taxe Gafa française a rapporté à l’État 756 millions d’euros. D’autres impositions, qui permettent de financer la création française, s’imposent aussi à Netflix ou à YouTube dans le pays.
L’ensemble de ces taxes est dans le viseur de l’administration Trump : mi-février, Washington faisait savoir, dans un mémorandum, que « seule l’Amérique devrait être autorisée à taxer des firmes américaines ». Or, « des partenaires commerciaux soumettent les compagnies américaines à quelque chose appelé “taxe sur les services numériques” », est-il déploré – à l’image de la France. Les lois qui « limitent les flux de données transfrontaliers, obligent les services de diffusion (…) américains à financer des productions locales et imposent des frais d’utilisation du réseau » sont « conçues pour piller les entreprises américaines », estime l’administration américaine.
Dès lors qu’un gouvernement étranger « impose une amende, une pénalité, une taxe ou toute autre charge qui est discriminatoire, disproportionnée ou conçue pour transférer des fonds importants ou de la propriété intellectuelle des entreprises américaines vers le gouvernement étranger ou les entités nationales favorisées par le gouvernement étranger », l’administration américaine imposera des droits de douane. Ou prendra toute autre mesure pour réparer le préjudice et le déséquilibre, prévenait-elle.
En retour, la réponse de Paris n’avait pas tardé : « Nous maintenons la taxe ; c’est la loi française. Nous verrons si cela se transforme en un autre genre de conflit avec les États-Unis – j’espère que ce ne sera pas le cas », a répondu mi-février le ministre de l’Économie, Éric Lombard, qui était interrogé par Les Échos.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.
Source : BBC