Appartenir au numéro 2 mondial de la grande distribution influence forcément la perception que l’on peut avoir du marché. Ainsi, quand Guy Paillaud, directeur exécutif d’Atcarrefour, envisage le futur de la distribution en ligne, il ne fait pas dans la demi-mesure.” Elle sera aux mains des mêmes acteurs que la distribution traditionnelle, et elle sera sans doute encore plus concentrée “, prophétise-t-il. Quel que soit le créneau ?” alimentaire, informatique ou cosmétiques ?”, il laisse peu d’espoir aux nouveaux entrants qui essaient de se faire une place au soleil de l’e-commerce.
Nouvelle phase d’évolution
Le dernier rapport du Boston Consulting Group (BCG), publié fin mars, vient étayer les projections du directeur de la division internet de Carrefour. Intitulé The next chapter in business to consumer e-commerce : advantage incumbent, il dresse un portrait du commerce en ligne à l’horizon 2005.Ses auteurs expliquent que le commerce électronique entre dans une nouvelle phase de son évolution : ” Le prochain chapitre de la distribution en ligne s’appuie sur de vieux principes ?”quelle que soit la nouveauté du format ?” et il sera écrit dans une large mesure par les acteurs expérimentés. “L’enjeu est de taille. Le BCG maintient des prévisions exponentielles pour le décollage de l’e-commerce : de 38 milliards d’euros (249,2 milliards de francs) en 2000 à près de 190 milliards d’euros en 2005. Et dans les neuf catégories de produits considérées, les voyages, l’alimentaire et le prêt-à-porter sont distingués comme les créneaux les plus prometteurs.C’est l’alimentaire qui a été investi en premier par la grande distribution française. Les supermarchés en ligne français sont tous adossés à un groupe. Les cinq acteurs, Ooshop (Carrefour), Télémarket (principalement Galeries Lafayette), C-mescourses (Casino), Houra (Cora) et Auchandirect, verrouillent quasiment un créneau encore balbutiant d’à peine 91,5 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2000, réalisés essentiellement sur la région parisienne.À titre de comparaison, le seul marché parisien des produits de grande consommation est estimé à près de 23 milliards d’euros. Parmi les poids lourds, seuls Intermarché et E. Leclerc n’ont pas lancé leur supermarché en ligne, engoncés dans leur statut de groupement d’indépendants. Pour les autres, une véritable course de fond s’est engagée, en tâchant de concilier la conquête de parts de marché avec le passage en positif des comptes d’exploitation.Chez Carrefour, Guy Paillaud est confiant dans l’avenir d’Ooshop et parle de demi-validation : ” Nous avons limité nos pertes à 9 millions d’euros en 2000, l’objectif des 150 millions d’euros [1 milliard de francs, ndlr] de chiffre d’affaires en 2001 est maintenu et, dès l’été, nous allons exporter la formule sur Madrid et son agglomération. Cette validation restait suspendue à la sélection du modèle logistique, et suite à nos expérimentations, nous avons choisi la formule de l’entrepôt dédié automatisé. ” Chez la concurrence, les fortunes sont plus diverses, mais même quand l’incertitude règne encore, on travaille à de nouveaux chantiers.Conformément aux prédictions du BCG, la grande distribution met aujourd’hui l’accent sur la vente de voyages en ligne. Ainsi, Auchan a lancé Voyagesauchan.com fin mars, presque simultanément avec son supermarché en ligne. Carrefour et Casino sont aussi présents sur le créneau. Le premier avec vacances-carrefour.com, une transposition de l’offre de voyagiste qu’il développe depuis dix ans. La démarche est sensiblement la même chez Casino avec C-mesvavances.fr. Même E. Leclerc, pourtant timoré sur internet, propose ses services sur E-leclerc.com.
Deux pionniers
Si la quasi-totalité de la grande distribution française s’est piquée d’épicerie et de tourisme en ligne, seuls Carrefour et Casino multiplient les initiatives. Pour présenter l’ensemble de leur offre, l’un comme l’autre ont d’ailleurs refondu totalement leur site portail en ” .fr “, en janvier pour Carrefour et en avril pour Casino.” Une offre qui va encore s’étendre dans les prochains mois, explique Guy Paillaud. Après le vin, les cosmétiques et la parfumerie, le crédit à la consommation, ou les meubles, nous allons nous lancer sur la vente de matériel high-tech et sur les biens culturels autres que les livres. “Les deux secteurs comportent déjà une multitude d’acteurs en ligne, mais le premier distributeur européen ne doute pas un seul instant de ses atouts. ” Nous sommes dans une problématique différente : nous nous positionnons pour 2005. Alors que certains des acteurs présents sur le marché mettent en place des dispositifs de e-CRM [gestion électronique de la relation client, ndlr] pour optimiser leurs ventes de 5 ou 10 %, nous voulons multiplier notre activité par cent. “S’agissant d’activités qui n’existent pas encore, l’hypothèse est osée. Mais Carrefour a la puissance d’achat et peut toucher directement les 80 % de Français qui sont clients plus ou moins réguliers d’une des enseignes du groupe. Chez Rueducommerce, pure player positionné sur les biens de hautes technologies, Gauthier Picquart, le directeur général, est philosophe : ” L’arrivée de ce type d’acteurs cautionne internet comme canal marchand et contribue à l’essor d’un marché de masse dont nous entendons bien profiter. ”
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