” Lyon a atteint la taille critique. Il est aujourd’hui possible de faire une carrière en informatique dans la région. “ Patrick Barberousse prend volontiers son propre exemple pour expliquer que Paris n’est plus une étape obligée. C’est en quittant la capitale qu’il est devenu directeur des ressources humaines de Cap Gemini Ernst & Young Rhône-Alpes. A ce titre, il supervise une équipe d’un millier de personnes.De son côté, le patron de T-Systems France, Georges Rousseau, dit n’avoir eu aucun mal à convaincre ses partenaires allemands de Deutsche Telekom d’installer le siège français de la société de services informatiques à Lyon.“La région compte beaucoup d’entreprises industrielles et de banques qui mettent en ?”uvre des grands projets. Pour répondre à leur demande et à celle des PME, il existe des centres de formation ?” comme l’Insa ou Centrale Lyon ?” qui favorisent le développement des SSII”, souligne-t-il. Après un exercice tendu sur le plan de l’emploi l’année dernière, 2001 ne devrait pas démentir la tendance.
15 % de turnover à Lyon et encore plus à Grenoble
L’ensemble des grandes SSII cherche à recruter des profils de plus en plus rares. CGEY pense embaucher plus de trois cents personnes en Rhône-Alpes, dont deux cents dans la région lyonnaise. Eric Chaix, le patron de l’agence Industrie de GFI, à Lyon, prévoit de procéder à cent vingt ou cent cinquante recrutements. T-Systems envisage aussi d’engager une soixantaine de profils pour ses équipes dédiées à la ville.Et Intégris espère bien en faire autant. “Nous rémunérons les directeurs d’agence en fonction des recrutements qu’ils effectuent. Mais, depuis le début de l’année, nous n’avons pu embaucher que douze personnes dans la région lyonnaise”, regrette Christian Delgrange, le responsable de l’activité France Régions de la société Intégris.Conséquences de cette pléthore de projets et de la pénurie de compétences, les rémunérations et le taux de rotation du personnel sont en hausse. “Nous pouvons estimer que les salaires ont augmenté de cinq points dans la région lyonnaise l’année dernière, et nous tablons sur une nouvelle progression de 5 % en 2001. Quant au turnover, il est environ de 15 % à Lyon et encore plus important à Grenoble”, souligne Eric Chaix.Pour autant, la zône Rhône-Alpes semble relativement épargnée ?” tout au moins momentanément ?” par la surenchère en vogue dans la capitale, seulement à deux heures de distance en TGV. “Malgré la moindre fluidité sur le marché de l’emploi informatique, les salaires restent toujours moins élevés que ceux de Paris”, tempère Patrick Barberousse. Cette décote des premiers par rapport aux seconds montre que la tension n’est pas à son maximum.D’autres régions françaises, comme Sophia-Antipolis, dans le Sud, ont déjà atteint les niveaux parisiens. “Certes, dans le Nord et l’Est de la France, les recrutements sont plus faciles qu’en Rhône-Alpes. Mais, à Lyon, les salaires restent de 5 à 10 % inférieurs à ceux de Paris”, confirme Christian Delgrange, responsable de France Régions d’Intégris.Les ingénieurs semblent tout à fait s’accommoder de cette baisse, puisque le flux se fait largement en faveur de la zone Rhône-Alpes, et notamment de sa métropole économique. “Il n’est pas rare que des ingénieurs informatiques travaillant en région parisienne proposent spontanément d’abaisser leur salaire de 10 % pour pouvoir venir à Lyon”, renchérit-il.
Des BMW de fonction, pour attirer le commercial
Les profils recherchés sont divers, même si l’ingénieur commercial ou le consultant métier semblent faire l’objet de toutes les faveurs. “Les grands donneurs d’ordres ont demandé aux SSII de s’implanter en province quand tout allait bien. Désormais, elles doivent transformer l’essai en se dotant de structures commerciales fortes pour réagir à la rationalisation de leurs commandes. Certains cherchent à recruter nos commerciaux en leur proposant des BMW de fonction”, explique le patron de l’agence Industrie de GFI.Le caractère très industriel de la région lyonnaise constitue certainement une spécificité. “L’importance de la sous-traitance et de l’industrie fait que la chaîne logistique et les progiciels de gestion intégrés représentent de larges pans d’activité. A ce titre, nous recherchons beaucoup d’architectes systèmes”, précise François Musset, directeur régional d’IBM.” Les profils d’informaticiens expérimentés sont extrêmement rares ici. Comme la plupart de nos concurrents, nous sommes à la recherche de bons directeurs de projet ou de chefs de projet, mais aussi de consultants métier capables de comprendre la problématique industrielle de nos clients “, renchérit Patrick Barberousse, de Cap Gemini Ernst & Young.“Le profil type recherché à Lyon, c’est le chef de projet avec, au maximum, cinq à six ans d’expérience, qui pilote cinq ou six personnes”, précise Michel-Louis Prost, président de la commission Métiers et salaires au sein de l’Adira (Association pour le développement de l’informatique en Rhône-Alpes).
80 % des embauches sont réalisées par les SSII
Si certains cursus se font rares, il est difficile toutefois de résumer la région lyonnaise à un secteur d’activité unique. Là où Grenoble est très marquée par la recherche informatique ?” HP, Sun et STMicroelectronics y disposent de laboratoires de recherche à vocation mondiale ?”, Lyon est beaucoup plus tourné vers l’informatique de gestion. Seule certitude : les recrutements sont essentiellement le fait des SSII.“C’est la règle des 20 % d’embauche par les entreprises utilisatrices et 80 % par les SSII”, confirme Philippe Froger, responsable du centre de l’Apec (Association pour l’emploi des cadres) de Lyon.Dans le monde bancaire, grand consommateur d’informaticiens, la tendance serait même à la réduction des effectifs chez certains utilisateurs. C’est notamment le cas pour la Lyonnaise de Banque, ou pour les Caisses d’épargne de Centre-Est, qui ont récemment choisi Intégris comme opérateur de leur centre informatique lyonnais. Seul le secteur de la logistique ?” Dentressangle, Jet Services, etc. ?” continue de muscler ses effectifs.“Les SSII représentent environ la moitié des vingt mille informaticiens dans la région. Leur effectif devrait croître de 35 % cette année”, confirme Michel-Louis Prost. En revanche, le phénomène des start up se ressent beaucoup plus à Lyon qu’à Grenoble. Elles connaissent des difficultés et sont plutôt dans une période de dégraissage.Paradoxalement, cela ne se ressent pas sur la fluidité du marché du travail. “Ce sont des emplois “virtuels” qui sont supprimés. Et les effectifs des start up n’ont aucun mal à se reclasser dans la région lyonnaise”, souligne-t-on à l’Apec. A l’inverse, le monde des jeux vidéo, qui représente près de mille deux cents postes à Lyon avec une vingtaine de studios de développement, recherche toujours beaucoup de compétences dans les domaines de la programmation et du développement, notamment liés à lintelligence artificielle et au graphisme.
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