Les technologies d’accès vocal à Internet vont bientôt sortir des laboratoires. Les essais sont prometteurs. Les chercheurs de France Télécom ont déjà effectué des démonstrations d’une version vocale du portail Voila. L’utilisateur accède par son téléphone fixe ou mobile aux rubriques (météo, Bourse, horoscope, etc.) de son équivalent HTML www.voila.fr. La parole remplace la souris du PC : l’utilisateur prononce ” météo ” dans le menu, puis le nom de la ville et il obtient les informations désirées. Ce prototype synthétise la voix en temps réel.L’initiative de France Télécom n’est pas isolée. Aux Etats-Unis, Lycos, le troisième portail mondial, a annoncé le 17 août dernier que d’ici à la fin de l’année une version vocale de www.lycos.com serait accessible par téléphone en exécutant un numéro de téléphone local.Les cellules de R&D des plus grandes entreprises des télécoms travaillent d’arrache-pied sur le sujet. Dans son centre de recherche situé à Lannion, Siemens développe VoxPortal, un navigateur vocal (browser vocal) qu’il a présenté à la dernière édition du CeBIT. D’après Christian Onselaere, directeur du centre de R&D de Siemens à Lannion, le système VoxPortal sera prêt début 2001.La vocalisation des sites web a été rendue possible grâce aux progrès réalisés en matière de synthèse vocale. “En fait, précise Christian Dugast, directeur marketing Europe de l’éditeur américain Nuance, spécialisé dans les interfaces vocales, quand les techniques de reconnaissance et de synthèse vocales ont commencé à donner des résultats, on s’est aperçu que l’on pouvait tirer parti de la masse d’informations contenues sur Internet. Informations qui ont en plus l’avantage d’être structurées en base de données informatisées.”
Des requêtes simples et précises
Les chercheurs et les fournisseurs de technologies sont toutefois conscients des limites et des spécificités de l’accès à Internet par la parole. Pour Laurent Courtois, responsable de l’unité Interface Vocale Innovante chez France Télécom Recherche & Développement, “l’intérêt d’accéder vocalement au web à partir d’un téléphone n’est pas de remplacer le PC, mais d’avoir accès aux informations en situation de mobilité. De par l’interface et pour des raisons d’ergonomie, la navigation avec un téléphone ne sera pas aussi riche que celle avec un PC. Et ce fossé existera encore pendant au moins dix ans. Pendant ce temps, l’accès à des sites vocaux ne pourra s’effectuer qu’avec des bases de données limitées.” Une limite technique liée, entre autres, à la puissance de calcul et aux difficultés de la langue française, qu’elles soient d’ordre phonétique, syntaxique ou encore sémantique. Ainsi, aujourd’hui, le système vocal de France Télécom est capable de gérer de 700 à 800 entrées vocales seulement. Selon Daniel Kaplan, délégué général de la Fondation pour l’Internet Nouvelle Génération, qui travaille sur les nouvelles possibilités offertes par Internet, cette limite n’est pas forcément une entrave : “L’utilisateur d’un site parlant voudra aller directement aux services. L’usage de ces sites devra se limiter à des requêtes simples et précises.”
Pour accélérer leurs travaux, les industriels travaillent dans le cadre normalisé du langage VoiceXML. Adopté en mai dernier par le consortium W3C, VoiceXML est le fruit des travaux du forum VoiceXML initié par Motorola, Lucent et IBM. Pour restituer les informations en VoiceXML, différents navigateurs feront leur apparition sur le marché dans quelques mois : Voyager de Nuance sera opérationnel en décembre, VoxPortal de Siemens, intégrant la reconnaissance vocale, sera finalisé au début de l’année 2001, ainsi que celui de France Télécom R&D. Les premiers sites web vocaux développés par ces acteurs seront opérationnels dans la foulée.La cause est entendue : le téléphone mobile sera l’une des rampes de lancement privilégiée du web marchand. L’interface vocale est suffisante pour passer un ordre en Bourse, écouter la météo… Preuve en est des milliards dépensés par les laboratoires d’IBM, France Télécom ou L & H. Chacun perçoit les avantages de ce type d’interface, capable à terme de remplacer un téléopérateur, une assistance téléphonique, etc. Grand perdant potentiel, le WAP, à la navigation malaisée, au temps de transfert laborieux et gourmand en bande passante.
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