Les patrons d’Amazon Europe, Priceminister, eBay France, Pixmania, Rueducommerce et de 3 Suisses International demandent à Joaquim Almunia, le commissaire européen à la concurrence, d’intervenir pour préserver le commerce en ligne face à la distribution traditionnelle.
Dans une lettre ouverte, ils expliquent que la révision de la réglementation européenne en matière de distribution sélective (1) pourrait instaurer une discrimination entre ces deux modes de distribution, au profit du commerce classique.
En effet, l’une des dispositions du nouveau texte prévoit qu’une marque pourra exiger des sites Internet voulant rejoindre son réseau de distributeurs agréés l’ouverture d’un point de vente physique. Les cybermarchands craignent que cette réglementation, ciblant principalement l’industrie du luxe, peu encline à permettre la vente de produits sur Internet par des tiers, n’ait un impact sur les biens de consommation courante.
Risque de maintenir des prix élevés
« Depuis quelques mois, des fabricants de biens de consommation courante (par exemple dans le secteurs des jouets, des montres, de l’électronique grand public et des appareils ménagers) tendent à recourir à la distribution sélective pour commercialiser des produits qui, à l’origine, n’avaient pas vocation à être régis par les règles de distribution sélective. Nous pensons que leur principale motivation est de restreindre la disponibilité desdits produits par le commerce électronique et par conséquent de maintenir des prix élevés au détriment du consommateur final », estiment les marchands dans leur missive.
A en croire les sites Internet, les fabricants d’articles de consommation courante profiteraient de la modification de la réglementation européenne pour reprendre la maîtrise de la distribution de leurs produits sur Internet.
Des cafetières, téléviseurs seraient déjà passés sous ce mode de commercialisation, empêchant de facto tout site d’e-commerce de pouvoir en assurer la revente. « Nous avons admis que le luxe et les cosmétiques peuvent avoir un mode de distribution particulier. Mais ceci doit rester une exception », estime Benoît Tabaka, directeur des affaires juridiques et réglementaires de Priceminister.
Une distorsion de la concurrence
« En France, le principe de la distribution sélective est bien appliqué devant les tribunaux, ce qui n’est pas forcément le cas en Grande-Bretagne. Les sites français pourraient ainsi se voir interdire de commercialiser un article que les consommateurs français pourraient acheter sans problème sur les sites étrangers », poursuit Benoît Tabaka.
Les pure players craignent une distorsion de la concurrence avec les sites Internet étrangers, mais aussi avec les acteurs brick and mortar. Forts de leurs points de vente physiques, Darty.fr et Fnac.com pourraient commercialiser les appareils électroniques passés sous distribution sélective. Ces mêmes articles échapperaient à Pixmania ou Rueducommerce, autres signataires de la lettre.
« Il est faux de penser que les magasins physiques étaient désavantagés par rapport à Internet au motif que les consommateurs vont demander des renseignements dans ces boutiques avant d’acheter en ligne, estime le directeur des affaires juridiques de Priceminister. Selon les statistiques de la Fevad, il y a tout autant de gens qui se renseignent sur Internet avant d’acheter en magasin. »
Afin de pouvoir maintenir une concurrence saine, les sites marchands demandent au commissaire européen de la concurrence de retirer la disposition concernant la création de showrooms physiques. Cette requête exigée par les marques du luxe a peu de chances d’aboutir. Les cybermarchands rappellent que la distribution sélective doit rester une exception et ne pas concerner les biens de consommation courante.
(1) La distribution sélective repose sur la sélection des points de vente par la marque distribuée. Cette pratique est autorisée sous certaines conditions et critères objectifs (surface du point de vente, visibilité des produits, etc.).
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