La Bourse les a portés au pinacle avant de les massacrer. En un an, le cours des actions des opérateurs de télécoms mobiles a été divisé par deux. La note que leur attribuent les agences de rating a chuté en parallèle, pour se rapprocher de celle des junk bonds (les obligations pourries). Pourquoi un tel marasme, et quelles chances ces stars déchues ont-elles de trouver un second souffle ?
Les opérateurs se sont pris à leur propre piège
Les opérateurs de télécoms se sont fourrés eux-mêmes dans ce pétrin. Leur erreur ? Adopter un comportement de cartel lors de la mise aux enchères des fréquences réservées aux services de demain, dits de troisième génération. L’objectif des grands opérateurs, en se groupant ou en se concertant d’un pays à l’autre, était d’écarter les nouveaux entrants. Ils y ont réussi au-delà de toute espérance… en faisant monter sans retenue les prix des licences. Au Royaume-Uni, les gagnants ont collectivement accepté de payer cash (et d’avance !) l’équivalent de 225 milliards de francs au gouvernement britannique.Malheureusement, obtenir la licence n’était qu’un début : le cahier des charges imposé par Bruxelles et les gouvernements nationaux oblige les candidats retenus à fournir des services d’une qualité très supérieure à ceux jusqu’alors en vigueur : clarté et fiabilité des conversations, possibilité de transmettre et de recevoir des données en temps réel…En effet, les pays européens ont adopté pour ces réseaux de troisième génération un nouveau protocole de communication, l’UMTS, qui rend les communications mobiles à haut débit similaires à celles des réseaux fixes de type ADSL grâce à une forte augmentation de la bande passante; mais celle-ci ne peut être augmentée qu’en changeant les équipements radio, les bandes de fréquences, les techniques de modulation, et donc les stations émettrices.
Des ressources, mais à quel prix ?
Avec l’UMTS, le réseau disposera de ressources pour faire face à la croissance du trafic dans les années à venir. Mais à quel prix ! Trente milliards d’euros pour la France, hors coût de la licence. On comprend que Bouygues Telecom ait choisi de se retirer des enchères françaises…Seule solution pour sortir de la nasse : augmenter les recettes, donc alourdir les factures des utilisateurs de mobile. D’abord par l’accroissement des volumes. Doté d’une qualité des communications enfin comparable à celle des lignes fixes (finies les conversations interrompues dix fois entre l’Opéra et la Concorde ! ), le trafic “voix” devrait s’accroître. La structure des recettes va également changer : le trafic des données, qui bénéficiera d’un meilleur traitement qu’auparavant, va monter en puissance par rapport à celui de la voix, pour devenir prédominant. Et c’est la planche de salut des sociétés de télécoms.Car, à consommation de bande passante égale, le transport de données rapporte beaucoup plus que celui des conversations. En Europe, aujourd’hui, le prix moyen perçu par un opérateur pour le transport de la voix est de 10 à 20 euros par mégabit. Pour les messages SMS, il est déjà de 800 euros par mégabit. Mais il atteint de2 000 à 4 000 euros pour certaines applications professionnelles !
Un nouvel eldorado pour les capital-risqueurs
Reste à inventer et à développer ces services à forte valeur ajoutée technologique et marketing. Les opérateurs vont s’en charger, bien sûr, mais ils n’y suffiront pas. Ils accueilleront à bras ouverts les start-up innovantes venant leur proposer des solutions pour gonfler chaque facture d’abonné (le fameux Arpu, average revenue per user). La Finlande ou la Suède, où le mobile est roi, montrent déjà l’exemple: en quelques mois, les opérateurs scandinaves ont vendu plus de 4 millions d’euros en “sonneries de mobiles personnalisées”?”à raison de 2 euros par message SMS avec une nouvelle sonnerie! Ces jeunes sociétés telles que AlloCiné, Optiway, Webraska ou Alternis apporteront aux opérateurs le deuxième souffle dont ils ont besoin. Elles constitueront aussi une opportunité pour les investisseurs. Les capital-risqueurs se ruent d’ailleurs déjà sur ce nouvel eldorado : 227 millions d’euros ont été investis, en Europe et en Israël, pour le seul mois d’avril, dans cette nouvelle race de start-up!
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