01 Réseaux : Qu’est-ce qui explique l’actuel vent de privatisation et de concentration dans le secteur des télécoms spatiales ?Philippe-Olivier Rousseau : Ce mouvement est la conséquence de deux logiques : Intelsat et Eutelsat ne sont plus nécessaires à la garantie d’un service universel, car la concurrence pèse suffisamment sur les prix. Du coup, les ex-signataires et aujourd’hui actionnaires de ces organisations internationales, tous opérateurs de télécommunications plus ou moins privatisés et donc sous la pression des places financières, espèrent mieux rentabiliser leurs investissements en les transformant en sociétés privées. Par ailleurs, les opérateurs privés, comme SES Global, sont poussés à accroître leur périmètre pour bénéficier d’économies d’échelle dans leurs commandes industrielles et atteindre une masse critique au niveau mondial.01 R. : L’intégration des industriels du secteur spatial et des opérateurs de services est-elle, selon vous, une bonne chose ?P.-O. R. : Je ne crois pas à une présence massive des constructeurs de satellites dans les services. La concentration dans ce secteur n’est pas non plus terminée, et les industriels ne pourront pas systématiquement concurrencer leurs propres clients. Le phénomène intéressant à observer, quand Eutelsat et Intelsat vont entrer en Bourse, et quand SES Global sera cotée aux États-Unis, sera la manière dont les opérateurs de flottes satellitaires vont générer de la valeur et de la croissance pour répondre aux exigences de leurs actionnaires. Si la concentration se renforce, elle limitera l’érosion des marges. On peut estimer qu’à moyen terme il y aura trois grands opérateurs de taille mondiale.01 R. : Cette évolution des télécoms spatiales va-t-elle finalement bénéficier aux entreprises ?P.-O. R. : Les stratégies des opérateurs de télécoms spatiales deviennent plus complexes : le chiffre d’affaires de la téléphonie par satellite décroît en raison de la concurrence des réseaux de fibre optique ; en ce qui concerne la télévision, les chaînes vont achever leur migration de l’analogique vers le numérique et utiliser moins de bande passante. La seule croissance possible réside a priori dans les services IP. Les satellites sont peu adaptés à l’interactivité, mais très appropriés à la distribution de données. La concurrence, la croissance de l’offre et les nouvelles technologies de voie retour vont accélérer et démocratiser ce marché avec des opérateurs qui deviendront fournisseurs de services, ou plutôt de solutions clés en main, intégrées et sur mesure, associant en particulier le spatial au filaire optique. Car il est aussi fort probable que ces opérateurs spatiaux rachètent des infrastructures terrestres pour offrir des solutions globales et multimodes.
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