Copier ou reproduire la pensée humaine, comme tente de le faire l’intelligence artificielle, suppose parfois de laisser place à l’incertitude. En effet, la pensée n’est pas toujours linéaire, mais recourt à des approximations ou à des intuitions, efficaces à défaut d’être justifiables formellement. Les réseaux bayésiens, aussi connus sous le nom de réseaux de croyance bayésiens (Bayesians Belief Networks ou BBN), permettent d’exploiter l’incertitude. Ils sont largement utilisés pour résoudre des problèmes de prise de décision lorsque tous les facteurs ne sont pas parfaitement déterminés.
Les BBN permettent de rendre compte de ce qui, dans l’activité d’un expert, n’est pas quantifiable, à savoir son expérience. En effet, dans la statistique déterministe, tous les facteurs doivent être connus ainsi que leur fréquence d’apparition. Une cause a un effet entièrement prévisible. Mais dans la réalité, les choses sont plus complexes. Un médecin qui examine un malade ne se contente pas d’appliquer une table de lecture, il exploite son expérience pour corréler des symptômes et former son diagnostic. Les réseaux bayésiens formalisent justement l’interdépendance des causes.
Un réseau bayésien se présente comme un schéma mettant en forme des relations de probabilité entre un certain nombre d’événements. Dans ce schéma, les n?”uds sont les événements, et les lignes qui les relient représentent les relations de causalité. Chaque n?”ud comporte sa propre table de probabilité, qui recense la fréquence d’apparition d’un événement (elle peut être discrète ou continue). Un BBN est donc composé d’un graphe associé à des tables de probabilité. L’évolution d’un facteur, comme le fait qu’un des n?”uds passe d’un état indécis à un état de certitude, provoque l’évolution de tous les facteurs qui lui sont liés. Le réseau recalcule donc les probabilités au fur et à mesure que la quantité de connaissances disponibles augmente.
Un véritable sac de n?”uds
Les systèmes experts sont des logiciels visant à permettre de réaliser des travaux qui nécessiteraient normalement l’intervention d’un spécialiste. Certains de ces systèmes sont fondés sur l’application de règles combinées par des opérateurs booléens. Seulement, une telle approche manque totalement de souplesse, elle suppose que soient décrites précisément toutes les éventualités sous la forme d’un arbre logique parfaitement structuré. Les réseaux bayésiens codent l’expertise sous une forme moins rigide. Les connaissances de l’expert y sont toujours répertoriées, mais sans déterminisme global. Les liens entre les éléments peuvent être renforcés ou diminués.
Un exemple très simple de réseau bayésien est proposé par Judea Perl (un des fondateurs de la théorie des BBN). Un homme trouve son jardin mouillé le matin. C’est l’effet. Or, son système d’arrosage automatique a connu des problèmes les jours précédents. On a un réseau à deux n?”uds, avec une relation causale simple : le jardin a été mouillé par le système d’arrosage automatique, on constate que chacun des n?”uds fonctionne en oui ou non. Il peut aussi émettre l’hypothèse qu’il a plu la nuit précédente, le réseau se compose alors d’un troisième n?”ud. En regardant autour de lui, l’homme voit que le jardin de son voisin est aussi mouillé, ainsi que la rue alentour. Il peut en déduire que si son jardin est mouillé c’est une conséquence de la pluie qui est tombée la nuit, et non pas d’une panne de son système d’arrosage automatique récemment réparé, qui a donc peu de chances de tomber en panne deux fois de suite en si peu de temps. Le réseau comporte alors quatre n?”uds, pluie, arrosage automatique défectueux, jardin du voisin mouillé et jardin mouillé. L’expertise mise en ?”uvre ici consiste à corréler avec un coefficient plus fort pour certains n?”uds (il est plus courant qu’un jardin soit mouillé du fait de la pluie qu’à cause d’une panne du système d’arrosage). Ce qui exclu certaines hypothèses, ou, du moins, réduit grandement leur probabilité.
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